Trois bonnes raisons d'exiler sa toque
Le chef doublement étoilé Nicolas Le Bec a annoncé qu'il quittait la France pour la Chine. Comme lui, d'autres grands cuisiniers décident de poursuivre leur carrière à l'étranger. FTVi leur a demandé pourquoi.
"Il est temps de passer à autre chose", a annoncé mercredi 11 juillet le chef doublement étoilé Nicolas Le Bec. Le cuisinier vient de vendre ses deux établissements lyonnais pour "s'expatrier" à Shanghai (Chine), où il ouvrira un restaurant gastronomique.
Acquérir de l'expérience, découvrir une ville, mais aussi transmettre la culture gastronomique française… Le Bec n'a pas été le premier à avoir eu l'idée. FTVi a interrogé des chefs qui ont plaqué leur pays pour faire voyager leurs papilles.
• Le désir d'exporter la technique française
Certains, comme Patrick James, sont tout simplement tombés amoureux d'un pays. Pour lui, ça a été l'Espagne. "La langue, la culture, les produits méditerranéens… Tout !" confie ce chef originaire de Normandie. Il a donc monté son restaurant, Pan y Vino (pain et vin), sur l'île de Minorque en 2008. Des produits locaux sont mis en avant, comme la sobrasada (ou soubressade) et du fromage de Mahon, typiques de cette île des Baléares.
"Mais je les cuisine et les présente d'après le savoir-faire français, ma fierté. J'aime beaucoup ce classicisme. Alors qu'en Espagne, on ne trouve que des produits typiques, en France, les produits du terroir sont liés à des techniques précises. C'est une chance et il faut s'en servir", ajoute-t-il.
Une méthodologie qui, de plus, est souvent saluée par les clients étrangers car la cuisine française "fait toujours rêver", pointe Nicolas Le Bec.
• L'envie de former de nouvelles recrues
"Pour l'instant, je vais m'installer là-bas et rentrer dans une nouvelle phase d'apprentissage. Mais dans un futur proche, pourquoi pas monter une école de cuisine à Shanghai ?" s'interroge Nicolas Le Bec. Le cuisinier prend pour exemple la trajectoire de Laurent Suaudeau, installé au Brésil depuis les années 1980.
Cet ancien élève de Paul Bocuse a monté en 2000 l'école des arts culinaires "Laurent" à Sao Paulo. Elle accueille chaque année environ 250 participants qui suivent des modules d'une semaine. Le chef français tient surtout à apporter une nouvelle vision de la formation culinaire qui "au Brésil, est un grand business. [Les formations] sont chères et leurs professeurs n'ont jamais travaillé dans un restaurant. Les enseignements théoriques peuvent être intéressants, mais sur le plan pratique, c'est à revoir", affirme-t-il dans Le magazine de l'hôtellerie et de la restauration.
Pour Nicolas Le Bec, l'envie de former les autres est due à "un climat social en France qui est morose". "Ici, les commis ne trouvent pas de travail et finissent par perdre la motivation. C'est aussi pour le service que j'ai envie d'aller voir ailleurs", explique-t-il à FTVi.
• L'échange de savoir-faire avec d'autres "expats"
Former les autres, mais aussi se laisser former par d'autres cultures. Ces chefs "expats" tiennent à transmettre les nouvelles techniques et traditions apprises hors de nos frontières. Une trentaine d'entre eux fait partie de Villagedechefs.com, qui se définit comme l'association des chefs et pâtissiers venus des cinq continents. Ils échangent des recettes, écrivent parfois des livres à plusieurs et se réunissent de temps à autre pour "toujours s'améliorer". Comme Patrick James. "J'ai passé quinze jours aux Pays-Bas l'été dernier aux côtés d'Alain Caron, qui compte deux et trois étoiles Michelin. Je n'étais qu'un spectateur, mais aussi un apprenti. Je suis rentré avec des idées plein la tête."
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