: Vidéo Prescription des crimes sur mineurs : "Il y a un problème de preuve", relève la première présidente de la Cour de cassation
Chantal Arens qui sort rarement du silence a notamment été interrogée sur l'affaire Olivier Duhamel et sur l'augmentation du budget de la justice.
Plusieurs affaires récentes, et notamment les accusations de pédophilie lancées contre le politologue Olivier Duhamel, ont relancé le débat sur la prescription des crimes commis sur des mineurs. Depuis 2018, la loi porte à 30 ans après la majorité des victimes le délai pour intenter une action en justice en matière de crimes sur des mineurs. Sur franceinfo le 12 janvier, la première présidente de la Cour de cassation, Chantal Arens affirme comprendre "parfaitement les victimes" qui demandent davantage de temps avant de prendre la parole pour dénoncer ces crimes. Mais il est "extrêmement difficile de prouver les faits".
franceinfo : 30 ans après la majorité, est-ce assez quand on sait l'omerta et les décennies parfois qu'il faut avant d'oser prendre la parole ?
Chantal Arens : Il va de nouveau y avoir un débat avec l'affaire Duhamel. D'un côté, je comprends parfaitement les victimes. D'un autre côté, le Parlement, en 2018, a fixé à 30 ans la prescription à partir de la majorité, parce qu'il y a un problème de preuve. Quand il y a un meurtre, quand il y a un attentat, il y a des preuves matérielles. Quand il y a des infractions sexuelles, il y a deux parties en présence. Et quand les souvenirs sont anciens, c'est extrêmement difficile de prouver les faits.
Depuis des années la justice se plaint d'un manque de moyen, cette année elle a vu son budget augmenter de 8%, c'est inédit, est-ce-que vous avez été entendue ?
Tout le monde se réjouit de cette augmentation, mais d'où part-on ? En France, on consacre 69 euros par an par habitant, en Allemagne, 131 euros. Même si les systèmes ne sont pas comparables. La moyenne européenne, c'est 84 euros et les 8 milliards supplémentaires vont compenser une petite partie de cet écart qui existe avec l'Allemagne. Ce qui est souhaité, c'est que cette augmentation s'inscrive dans le temps, et que ce budget concerne essentiellement la justice pénale de proximité. En France, la justice judiciaire c'est 60% de contentieux civil, 40% de contentieux pénal et la justice de proximité rentre dans une partie de la justice pénale. Je pense que ce qui intéresse aussi tous les citoyens, c'est non seulement que la petite délinquance soit poursuivie, mais c'est également que les juridictions puissent statuer dans un délai raisonnable sur des sujets comme le droit de visite, toutes les crises environnementales, les crises sanitaires.
"À mon avis, la justice civile est en difficulté actuellement."
Chantal Arens, première présidente de la Cour de cassationà franceinfo
Éric Dupond-Moretti, est visé par une enquête préliminaire pour prise illégale d'intérêts, c'est l'affaire des fadettes, est-ce gênant pour un ministre de la Justice ?
Il y a une commission d'instruction qui est composée de hauts magistrats de la Cour de cassation qui va filtrer, comme le ferait un juge d'instruction, c'est-à-dire instruire à charge et à décharge, renverra ou ne renverra pas devant la Cour de justice de la République, qui est en grande partie composée de parlementaires. Je suis un peu gênée pour répondre car la juridiction d'appel des décisions de la commission d'instruction, c'est la Cour de cassation et l'assemblée plénière que je préside. Je ne peux donc pas m'exprimer.
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