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Serge Atlaoui : nouvelle audience mercredi dans un contexte différent

Alors que huit condamnés à mort ont été exécutés le 28 avril dernier, le recours du Français Serge Atlaoui sera examiné ce mercredi alors que les autorités ont changé de ton. Et que la France a choisi de garder le silence pour ne pas indisposer Jakarta.
Article rédigé par Marie Dhumieres
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
  (Nouvelle audience demain de Serge Atlaoui devant la Cour administrative de Jakarta © REUTERS | Beawiharta Beawiharta)

Serge Atlaoui a contesté devant la Cour administrative le rejet de sa demande de grâce présidentielle. Par principe, le président indonésien rejette systématiquement toute demande de grâce présidentielle provenant d’un condamné pour trafic de drogue et ne regarde même pas les dossiers. Une attitude qui n’est pas normale et pas légale, déclarent les avocats de Serge Atlaoui, qui estiment que les demandes de grâce devraient être étudiées au cas par cas. C’est ce qu’ils plaident devant la Cour administrative. Ce recours a déjà été tenté par deux condamnés australiens, mais cela n’a pas marché. La Cour estimant que la question ne relevait pas de sa juridiction. Les Australiens ont été exécutés il y a deux semaines.

 

Un changement de ton des autorités

 

Il semblerait que l’audience de demain ne soit pas décisive, et a priori ce ne sera pas la dernière. On ne connait même pas la date à laquelle la Cour doit donner sa réponse. 

 

Tout n’est donc pas perdu, car après le retrait du nom de Serge Atlaoui de la liste des dernières exécutions, le procureur général indonésien s’était empressé de dire que le Français serait exécuté seul dès que son recours à la Cour administrative serait rejeté. Il y avait donc une volonté de la part du parquet indonésien que les choses aillent très vite dans le cas de Serge Atlaoui. Mais apparemment les choses ont changé.

 

Le ton a clairement changé à Jakarta, le procureur général reste maintenant très évasif quand on lui pose des questions sur le cas de Serge Atlaoui. Dernièrement, il a dit que s'il devait être exécuté il le serait peut-être lors d’une prochaine vague d’exécution cette année, qui ne devrait de toute façon pas avoir lieu tout de suite.

 

De graves dysfonctionnements ?

 

Il est difficile d’imaginer que les pressions diplomatiques ont fonctionné car l’Indonésie répète depuis des mois que cela n’aura aucun effet. L’Australie a vraiment tout tenté pour sauver ses ressortissants et l’Australie a des relations avec l’Indonésie plus importantes que la France, pourtant cela n’a rien donné. Donc, on voit mal pourquoi les menaces de la France auraient pu faire peur à l’Indonésie. Par contre, les accusations de dysfonctionnements de la justice indonésienne proférées par Laurent Fabius ont peut-être fait mouche.

 

 

Serge Atlaoui a été arrêté en même temps qu’une dizaine d’autres personnes lors du raid de l’usine de fabrication d’ecstasy. C’est le premier et le seul de ce groupe à se retrouver dans le couloir de la mort, alors que la justice indonésienne veut que les condamnés dans une même affaire soient exécutés en même temps.

 

Les cerveaux de l’opération ont aussi été condamnés à mort mais leurs recours devant la justice traînent depuis presque deux ans. De son côté, le recours de Serge Atlaoui devant la Cour suprême a été examiné et rejeté en quelques semaines. Les cerveaux de l’opération ont eu droit à des experts et à des témoins lors de leur procès, alors que cela a été refusé à Serge Atlaoui.

 

La stratégie de la France

 

Il semblerait que la France ait décidé de mener la politique du silence. Il n’y a pas eu de grande déclaration du côté français ces derniers temps et la famille de Serge Atlaoui préfère aussi ne pas s’exprimer en ce moment. C’est sûrement une bonne idée, car l’Indonésie n’a pas du tout apprécié l’attitude de l’Australie au sujet des exécutions : deux semaines après on trouve encore de nombreux articles dans la presse indonésienne sur l’arrogance occidentale de l’Australie qui n’aurait pas compris la culture indonésienne. Dans le cas de Serge Atlaoui, il semble donc plus prudent, pour le moment en tout cas, de garder le silence et de laisser la justice suivre son cours.

 

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