S'ils sont effectivement quelques uns à attendre, plus oumoins inquiets, à Bugarach dans l'expectative du louable renfort d'extraterrestresvenus les sauver de la fin du monde programmée, selon certaines interprétationsplus ou moins fantaisistes du calendrier maya, tous n'attendent pas le momentfatidique de la même manière. Les manifestations d'anxiété sont aussivariées que la manière dont on sale les plats d'un point du globe à l'autre. • En Chine, on rassure à la manière forteLe gouvernement chinois ne rigole pas avec la fin du monde. Méthodiquement,ce dernier a donc fait arrêter ces dix derniers jours quelque 600 de sescitoyens âgés de 15 à 58 ans dans neuf des provinces du pays pour prosélytisme.Tous auraient répandu à grand renfort de tracts alarmistes des rumeurs tendantà faire croire à leurs coreligionnaires épouvantés que la fin du monde adviendraitle 21 décembre 2012. Les trois quarts d'entre eux appartiendraient à la secte "Dieutout puissant" : créée en 1990, la secte, lointainement inspiréedes cultes chrétiens, a jugé bon de promettre le salut à ceux qui larejoindrait. On pouvait ainsi lire sur les tracts distribués massivement parses adeptes des "conseils avant la catastrophe ", comme écrire unelettre pour prouver sa fidélité au Dieu-Tout-Puissant pour s'épargner une issuefatale (et probablement lente et douloureuse). Ainsi, on pouvait lire sur l'uned'entre elles : "Je dois prêcher auprès d'une centaine depersonnes aujourd'hui, ou je serai maudit ".• L'exilturc à SirincePrèsdu site antique d'Ephèse, les hôtels du petit village de Sirince affichentcomplet depuis des dizaines de jours : bercé d'ondes positives, c'est unpeu le Theux ou le Bugarach français (voir plus bas). Saint-Jean, le rédacteur bieninspiré du livre de l'Apocalypse, y a trouvé sa dernière demeure, et, honneur suprême,la Vierge y serait montée au Paradis : il n'en fallait pas beaucoup pluspour que s'y presse une foule nombreuse d'illuminés persuadés que l'énergie dece bourg aux 600 âmes les transportera, le moment voulu, et probablement enpremière classe, vers une destination cosmique loin des tourments terriens.Aucun des habitants de Sirince ne croient vraiment à la fin du monde, mais ontbien saisi tout l'intérêt que suscitait les murs de ses bâtisses blanches :à l'entrée du village, le restaurant du coin célèbrera sous des auspicescanailles l'Apocalypse en servant du vin de la cuvée spéciale fin du monde.• Au pays des kangourous, la Première ministre prête son corpsà la peurEn Australie, c'est la Première ministre elle-même quiannonce l'heure venue du Jugement dernier. L'humour australien, si mal connu,mérite pourtant le coup d'œil : Julia Gillard a ainsi annoncé la fin dumonde à ses compatriotes dans une vidéo postée sur YouTube. "A meschers compatriotes australiens qui sont encore vivants, la fin du mondeapproche" , comme "l'a prédit le calendrier maya" , déclaraitainsi, avec la gravité qui sied aux circonstances tragiques, la Premièreministre australienne. Il s'agissait évidemment d'un canular, commandé par l'émissionThe End of the World Show de la radio Triple J. Entre deux drapeauxaustraliens, Julia Gillard n'a pas manqué d'assurer ses compatriotes deson soutien face aux "zombies" , aux "bêtes del'enfer" et, généreusement, au "triomphe de la pop coréenne" .• Les Belges se tournent vers TheuxChacun son clocher. Outre-Quiévrain, puisque Bugarach estquand même loin, les Belges ont opté pour la petite commune de Theux. Cettedernière présente en effet quasiment les mêmes caractéristiques géologiques :comme dans l'Aude, des terrains anciens ont recouvert en certains endroits lesplus récents, assurant à la ville une immunité cataclysmique semblable à cellede sa cousine française.• La France de l'Aude (ne) retient (pas) son souffle àBugarachFaut-il encore présenter Bugarach ? Les 200 paisibles âmesde ce petit village de l'Aude voient depuis quelques semaines leur tranquillitétroublée par une nouvelle forme de tourisme apocalyptique. Hyppies et Ufologuesen tous genres espèrent y sauver leur peau le Jour J, certains de trouver à l'aulnedu pic de Bugarach le secours d'extraterrestres qui trépignent depuis deslustres pour prendre cliques et claques vers leurs chez eux lointain. Aupassage, disent les convaincus, ils emporteraient les Terriens du coin. Enréalité, au grand soulagement des autorités qui se tiennent toutefois prêtes àintervenir en cas d'émeute ou d'afflux de hordes possédées par l'effroi d'unemort certaine, les foules ne s'y déplacent pas. Les journalistes, oui : 250d'entre eux, venus de plus de cinquante pays différents, ont été accrédités parla préfecture.• Paris veille sur l'HexagoneUn peu plus au Nord, à Paris, la Miviludes, qui lutte contreles sectes, n'a pas attendu décembre pour s'intéresser aux problèmes que pose lafin du monde. En 2010, elle remettait ainsi au Premier ministre son rapport, dontla première partie annonce sobrement "La résurgence de discoursapocalyptiques à l'approche de 2012 : du mythe de la fin du monde à la réalitéd'un risque accru de dérives sectaires" . Au terme de la 37eme page durapport, la mission interministérielle cite Élisabeth Campos (Sectes etmillénarisme ) : "Les groupes comme les individus peuvent expérimenterdans ces situations d'exception des moments d'angoisse et de psychosescollectives pouvant les conduire à des séquences de destruction et d'autodestruction.Des modes de fonctionnement et d'organisation particuliers semblent favoriserce risque de "déflagration collective" et on les retrouve souvent dans certainstypes de groupes sectaires et de croyances comme les doctrines apocalyptiques quiavivent la peur du lendemain et de l'imminence de la fin du monde" . Riende franchement rassurant donc. Mais la Miviludes veille.• Le Kremlin ouvre une hotlineLe Kremlin, soucieux du bien-être de ses ouailles, a choisid'ouvrir une hotline pour rassurer les âmes slaves. La Russie prend en effet leproblème de la fin du monde très au sérieux : on a ainsi vu défiler dans lesmédias un aréopage de prêtres, psychiatres, officiels et consorts venus rassurerla population. Et même, donc, le ministre russe des Situations d'urgence appelerles inquiets à se précipiter sur la hotline de son ministère. Ce serait risiblesi ça n'était pas impérieusement inquiétant : on lit ainsi dans le Guardian,rapporté par Slate.fr, que "Depuis plus d'un mois, lesRusses de tout le pays achètent des bougies et des allumettes, du sel et destorches, dans un effort pour ruser avec l'Apocalypse" . Même, surcertains forums, certains déconseillent de faire des stocks trop conséquents, àpeine de se les voir sauvagement pillés le jour du cataclysme. Et donc, dans lamêlée, d'y laisser des plumes. Les Suisses ont fait pareil : le Centre informationreligion et secte de Zurich, a ainsi déjà reçu une centaine d'appel depuis décembre...Au bout du fil, des questions comme "Vers quelles régions protégéesfaut-il se réfugier ?" , "Faut-il fuir la Suisse ?"