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Une commission pour mesurer la diversité

C’est aujourd’hui que Yazid Sabeg, le commissaire à la diversité et à l'égalité des chances doit officiellement installer la commission pour mesurer la diversité en France. Celle-ci s’inscrit dans la volonté du gouvernement de lutter contre les discriminations, en matière d’emploi notamment. A peine mise en place, cette commission suscite déjà de vives réactions.
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Comment mesurer la diversité en France ? Par des statistiques ethniques répond Yazid Sabeg, qui propose de mettre les inégalités en chiffres pour pouvoir conduire une politique favorable à la diversité. Et au commissaire à la diversité et à l’égalité des chances de mettre en place aujourd’hui une commission qui sera présidée par François Héran, le directeur de l'Institut national des études démographiques, pour ce faire.

Ce comité, très diversifié comprendra aussi bien des membres de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) que des représentants de la Haute autorité de luttes contre les discriminations et pour l’égalité (Halde). De nombreux chercheurs d'horizons différents y seront également associés. Son but : formuler des recommandations avant l’été qui serviront à élaborer un projet ou une proposition de loi visant à "rendre licite la mesure de la diversité".

Une idée qui ne fait pas l’unanimité. Avec de telles statistiques, le risque serait de transformer la France en "mosaïque" de communautés, contraire au principe d'égalité au sein de la République. C’est en tout cas ce que dénoncent plusieurs sociologues et hommes politiques.

Pour Dominique Sopo de SOS Racisme, qui considère qu’il existe déjà suffisamment d’études sur le sujet, "on n'a pas besoin de chiffres pour lutter contre les discriminations". Le président de la Halde monte lui aussi au créneau. Louis Schweitzer estime qu'"il ne faut pas définir les gens par rapport à une communauté", soulignant qu'aux Etats-Unis, les statistiques ethniques "n'ont pas permis de noter de gros progrès dans la lutte contre les discriminations".

Mais malgré les critiques répétées des défenseurs de l’égalité républicaine, Yazid Sabeg n’en démord pas. Certes, mesurer la diversité ne signifie pas classer les personnes interrogées dans des catégories ethno-raciales comme cela se fait aux Etats-Unis mais plutôt de les questionner sur leur sentiment "d'appartenance à une communauté".
_ Ainsi, s’il se défend de vouloir créer des "fichiers" en instaurant des outils statistiques, Yazid Sabeg, ardent défenseur de l’action positive, estime que les chiffres seront la meilleure manière de mettre fin aux discriminations dont souffrent certains français, en matière d’emploi notamment.

"On est en train d'instaurer une France à deux vitesses, avec des territoires où sont cantonnés les plus pauvres qui sont aussi les plus colorés", insiste le commissaire pour justifier sa position. Et d’ajouter qu’ “il y a urgence” à s’attaquer aux disparités sociales et ethniques, en démocratisant l’accès à la formation par exemple ou en élargissant la pratique du CV anonyme.

Et il peut compter sur un soutien de poids. Le président du Conseil représentatif des associations Noires(CRAN) Patrick Lozès lui a en effet exprimé son soutien, estimant qu'il s'agit de "statistiques de la diversité, pas de statistiques ethniques" et qu'il faut "arrêter de se faire peur".

Les Français eux, ne voient pas la chose du même œil. Selon un sondage CSA-UEJF-SOS Racisme, ils sont 55% à juger "pas efficace" la mise en place de statistiques ethniques pour lutter contre le racisme, l'antisémitisme ou les discriminations.

Par ailleurs, le premier rapport sur la "mesure de la diversité" que Yazid Sabeg devait remettre vendredi dernier à Nicolas Sarkozy, a été reporté. Le commissaire à l’égalité qui affirme que ce rapport est prêt, devrait faire parvenir son étude au chef de l’Etat dans les prochains jours.

Mikaël Ponge, avec agences

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