Stéphanie Gibaud : "Je passe mon temps, depuis sept ans, à me battre contre UBS"
Stéphanie Gibaud est embauchée, en 1999, par UBS France comme directrice de la communication. Elle est chargée en particulier d’organiser les événements de la banque en France, notamment à l'attention de clients et de ceux qui pourraient le devenir. Son employeur n'ouvre ses portes qu'aux personnes pesant plusieurs millions d'euros.
Le début d'un long calvaire
En juin 2008, après la perquisition du bureau du directeur général d’UBS, sa supérieure hiérarchique exige qu'elle efface de son disque dur tous les fichiers contenant le nom des clients et de leurs chargés d'affaires. Mais Stéphanie Gibaud refuse. Ces fichiers révèlent que les chargés d’affaires suisses démarchent des clients français en France avec pour objectif de faire ouvrir des comptes en Suisse, pour la grande majorité d’entre eux non-déclarés.
C’est à partir de là que tout va basculer. Elle va découvrir le caractère illégal de l’activité d’UBS en France, et va révéler le scandale de l’évasion et de la fraude fiscale. Elle porte plainte contre UBS en 2009 avant d’être contactée par la brigade financière début 2011. Stéphanie Gibaud va faire l'objet de harcèlement de la part de la banque, puis elle sera mise à l’écart avant d'être licenciée. Le conseil des prud’hommes doit rendre son jugement ce mercredi sur son licenciement. "J’attends d’être réhabilitée dans mes droits. Je passe mon temps, depuis sept ans, à me battre contre cette entreprise qui dit que j’ai inventé une histoire. UBS continue à dire que j’ai inventé cette histoire et que je devrais être punie pour l’avoir inventée, " explique Stéphanie Gibaud.
Sa vie après UBS
"Je ne travaille plus depuis février 2012 parce que je suis sortie de la banque je ne tenais plus debout et j’ai mis beaucoup de temps à m’en remettre. Je ne suis pas encore complètement remise du traumatisme que j’ai vécu. Il y a une atteinte à ma dignité. Etre honnête c’est une des valeurs que j’ai et que je défends. "
Le secteur privé lui a gentiment fait comprendre qu’il ne l’embaucherait pas. Mais il n’est pas le seul. "Vous êtes blacklisté parce que quand on googlise votre prénom il y a toutes les interviews et on se demande ce que vous avez pu faire. Vous voyez l’opacité dans les entreprises et on peut se poser des questions sur le fonctionnement de la société. "
La protection des lanceurs d’alerte
"Je peux remercier quelques collègues d’UBS que je peux compter sur les doigts d’une main, mais à part ça vous êtes seul. Tout s’effondre, tout s’écroule. Je ne savais pas vers qui me tourner et vous vous battez avec vos petits moyens, " raconte Stéphanie Gibaud. "Le jugement d’aujourd’hui est important pour moi et pour mes enfants et pour tous les lanceurs d’alerte qui sont dans une situation aussi terrible que la mienne. Je n’ai pas fait ça pour être médiatisée mais parce que je pensais que c’était juste. "
Stéphanie Gibaud regrette le manque de protection des lanceurs d’alerte. "On n’est pas protégés. C’est complètement effarant comment il y a le doute à chaque fois sur note honnêteté. C’est incompréhensible. " Si elle n’avait rien dit aujourd’hui elle travaillerait chez la concurrence. "Qu’est-ce que ça vaut ce que j’ai fait ? Quel est le montant que l’on peut mettre là-dessus ? Sur une carrière professionnelle, sur l’aspect psychologique ? " s’interroge Stéphanie Gibaud.
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