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Attentat en Isère : le principal suspect toujours en garde à vue samedi

Yassin Salhi a passé la nuit en garde à vue à Lyon et peu d'éléments filtrent samedi matin sur ses premières déclarations aux enquêteurs de la DGSI et de la sous-direction antiterroriste. Les premiers éléments d'enquête que l'on connaît avec certitude sont ceux qui ont été livrés par le procureur de la République de Paris, en charge de la section antiterroriste.
Article rédigé par franceinfo
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  (Un attentat Islamiste commis vendredi matin dans une usine de gaz industriels Air Products à Saint-Quentin-Fallavier en Isère a fait un mort et deux blessés. Une tête décapitée a été retrouvée accrochée à un grillage © Maxppp)
Attentat en Isère : le point sur l'enquête samedi matin avec Sophie Parmentier du service police/justice de France info

Le procureur de la République de Paris, en charge de la section antiterroriste, François Molins, a donné dans la soirée de vendredi le détail plus précis de l'attaque terroriste de Saint-Quentin-Fallavier qui a fait un mort et deux blessés.

Il était 9h28 précises vendredi matin lorsque Yassin Salhi, père de famille de 35 ans, se présente devant l'usine Air Products de Saint-Quentin-Fallavier, en Isère. Lorsqu'il arrive, il est au volant d'une camionnette, celle de l'entreprise dans laquelle il travaille depuis le mois de mars, une entreprise de transport routier de Chassieu, dans laquelle il est chauffeur-livreur. La camionnette est siglée, elle est connue, et lorsque Yassin Salhi sonne à la porte de l'usine classée Seveso, on lui ouvre donc sans problème. La scène a été filmée par deux caméras de vidéosurveillance, a précisé le procureur François Molins.

La camionnette longe ensuite un mur, elle sort du champ des caméras jusqu'à 9h35. Une minute plus tard, une forte explosion retentit, la camionnette vient de foncer sur un hangar rempli de bouteilles de gaz et de produits chimiques. Une partie du hangar est soufflée. Les pompiers arrivent cinq minutes plus tard à peine et à 10h, ils repèrent Yassine Salhi qui est en train d'ouvrir des bouteilles d'acétone. Il est maîtrisé à temps.

Mise en scène effroyable

C'est peu après que l'on retrouve sur le véhicule de Yassin Salhi le corps de sa victime. Il s'agit en fait de son patron, un homme âgé de 54 ans, chef d'entreprise. Son corps a été retrouvé sans tête, avec un couteau à proximité. Le procureur de la République a précisé que l'enquête ne permettait pas de savoir à ce stade à quel moment avait eu lieu cette décapitation barbare.

On sait que la tête de la victime a été accrochée à un grillage, dans un endroit que les caméras ne pouvaient pas voir, il y a eu une mise en scène effroyable de la part du terroriste présumé qui a sciemment placé autour de cette tête deux drapeaux sur lesquels il y avait la chahada, la profession de foi de l'islam, qui dit qu’"Il n'y a de Dieu qu'Allah et Mohamed est son prophète".

 

Ces drapeaux sont devenus une sorte d'emblème pour des groupes djihadistes comme Daech qui sèment notamment la terreur en Syrie ou en Irak. Des drapeaux qu'ils ont largement médiatisés et qu'on avait par exemple de retrouver dans la voiture des frères Kouachi lors des attentats de janvier. C'est une sorte de signature.

Yassin Salhi a-t-il agit seul ?  

Evidemment, dans toutes les affaires de terrorisme, la question des complicités est cruciale. Selon nos dernières informations, il y a toujours ce matin trois personnes en garde à vue, Yassin Salhi lui-même, mais aussi son épouse et sa sœur. La mère a aussi été entendue librement. Un homme qui avait été interpellé pour avoir été aperçu à proximité de l'usine attaquée a finalement été libéré dans la soirée, il n'avait aucun lien avec cet attentat.

Le procureur de la République de Paris a dit dès vendredi soir qu'a priori il n'y avait pas eu de complice apparent à l'intérieur même de l'usine attaquée, en tout cas, aucun élément ne permet de l'affirmer. Yassin Salhi serait entré seul dans l'usine avec sa malheureuse victime, mais bien-sûr, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'autres complices dans son entourage, ou des donneurs d'ordre, comme dans l'affaire récente de Sid Ahmed Ghlam par exemple, cet étudiant algérien qui voulait s'attaquer à au moins une église et qui aurait été téléguidé depuis la Syrie ou l'Irak.

Connu des services du renseignement

Yassin Salhi a-t-il des liens avec l'étranger, a-t-il des liens avec des acteurs terroristes dans la mouvance salafiste qu'il fréquentait ? C'est ce que l'enquête va chercher à déterminer. Ce qui est sûr c'est qu'il n'avait pas de casier judiciaire, il n'était pas connu pour des actes de délinquance. Ce qui est sûr aussi c'est que pendant deux ans, entre 2006 et 2008, Yassin Salih a été suivi par des policiers du renseignement pour islamisme radical, les policiers craignaient qu'il ne s'en prenne à la sûreté de l'Etat, il faisait l'objet d'une fiche "S".

En 2008, la fiche n'a pas été renouvelée mais Yassin Salhi est ponctuellement resté dans les radars. Entre 2011 et 2014, il était proche de la mouvance salafiste lyonnaise. En 2014 d'ailleurs, une de ses voisines avait signalé aux gendarmes des conversations suspectes sur le djihad. Elle avait signalé aussi des absences régulières de son voisin. Yassin Sahli s'est-t-il entraîné à ce moment là ? On n'a pas la réponse à cette question pour le moment.  

Quelles étaient les motivations de Yassin Salhi ?

Il reste encore cinq jours de garde à vue possibles, qui permettront sans doute aux enquêteurs d'en apprendre davantage sur les motivations de Yassin Salhi, qui a peut-être agi seul, tout en se sentant appartenir à un groupe et au nom d'une cause. C'est en tout cas ce que semble indiquer son mode opératoire et la signature des drapeaux djihadistes.

 

Dans toutes les affaires de terrorisme islamiste, la théorie du loup solitaire qui agit totalement déconnecté d'un groupe n'existe quasiment pas, rappellent les plus éminents spécialistes comme le juge antiterroriste MarcTrévidic.

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Un nouveau conseil restreint de Défense se tiendra à partir de 11h samedi à l'Elysée autour de François Hollande, avec le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, la ministre de la Justice, Christiane Taubira, et le Premier ministre Manuel Valls.

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