Un schizophrène jugé pour avoir poussé un homme contre un RER
Gare de Lyon, le 2 avril 2010. Six heures du matin : le
soleil, dehors s'est déjà levé, et, tranquillement, comme chaque matin, les Parisiens matinaux s'engagent sur le quai de la ligne A du RER pour rejoindre
leur travail ou leur lit.
Subramaniam Rasalingam attend, avec les autres, la rame qui
approche. Le Sri-Lankais ne s'est aperçu de rien, mais, derrière lui, Ahmed
Konkobo s'apprête à lui donner un coup de pied dans le dos : quelques
secondes plus tard, son corps tombe lourdement sur les rails, le RER le percute
en pleine tête. L'homme de 52 ans, grièvement blessé, décède un quart d'heure
plus tard.
Un mauvais regard
Du haut de ses 28 ans malmenés par la schizophrénie, Ahmed
Konkobo expliquera aux enquêteurs que la victime lui avait lancé un "mauvais
regard ". En admettant, plus tard, que la présence de personnes d'origine
indienne ou pakistanaise l'obsédait. A ce moment là, il a fui. Le recoupement
des témoignages recueillis par la police sur place et des enregistrements des
caméras de surveillance permettent son interpellation : il est arrêté dans
la soirée à proximité de chez lui, à Fontenay-sous-Bois, dans le Val-de-Marne.
Mardi, à maintenant 31 ans, Ahmed tentera, du mieux qu'il
pourra, de convaincre les magistrats de la cour d'assises de Paris. Son avocat assure qu"il n'avait
absolument pas l'intention de tuer " et demandera donc la requalification
en "coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans
intention de la donner ". Un chef passible de 20 ans, assorti d'un
suivi socio-judiciaire : Ahmed, en l'état, risque 30 ans de réclusion
criminelle. En somme, une perpétuité que l'on ne nomme pas.
Délires schizophrènes
Aux enquêteurs, la mère avait expliqué que son fils était
suivi depuis 2005 pour des problèmes psychiatriques depuis 2005. Le psychiatre
qui le suit confirme que la schizophrénie de son patient induisait des épisodes
de délire. Mais avant le drame, Ahmed ne prend déjà plus son traitement.
A cet instant, quand il pousse Subramaniam Rasalingam contre
la rame qui s'avance, Ahmed comprend-t-il qu'il va lui donner la mort ?
Ahmed est-il un malade qu'on aurait mal soigné ou, à tout le moins, mal
encadré, ou un assassin ? Pendant l'instruction,
les expertises psychiatrique concluront à une "altération " de
son discernement.
Ahmed sera jugé comme n'importe quel citoyen
Ahmed, qui se savait malade en dehors de ses épisodes délirants mais a sciemment arrêté son traitement, sera donc jugé comme n'importe quel citoyen : en
droit pénal français, seule l'abolition du discernement entraine l'irresponsabilité
pénale, et donc l'impossibilité d'être jugé.
Les juges... jugeront : en février, un SDF qui avait
poussé un voyageur sous une rame de métro en avril 2009 avait été acquitté par
la cour d'assises des Hauts-de-Seine, jugé irresponsable pénalement.
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