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La SNCF a été "un rouage de la machine nazie d’extermination", reconnaît Guillaume Pépy

Dans un discours prononcé à Bobigny, sur un terrain d’où sont partis plus de 22.000 juifs vers les camps de la mort, le président de la SNCF a reconnu les responsabilités de son entreprise dans la Shoah, mais plaidé la "contrainte". Guillaume Pépy a présenté ses regrets aux survivants et aux enfants de déportés.
Article rédigé par Gilles Halais
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Parlant de "moments terribles, des moments funestes", Guillaume Pépy a souligné "la nécessité de regarder ce passé en face, le connaître, le comprendre, en perpétuer la mémoire, en tirer une leçon de vie".
_ Ce devoir de mémoire, l’actuel président de la SNCF l’a accompli à Bobigny (Seine-Saint-Denis), sur un terrain d’où sont partis 22.407 juifs vers la mort entre 1943 et 1944. En présence de Simone Veil, présidente d’honneur de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, ce terrain a été cédé à la ville de Bobigny et va devenir un lieu de mémoire.

La SNCF a transporté au total près de 76.000 juifs vers les camps d’extermination entre 1942 et 1944. La SNCF était "réquisitionnée (…) soumise à l’effort de guerre nazi", a rappelé Guillaume Pépy. "Contrainte, certes, notre entreprise a acheminé ces trains jusqu’à la frontière. Elle l’a fait" (...) devenant ainsi "un rouage de la machine nazie d’extermination", a-t-il reconnu.
_ "Je veux dire la profonde douleur et les regrets de la SNCF pour les conséquences des actes de l’époque. En son nom, je m’incline devant les victimes, les survivants et les enfants de déportés et devant la souffrance qui vit encore", a souligné Guillaume Pépy.

LA MEMOIRE DE LA SNCF 20h15*

"Une injure à notre passé"

Le discours du président de la SNCF fait suite à celui prononcé par le président Chirac en juillet 1995 lors de la commémoration de la Rafle du Vel’ d’Hiv’ : "ces heures noires souillent à jamais notre histoire, et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l’occupant a été seconde par des Français, par l’Etat français", avait notamment reconnu Jacques Chirac.

Les heures sombres de l’histoire de la SNCF ont déjà fait l’objet de plusieurs procès – jamais perdus par la compagnie. Après plusieurs années de procédure, le Conseil d'Etat a débouté en 2007 le député européen des Verts Alain Lipietz et sa famille, qui estimaient que la société nationale avait un rôle spécifique dans la déportation de parents.
_ Après la guerre, la SNCF a reçu la Croix de guerre et la Légion d’honneur pour le rôle des cheminots dans la résistance. L’entreprise rappelle que sur 450.000 employés de la SNCF à l’époque, moins de 500 ont été frappés d’indignité nationale pour collaboration. Et 4.000 ont payé de leur vie leurs faits de résistance.

Ces heures funestes des chemins de fer français ont pourtant été remises en lumière ces derniers mois par des élus américains. Ils ont exigé que les compagnies candidates à des contrats aux Etats-Unis et qui avaient transporté des déportés, présentent explications et excuses, et éventuellement indemnisent les descendants.
_ Or, la SNCF a des ambitions pour plusieurs projets de trains à grande vitesse aux Etats-Unis, notamment en Californie et en Floride (lire ci-dessous) .  L'historien Jean-Marc Dreyfus, invité de France Info, réagit à cette reconnaissance par la SNCF de son rôle pendant l'Occupation :

 

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