: Vidéo "13h15". L'"enquête inversée" qui confond Francis Heaulme dans le double crime de Montigny-lès-Metz en 1986
En 1992, le gendarme Jean-François Abgrall recueille en prison des confidences en de Francis Heaulme. Des faits décrits par le tueur en série ne correspondent à rien de connu par lui… Jusqu’à ce que l’avocate de Patrick Dils, dont elle est persuadé de l’innocence dans l’affaire du double crime d’enfants de Montigny-lès-Metz, en Moselle, lui adresse une lettre, quatre ans plus tard… Extrait du magazine "13h15".
Jean-François Abgrall, alors gendarme, a arrêté le parcours criminel du tueur en série Francis Heaume en 1992. Et pendant dix ans, il a décrypté les indices laissés par celui qui sera finalement condamné en mai 2017 à la réclusion criminelle à perpétuité pour le double crime, en 1986, de Montigny-les-Metz (Moselle). Grâce au temps qu’il a passé à l’interroger, l’ancien gendarme est l’un de ceux qui connaît le mieux celui qui n’a jamais avoué avoir tué les petits Cyril et Alexandre, âgés de 8 ans. Patrick Dils a fait quinze ans de prison pour cette affaire, en dépit de la rétractation de ses aveux, avant d'être acquité en 2002.
Jean-François Abgrall est en quelque sorte un "traducteur" de Francis Heaulme : "Il est clair que je comprends comment il fonctionne. J’ai eu le temps de l’étudier au fil des mois. Il a des capacités classées normales, contrairement à ce que l’on peut penser. Il peut vous dire des choses normalement, mais a quand même une structure perverse. Il n’a pas envie de se faire attraper tout en étant content de vous donner des informations. Il a un petit côté : 'Je vous dis, mais ce n’est pas moi', sans pouvoir s’empêcher de le dire. On va considérer que c’est son point faible."
"On a eu besoin de son discours" pour "faire des rapprochements"
"C’est ce que j’ai appelé une 'enquête inversée', car on a eu besoin de son discours pour le confondre, explique l’enquêteur. Si Francis Heaulme n’avait rien dit, il aurait été impossible de faire des rapprochements. Après son arrestation, je vais en maison d’arrêt à Brest. Il ne cache pas qu’il a commis d’autres crimes, énumérant des faits que je ne sais pas traduire, car il ne dit pas avoir tué à un endroit. Un jour, Heaulme me dit qu’il passe à vélo, me décrivant les choses de manière très lente, comme s’il distribuait ses mots. On voit que c’est important pour lui. Il précise qu’il y a une rue avec des pavillons sur la gauche et un talus à droite, une voie de chemin de fer en haut avec des wagons et un pont au bout…"
Francis Heaulme se fait de plus en plus précis dans la description que recueille alors le gendarme : "Il y a une poubelle, un stop… Je passe à vélo et je reçois des pierres lancées par des enfants qui sont en haut. Je tourne à gauche, je reviens avec l’intention de les corriger. Finalement, je monte sur la talus et là, je vois les enfants morts… Il y a des policiers et des pompiers…" En 1992, Jean-François Abgrall constate que ces faits ne correspondent à rien de connu par lui. Quatre ans plus tard, il reçoit une lettre de l’avocate de Patrick Dils, persuadée que son client est innocent. Il n’avait jamais entendu parler de cette affaire. Le résumé du double crime de Montigny-les-Metz qu’elle lui fait colle parfaitement avec ce que Francis Heaulme a raconté en prison au gendarme venu l’interroger. Le lien est enfin établi : "On a recherché ça pendant quatre ans", se souvient-il.
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