#MeToo : en France, on "romantise" des "comportements de domination et de prédation" envers les femmes, déplore la Fondation des femmes
Alors que le mouvement #MeToo fête son premier anniversaire vendredi 5 octobre, Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, dénonce sur franceinfo l'accueil défaillant des victimes de violences sexuelles en France.
Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, a estimé ce vendredi sur franceinfo qu'on avait tendance en France à "romantiser" des "comportements de domination et de prédation" envers les femmes. Un an après l'affaire Weinstein, du nom de ce producteur américain accusé d'agressions sexuelles par plusieurs femmes, les hashtag #MeToo ou #Balancetonporc se sont répandus sur les réseaux sociaux et ont libéré la parole des femmes. En France, 71% des plaignantes ont parlé grâce au phénomène Me too, d'après un sondage de la Fondation des femmes. Reste un point noir : l'accueil des plaignantes, qui reste défaillant en France, selon Anne-Cécile Mailfert. "Les pouvoirs publics" doivent améliorer "l'accueil des femmes dans les commissariats", selon elle.
franceinfo : Trouvez-vous la société française encore un peu indulgente vis-à-vis des hommes puissants ?
Anne-Cécile Mailfert : On va mettre ça sur le compte d'un fond culturel français qui est peut-être particulier, qui est peut-être spécifique. On parle souvent de la galanterie "à la française", de la séduction "à la française". En fait, on a encore ce fond qui nous empêche de progresser et qui romantise un peu ce qui est en réalité des comportements de domination et de prédation.
Catherine Deneuve avait publié avec d'autres femmes une tribune dans laquelle elle disait en gros qu'une main aux fesses ne faisait du mal à personne. Existe-t-il encore des résistances ?
Ce genre de tribune serait impensable aux Etats-Unis. Vous caricaturez, mais c'est ça le fond du propos et en plus, elle a été écrite et signée par des femmes. On voit bien qu'il y a un fond de l'air qui résiste au progrès, mais néanmoins la société française est en train d'évoluer très rapidement. C'est un mouvement de fond qu'on ne voit pas. La plupart des femmes quand elles vont témoigner le font surtout auprès de leur entourage, ensuite sur les réseaux sociaux. Pour les hommes et les femmes, le fait de se rendre compte qu'autour d'eux, il y a des femmes qui ont été victimes et surtout que cela les marque à ce point, cela a permis de voir en face ce que sont les violences sexuelles.
Dans votre sondage, on découvre que des progrès restent à faire notamment sur l'accueil des femmes victimes de sexisme et d'agressions sexuelles.
C'est là que le bât blesse. On a une parole de femmes qui s'est libérée, on a une prise de conscience dans la société, mais pour ces femmes quand il s'agit de porter plainte, elles ont encore très peu confiance (...) Plus de la moitié des femmes qui sont allées porter plainte dans les douze derniers mois se déclarent insatisfaites de leur accueil. Il y a encore énormément de choses à faire du côté de la police et de la gendarmerie. Rien d'important et de majeur n'a été fait pour que les femmes soient mieux accueillies (...) Il faudrait que les pouvoirs publics fassent plus et en particulier, améliorent l'accueil des femmes dans les commissariats.
Pourquoi si peu de têtes sont tombées en France ?
En France, on fait attention à la présomption d'innocence qui est parfois utilisée abusivement parce que de l'autre côté on a carrément une présomption de mensonge (…) Il faut faire attention avec cette idée de présomption d'innocence. On a en France un temps de la justice qui est un peu long. Puis, on a encore cette image du héros, du génie, le héros romantique qui peut effectivement avoir des débordements, mais on va lui pardonner "parce qu'il est tellement génial et le génie, il ne faudrait pas quand même l'abîmer. Il ne faudrait pas que pour une main aux fesses, on vienne abîmer les grands génies de la culture française".
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