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L'affaire Guérini pour les nuls

Mis en examen, l'élu socialiste des Bouches-du-Rhône refuse de démissionner de ses fonctions, comme le lui demande la direction du PS.

Article rédigé par Bastien Hugues
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le socialiste Jean-Noël Guérini dans les couloirs du Sénat, le 1er octobre 2011. (CHRISTOPHE MORIN / IP3 / MAXPPP)

L'affaire Jean-Noël Guérini continue d'empoisonner la vie du Parti socialiste. Mis en examen pour prise illégale d'intérêt, trafic d'influence et association de malfaiteurs le 8 septembre 2011 dans une affaire de marchés publics présumés frauduleux, le sénateur et président socialiste du conseil général des Bouches-du-Rhône s'accroche à ses fonctions. Il refuse de démissionner, alors que la direction du PS le lui a une nouvelle fois demandé, mercredi 2 novembre.

Une nouvelle étape dans une affaire débutée il y a deux ans et demi.

• L’affaire Guérini, c’est quoi ?

Il s’agit d’une vaste enquête sur une fraude présumée aux marchés publics dans les Bouches-du-Rhône. La justice cherche notamment à savoir si Jean-Noël Guérini, sénateur et président socialiste du conseil général des Bouches-du-Rhône, a favorisé son frère - Alexandre Guérini, chef d’entreprise - dans l’attribution de marchés publics pour le ramassage et le traitement de déchets dans le département. Elle porte donc sur des soupçons de trafic d’influence, prises illégales d’intérêts et détournements de fonds publics.

• Comment cette affaire a-t-elle éclaté ?

C’est par une lettre anonyme, envoyée au parquet de Marseille le 2 février 2009, qu’a été dénoncé un "système" ayant pour objet de "détourner des sommes considérables", à l’aide d’un "puissant réseau d’influence" avec, à sa tête, "Alex" Guérini. 
 
Depuis, les enquêteurs ont procédé à des dizaines d’auditions et de perquisitions, lesquelles ont abouti à la mise en examen, en décembre 2010, d’Alexandre Guérini pour abus de biens sociaux, détournement de fonds et de biens publics, recel, blanchiment, trafic d’influence, corruption active et détention de munitions, et en septembre 2011 de Jean-Noël Guérini pour prise illégale d'intérêt, trafic d'influence et association de malfaiteurs.

• Que reproche-t-on précisément à Jean-Noël Guérini ?

"Lui c’est lui, et moi c’est moi." Depuis le début de cette affaire, Jean-Noël Guérini s’est toujours démarqué de son frère. Mais en février 2011, Le Parisien révèle que des écoutes téléphoniques menées par la section de recherches de Marseille le mettent en cause.

Selon ces écoutes, "Jean-No" serait intervenu directement auprès d’élus locaux de Salon-de-Provence pour faciliter les affaires de son frère. Elles révèlent aussi que Jean-Noël Guérini est très vite mis au courant de l’ouverture d’une information judiciaire. "Il se dit qu'une enquête préliminaire sera ouverte. À mon avis, ça doit être pour tes décharges (...) mais, de toute façon, au bout de trois ans, il y a prescription, ils ne peuvent rien faire", indique-t-il par téléphone à son frère. "Il ne faut rien laisser traîner, d’accord ?", prévient aussitôt Alexandre Guérini à l’un de ses amis, Philippe Rapezzi.

Autre reproche : l’achat par le conseil général d’un terrain à La Ciotat en le préemptant, pour qu’Alexandre Guérini puisse l’exploiter comme décharge...

• Que risque Jean-Noël Guérini ?

Juridiquement, si sa participation à une association de malfaiteurs est reconnue, Jean-Noël Guérini encourt cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.  
 
Politiquement, Jean-Noël Guérini risque d'abord son siège de président du conseil général des Bouches-du-Rhône, et son appartenance au groupe socialiste au Sénat. Mais pour l'instant, l'intéressé martèle que tant qu'il n'est pas condamné, il est présumé innocent. 
 
•  Pourquoi dit-on que cette affaire est embarrassante pour le PS ?

En décembre 2010, Arnaud Montebourg - alors secrétaire national à la Rénovation du PS - dénonce des "pratiques plus que contestables" dans la fédération PS des Bouches-du-Rhône, et décrit un "système de domination sans limite" pouvant déboucher sur de "dérives” dans l'utilisation de l'argent public. En conclusion, Montebourg demande la destitution de Guérini. 

Une demande à laquelle Martine Aubry refuse d’accéder : "Il n'y a rien dans ce rapport, pas un élément concret, précis, pas un fait. (...) Il faut laisser faire la justice", assure-t-elle. Un "retour d’ascenseur" pour certains, puisque Jean-Noël Guérini est soupçonné d'avoir fait secrètement basculer l’élection du premier secrétaire du PS en faveur de Martine Aubry, face à Ségolène Royal en 2008.

Il faudra finalement attendre début septembre pour qu'Harlem Désir, alors premier secrétaire du PS par intérim, demande pour la première fois à Jean-Noël Guérini de démissionner de ses fonctions.
 

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