Réforme des allocations familiales : qu'est-ce qui change en ce 1er juillet ?
Avec la réforme des allocations familiales entrant en vigueur à la date du 1er juillet, quelque 485.000 familles, soit 10% des bénéficiaires selon la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), vont voir le montant de leurs "allocs " diminuer en moyenne de 127 euros par mois. Jusqu'ici toutes les familles avec deux enfants ou plus recevaient la même somme.
Une perte de 127 euros par mois en moyenne
Concrètement, un couple avec deux enfants qui gagne plus de 6.000 euros net mensuel verra son allocation familiale de base divisée par deux. Au-delà de 8.000 euros net par mois, l’allocation est divisée par quatre. Selon les calculs de la CNAF, la perte s’élève à 127 euros par mois en moyenne. Au final, deux tiers des ménages perdants sont des couples avec deux enfants. Près d’un quart d’entre eux sont des couples avec trois enfants.
Les familles les plus nombreuses et les plus aisées sont donc plus fortement pénalisées. L'allocation de majoration qui concerne les ménages avec des enfants qui dépassent le seuil des 16 ans ainsi que l'allocation forfaitaire qui concerne les ménages avec au moins trois enfants et un enfant de plus de vingt ans ont toutes deux été modulées. La Caisse d'Allocation familiale a mis en ligne le 1er juillet un simulateur pour permettre aux ménages de déterminer le nouveau montant de leurs allocations familales.
Une mesure de "justice sociale"
S'il s'agit d'une atteinte à la politique familiale pour l'opposition, le gouvernement parle lui d'une mesure de "justice sociale ". Avec le versement des allocations en fonction des revenus, le gouvernement estime que le principe d’universalité de ces allocations n’est pas remis en cause puisque tous les ménages, même les plus riches, continueront de percevoir une aide, même si elle est modeste.
Pour le député socialiste Philippe Doucet, il s'agit "profondément d'une réforme de gauche ". Pour ce dernier, le système en place jusqu'alors était inadapté. "Le fait que "quelqu’un qui est au RSA avec trois enfants et quelqu’un qui a entre 6000 et 8000 euros de revenus touchent le même montant d’allocations familiales pour des enfants, moi depuis des années c’est un dispositif qui me choquait ", affirme t-il.
Le député socialiste se dit "ravi" de la mise en place de cette réforme "modéré(e)" qui "ne touche vraiment que ceux qui ont les plus hauts revenus ". En prenant l'exemple de familles aisées vivant à Versailles, il ajoute ironiquement "Je pense qu’ils devraient survivre, on ne les verra pas aux restaurants du cœur, je peux vous le garantir ." D'après Philippe Doucet, l'égalité entre tous les enfants, est une idée fausse. "La logique de dire qu’un enfant égal un autre enfant, comme je l'ai entendu dans l’hémicycle, c’est un mensonge. Un enfant à Neuilly, ce n’est pas équivalent à un enfant à Argenteuil, ce n’est pas vrai ", renchérit-il.
Troisième mesure de politique familiale imposée aux familles aisées depuis 2014
Les familles les plus nombreuses et les plus aisées sont ainsi les premières perdantes de ce nouveau dispositif. C'est le cas de la famille parisienne d'Isabelle et Alain, qu'à rencontrée Sarah Lemoine pour France Info. Cadres supérieurs, ils gagnent très bien leur vie avec un revenu de 10.000 euros net mensuel à eux deux. Jusqu’ici ils touchaient 550 euros d’allocations familiales par mois, désormais ils toucheront quatre fois moins, soit une perte de 5.000 euros par an.
Ce n'est "rien d’insurmontable " affirme le père. Mais, au vu des efforts déjà réclamés aux familles aisées, on sent poindre chez lui un certain agacement. "Il y a trois ans, en 2012, ils ont décidé de baisser le quotient familial donc il y a eu déjà un impact de 5000 euros, on pensait que c’était fini et puis cela a ressurgi du chapeau tout d’un coup (...) C’est un peu sournois ", confie t-il.
En 2014, l'abaissement du plafond du quotient familial de 2.000 euros à 1.500 euros avait déjà engendré une perte moyenne de 71 euros par mois pour 1.4 million de ménages, dont 85% appartiennent aux 20% des familles les plus riches. De plus, le 1er avril 2014 avait marqué la mise en vigueur d'une modulation et d'une baisse des prestations d'accueil du jeune enfant (Paje). Ses efforts ont d'ailleurs été confirmés par une étude de la CNAF, révélant le premier bilan des effets redistributifs des réformes de la politique familale.
Une réforme qui devrait rapporter 800 millions d'euros en année pleine
Au-delà de l’aspect financier, Isabelle, elle, pense que cette réforme est surtout un mauvais coup porté aux femmes. "Ce sont quand même elles qui subissent directement l’impact du fait d’avoir des enfants, avec des rémunérations qui globalement sont de -20% par rapport aux hommes ." Pour elle, les allocations familales étaient destinées à encourager les femmes à avoir "envie d’enfants ".
Mesure phare de la loi de financement de la sécurité sociale, la modulation des allocations familiales est censée rapporter 400 millions d’euros dès cette année puis 800 millions d’euros en année pleine.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.