RSA et minima sociaux : les approximations de Laurent Wauquiez
Le cumul des minima ? Impossible
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Le ministre Laurent Wauquiez explique en substance dans son intervention remarquée d'hier qu'un couple en cumulant ses minima sociaux peut gagner plus qu'en travaillant.
Ces minima, selon la définition du gouvernement lui-même, sont "des prestations sociales versées sous conditions de ressources et visant à assurer un revenu minimum à une personne ou à sa famille". N'en font pas partie donc les allocations familiales ou logement.
Jusqu'en mai 2009, il existait en France métropolitaine neuf minima sociaux. Mais le RSA est venu se substituer au fameux RMI ou revenu minimum d’insertion, à l’allocation de parent isolé (l'API) et aux dispositifs d’aide à la reprise d’emploi.
Restent donc l'AAH ou allocation adulte handicapé, l'ASS ou allocation de solidarité spécifique, ou le minimum vieillesse. Mais ces minima ne sont absolument pas cumulables. Si vous êtes éligible à l'un d'eux, vous en pouvez être éligible à l'autre.
Le ministre a-t-il alors confondu minima sociaux et prestations sociales ? Veut-il parler des allocations familiales ou de l'APL ? Là encore, la démonstration ne tient pas, car le RSA ne peut non plus être réellement "cumulé" avec ces allocations. L'allocation logement par exemple est déduite de manière forfaitaire du RSA versé.
Exemple : un individu seul et sans ressource est censé pouvoir
toucher 466,99 euros de RSA. Mais s'il bénéficie par ailleurs d'une aide au logement, il ne se verra plus verser que 466,99 euros - 56,04 euros de forfait = 410,95 euros.
Les allocations familiales aussi entrent dans le calcul des ressources de la famille, donc sont prises en compte quand il s'agit de calculer les droits au RSA.
La seule ressource avec laquelle le RSA peut être vraiment cumulé est donc le salaire.
"En additionnant les aides, vous pouvez atteindre 1.200 euros"... Vraiment ?
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Selon Laurent Wauquiez, le système des minima serait tellement pervers, qu'en cumulant RSA, APL et autres aides sociales, vous pourriez en couple, sans travailler, atteindre 1.200 euros, soit davantage que le revenu d'un couple dont un des membres gagne le SMIC.
Pourtant, comme vu précédemment, ces aides ne sont pas toutes cumulables. Un couple peut-il toutefois toucher effectivement 1.200 euros d'aides sociales au total ?
_ Pour un couple sans enfant, le montant maximum du RSA seul est de 700,49 euros. Pas plus, et souvent moins, puisque l'octroi d'aides au logement font partiellement baisser le RSA. Nous sommes donc loin des 1.073 euros du SMIC net mensuel actuel. Et pas tout à fait non plus au niveau des 75% du SMIC, plafond que pourtant le ministre voudrait voir créer d'urgence.En revanche, il est vrai que vous pouvez demandez à bénéficier du RSA, dans le cas de ce même couple sans enfant, si vos revenus sont inférieurs à 1,4 SMIC net. Ce qui signifie que vous pouvez cumuler un salaire et un RSA jusqu'à hauteur de 1.500 euros. Mais dans ce cas, le RSA ne viendra que compléter vos revenus jusqu'à ce seuil. Et vous devrez par le seul fruit de votre travail avoir gagné au moins 800 euros.
Le RSA ou "la dérive de l'assistanat" ?
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Laurent Wauquiez a en effet conclu son laïus sur le RSA en le décrivant comme l'une des "dérives de l'assistanat".
C'est pourtant bien pour lutter contre cette idée d'"assistanat" que le RSA avait été créé en lieu et place du RMI.
_ Pour s'en convaincre, il suffit de lire, par exemple, cet argumentaire posté sur le web, par l'UMP de Montreuil. Il s'intitule "Comment mettre fin au RMI et à l'assistanat", et explique que "le gouvernement remplace le «ne pas travailler pour gagner plus» hérité des années socialistes, par le RSA et la culture de la valorisation du travail".En outre, une enquête annuelle réalisée par la Fnars auprès des travailleurs sociaux révèle que les allocataires du RSA perdent souvent à leur entrée dans le dispositif un grand nombre de droits et sont parfois peu ou pas suivis, alors que certains relèvent d'une obligation d'accompagnement.
Enfin, quand Laurent Wauquiez suggère d'imposer aux étrangers "une durée minimale de travail de cinq ans en France" pour pouvoir toucher des aides et minima sociaux - laissant entendre qu'il suffit d'immigrer pour bénéficier de toutes ces prestations -, il oublie de dire que ceci existe déjà, puisque tout étranger non-européen doit justifier de cinq ans d'un titre de séjour qui l'autorise à travailler pour bénéficier d'une protection sociale en France.
Cécile Quéguiner
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