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Sept destinations capitales pour attendre l'Apocalypse

De Theux à Bugarach, de Moscou à Pékin, les inquiétudes suscitées par la fin programmée de l'Humanité le 21 décembre 2012 par certains catastrophistes ne sont pas au même diapason. Tour du monde dans l'attente de l'Apocalypse.
Article rédigé par Ludovic Pauchant
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
  (Maxppp)

S'ils sont effectivement quelques uns à attendre, plus ou
moins inquiets
, à Bugarach dans l'expectative du louable renfort d'extraterrestres
venus les sauver de la fin du monde programmée, selon certaines interprétations
plus ou moins fantaisistes du calendrier maya, tous n'attendent pas le moment
fatidique de la même manière
. Les manifestations d'anxiété sont aussi
variées que la manière dont on sale les plats d'un point du globe à l'autre
.

 • En Chine, on rassure à la manière forte

Le gouvernement chinois ne rigole pas avec la fin du monde. Méthodiquement,
ce dernier a donc fait arrêter ces dix derniers jours quelque 600 de ses
citoyens âgés de 15 à 58 ans dans neuf des provinces du pays pour prosélytisme.

Tous auraient répandu à grand renfort de tracts alarmistes des rumeurs tendant
à faire croire à leurs coreligionnaires épouvantés que la fin du monde adviendrait
le 21 décembre 2012. Les trois quarts d'entre eux appartiendraient à la secte "Dieu
tout puissant"
 : créée en 1990, la secte, lointainement inspirée
des cultes chrétiens, a jugé bon de promettre le salut à ceux qui la
rejoindrait. On pouvait ainsi lire sur les tracts distribués massivement par
ses adeptes des "conseils avant la catastrophe ", comme écrire une
lettre pour prouver sa fidélité au Dieu-Tout-Puissant pour s'épargner une issue
fatale (et probablement lente et douloureuse). Ainsi, on pouvait lire sur l'une
d'entre elles : "Je dois prêcher auprès d'une centaine de
personnes aujourd'hui, ou je serai maudit
".

• L'exil
turc à Sirince

Près
du site antique d'Ephèse, les hôtels du petit village de Sirince affichent
complet depuis des dizaines de jours : bercé d'ondes positives, c'est un
peu le Theux ou le Bugarach français (voir plus bas). Saint-Jean, le rédacteur bien
inspiré du livre de l'Apocalypse, y a trouvé sa dernière demeure, et, honneur suprême,
la Vierge y serait montée au Paradis : il n'en fallait pas beaucoup plus
pour que s'y presse une foule nombreuse d'illuminés persuadés que l'énergie de
ce bourg aux 600 âmes les transportera, le moment voulu, et probablement en
première classe, vers une destination cosmique loin des tourments terriens.
Aucun des habitants de Sirince ne croient vraiment à la fin du monde, mais ont
bien saisi tout l'intérêt que suscitait les murs de ses bâtisses blanches :
à l'entrée du village, le restaurant du coin célèbrera sous des auspices
canailles l'Apocalypse en servant du vin de la cuvée spéciale fin du monde.

• Au pays des kangourous, la Première ministre prête son corps
à la peur

En Australie, c'est la Première ministre elle-même qui
annonce l'heure venue du Jugement dernier. L'humour australien, si mal connu,
mérite pourtant le coup d'œil : Julia Gillard a ainsi annoncé la fin du
monde à ses compatriotes dans une vidéo postée sur YouTube. "A mes
chers compatriotes australiens qui sont encore vivants, la fin du monde
approche"
, comme "l'a prédit le calendrier maya" , déclarait
ainsi, avec la gravité qui sied aux circonstances tragiques, la Première
ministre australienne. Il s'agissait évidemment d'un canular, commandé par l'émission
The End of the World Show de la radio Triple J. Entre deux drapeaux
australiens, Julia Gillard n'a pas manqué d'assurer ses compatriotes de
son soutien face aux "zombies" , aux "bêtes de
l'enfer" 
et, généreusement, au "triomphe de la pop coréenne" .

• Les Belges se tournent vers Theux

Chacun son clocher. Outre-Quiévrain, puisque Bugarach est
quand même loin, les Belges ont opté pour la petite commune de Theux. Cette
dernière présente en effet quasiment les mêmes caractéristiques géologiques :
comme dans l'Aude, des terrains anciens ont recouvert en certains endroits les
plus récents, assurant à la ville une immunité cataclysmique semblable à celle
de sa cousine française.

• La France de l'Aude (ne) retient (pas) son souffle à
Bugarach

Faut-il encore présenter Bugarach ? Les 200 paisibles âmes
de ce petit village de l'Aude voient depuis quelques semaines leur tranquillité
troublée par une nouvelle forme de tourisme apocalyptique. Hyppies et Ufologues
en tous genres espèrent y sauver leur peau le Jour J, certains de trouver à l'aulne
du pic de Bugarach le secours d'extraterrestres qui trépignent depuis des
lustres pour prendre cliques et claques vers leurs chez eux lointain. Au
passage, disent les convaincus, ils emporteraient les Terriens du coin.
En
réalité, au grand soulagement des autorités qui se tiennent toutefois prêtes à
intervenir en cas d'émeute ou d'afflux de hordes possédées par l'effroi d'une
mort certaine, les foules ne s'y déplacent pas. Les journalistes, oui : 250
d'entre eux, venus de plus de cinquante pays différents, ont été accrédités par
la préfecture.

• Paris veille sur l'Hexagone

Un peu plus au Nord, à Paris, la Miviludes, qui lutte contre
les sectes, n'a pas attendu décembre pour s'intéresser aux problèmes que pose la
fin du monde. En 2010, elle remettait ainsi au Premier ministre son rapport, dont
la première partie annonce sobrement "La résurgence de discours
apocalyptiques à l'approche de 2012 : du mythe de la fin du monde à la réalité
d'un risque accru de dérives sectaires"
. Au terme de la 37eme page du
rapport, la mission interministérielle cite Élisabeth Campos (Sectes et
millénarisme
)
 : "Les groupes comme les individus peuvent expérimenter
dans ces situations d'exception des moments d'angoisse et de psychoses
collectives pouvant les conduire à des séquences de destruction et d'autodestruction.
Des modes de fonctionnement et d'organisation particuliers semblent favoriser
ce risque de "déflagration collective" et on les retrouve souvent dans certains
types de groupes sectaires et de croyances comme les doctrines apocalyptiques qui
avivent la peur du lendemain et de l'imminence de la fin du monde"
. Rien
de franchement rassurant donc. Mais la Miviludes veille.

• Le Kremlin ouvre une hotline

Le Kremlin, soucieux du bien-être de ses ouailles, a choisi
d'ouvrir une hotline pour rassurer les âmes slaves. La Russie prend en effet le
problème de la fin du monde très au sérieux : on a ainsi vu défiler dans les
médias un aréopage de prêtres, psychiatres, officiels et consorts venus rassurer
la population. Et même, donc, le ministre russe des Situations d'urgence appeler
les inquiets à se précipiter sur la hotline de son ministère. Ce serait risible
si ça n'était pas impérieusement inquiétant : on lit ainsi dans le Guardian,
rapporté par Slate.fr, que "Depuis plus d'un mois, les
Russes de tout le pays achètent des bougies et des allumettes, du sel et des
torches, dans un effort pour ruser avec l'Apocalypse"
. Même, sur
certains forums, certains déconseillent de faire des stocks trop conséquents, à
peine de se les voir sauvagement pillés le jour du cataclysme. Et donc, dans la
mêlée, d'y laisser des plumes. Les Suisses ont fait pareil : le Centre information
religion et secte de Zurich, a ainsi déjà reçu une centaine d'appel depuis décembre...
Au bout du fil, des questions comme "Vers quelles régions protégées
faut-il se réfugier ?"
, "Faut-il fuir la Suisse ?"

 

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