Affaire Kerviel : Daniel Bouton a-t-il prévenu d’autres banquiers avant les marchés ?
Selon Mediapart et les "Inrocks", l'ancien PDG de la Société générale a informé plusieurs banquiers concurrents de la perte à venir de 4,9 milliards d'euros. Les avocats de la banque vont porter plainte pour diffamation.
L'affaire Jérôme Kerviel n'en finit pas de rebondir. Mediapart (article payant) et Les Inrocks (article payant) donnent la parole, mardi 1er mars, à une journaliste financière, Marie-Jeanne Pasquette, qui a enquêté sur l'affaire pour le site Minoritaires.com. Elle affirme que l'ancien PDG de la banque avait informé plusieurs banquiers concurrents du "débouclage" imminent des positions prises par Jérôme Kerviel.
Il s'agissait de vendre des positions cachées d'une valeur 50 milliards d'euros, occasionnant une perte de 4,9 milliards d'euros, bien avant l'annonce officielle du scandale, pour leur demander leur aide. Marie-Jeanne Pasquette en cite plus précisément deux : Philippe Dupont, à l'époque président des Banques populaires, et Georges Pauget, directeur du Crédit agricole. Le premier, interrogé par Mediapart, a toutefois démenti.
La banque dénonce des affirmations "intolérables"
Selon des propos rapportés par cette journaliste, Daniel Bouton les aurait appelés dès le dimanche 20 janvier 2008, soit quatre jours avant la conférence de presse du 24 janvier qui allait officialiser l'affaire Kerviel. Ebruiter ainsi une opération boursière aussi sensible, qui consiste à solder pour plusieurs milliards d'euros de pertes, avant que les marchés ne soient officiellement informés,"revient à dire qu’il y a pu y avoir un risque de délit d’initiés, de manipulation de marché", selon Mediapart.
Ces informations ont amené le groupe bancaire à annoncer une plainte en diffamation contre les directeurs des deux publications et les journalistes impliqués. Jean Veil, l'un des avocats de la Société générale, estime que les informations relayées par les deux publications ont pour effet d'accuser l'ancien patron du géant bancaire Daniel Bouton de délit d'initiés, ce qui est selon lui "intolérable".
Objectif : alourdir les pertes attribuées à Kerviel ?
L'avocat de la Société générale soutient que si l'ancien PDG a informé d'autres banquiers, il ne l'a fait que dans les règles, dans la soirée précédant la conférence de presse, ou juste avant, hors ouverture des marchés. Le géant bancaire s'insurge également contre une autre révélation évoquée notamment par Les Inrockuptibles : un éventuel "bluff" de la banque afin d'alourdir les pertes attribuées à Jérôme Kerviel (officiellement 4,9 milliards d'euros). Ce qui aurait permis de masquer d'autres défaillances, sans lien avec l'ex-trader. Cette version avait été défendue lors du procès en appel de Kerviel par Philippe Houbé, alors employé d'une filiale de la Société générale.
Dans un communiqué, la banque évoque des "pseudo-révélations" qui n'ont "pas été retenues par les tribunaux". Un "travail de recyclage", selon le groupe bancaire. Recyclage ou pas, une ramification de plus pourrait s'ajouter à ce dossier tentaculaire qui, huit ans après, n'en finit plus d'occuper les tribunaux français. Jérôme Kerviel, qui reproche à la banque d'avoir couvert ses phénoménales prises de risque en toute connaissance de cause avant de le lâcher, tente en particulier de faire réviser sa condamnation pénale.
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