Jean-Paul II, le pape globe-trotter
Un pontificat de 27 ans pour Jean-Paul II et une canonisation moins de neuf ans après son décès. Cette accélération
voulue par son successeur Benoît XVI est aussi liée à la demande tout aussi pressante qu'impressionnante
de la foule, lors de ses obsèques en 2005. Sur la place Saint-Pierre, elle
scande : "Santo subito" (saint maintenant). Si ses fidèles continuent à ciseler l'image d'un pape humaniste et charismatique, des critiques ombragent le portrait. Elles portent sur les cas de pédophilie dans l'Eglise
et son intransigeance dans un monde qui bouge.
Un pape populaire qui a vécu et souffert
Avec le pape Jean-Paul II, l'Eglise a souvent fait la une
des médias. En avril 2005, l'hebdomadaire Témoignage Chrétien titre ainsi sa page
internationale : "Au cours des deux dernières décennies, la vedette
incontestée de la scène planétaire a été...le pape."
L'intérêt se manifeste dès son élection le 16 octobre 1978.
Le monde feuillette la première partie de la vie de Karol Wojtyla, né le 18 mai
1920 à Wadowice, dans le sud de la Pologne. Le premier pape slave a 58 ans, il est archevêque de Cracovie.
Les fidèles s'émeuvent d'un parcours marqué
par les accidents de la vie et les souffrances de la guerre. Orphelin de mère à neuf
ans, élevé par un père officier, le jeune Karol échappe à la déportation en Allemagne en travaillant dans une usine. La biographie du Vatican rappelle que l'université
de Cracovie à laquelle il est inscrit est
fermée depuis 1939 par l'occupant nazi.
Entré pendant la guerre au séminaire,
il est ordonné prêtre en 1946 en Pologne communiste et sa vocation le conduit
notamment à Rome. A son retour, il reprend des études déjà très avancées
en théologie et se rapproche des plus jeunes par le biais de l'aumônerie des
étudiants. C'est là, l'engagement du futur créateur des Journées mondiales de la
jeunesse (JMJ), "une idée extraordinaire" selon le porte-parole de l'épiscopat français, Bernard Podvin.
Un message donne de l'assurance aux fidèles
La proximité avec les fidèles, le pape Jean-Paul II l'applique
au pied de la lettre, en quittant parfois incognito le Vatican. Au grand
jour cette fois, et parfois loin du protocole, il visitera 129 pays pendant les 27 ans de
son pontificat. Avec le pape, l'Eglise fait certes la une des médias et les catholiques semblent prendre de l'assurance. Ils s'appuient sur l'appel lancé par le pape dès la messe inaugurale de son
pontificat :
"N'ayez pas peur ! Ouvrez, ouvrez toutes grandes
les portes au Christ. À sa puissance salvatrice, ouvrez les frontières des Etats, des systèmes
politiques et économiques, les immenses domaines de la culture, de la
civilisation et du développement....."
En 2003, le quotidien La Croix rend compte du voyage
de Jean-Paul II en Croatie, en rappelant qu'il s'agit du 100e et
la comptabilité est précise : "En comptant ses déplacements en Italie,
Jean-Paul II aura passé plus de 10% de son temps, en dehors de Rome."
La popularité de Jean-Paul II passe les années en se renforçant : en 2011, l'hebdomadaire Le Pèlerin publie un sondage qui le place "pape
préféré des Français." . Indéniablement, les JMJ ont laissé des souvenirs : Jean-Paul II est avant tout "le pape des
rencontres avec les jeunes. "
L'attentat du 13 mai 1981
Le pontificat de Jean-Paul II aura aussi été marqué par l'attentat du
13 mai 1981 à Rome, les images font le tour d'un monde catholique en prière. Un extrémiste turc Mehmet Ali Agca tente d'assassiner le pape. Il le blesse
grièvement de trois balles, sur la place Saint-Pierre.
Jean-Paul
II attribuera sa survie à l'intercession de la Vierge Marie, modèle de mère et
d'épouse, à laquelle très jeune, il avait dédié toute sa vie. Répondant à "l'élan
d'humanisme qui le caractérise" disent ses fervents défenseurs, le pape est allé visiter son agresseur en prison en 1983.
Après cet attentat, la protection du pape est renforcée. Lui
qui aime tendre la main aux fidèles, se voit imposer une voiture blindée, la
papamobile.
Les ombres venues d'un monde qui bouge
Au moins 800.000 fidèles sont attendus à Rome le 27 avril et
la cérémonie de canonisation devrait être suivie par deux milliards de téléspectateurs.
L'engouement, la ferveur, l'adhésion et au-delà la curiosité de l'Histoire n'occulteront pas des incompréhensions et des reproches. Des
interrogations sur les choix de Jean-Paul II que les médias à l'approche du
jour J synthétisent par les "ombres
au tableau" .
Sa condamnation sans appel de la Théologie de la Libération
est citée comme l'ombre venue d'Amérique Latine. Le "non" d'un pape "adversaire
du communisme " à des théologiens convaincus que "le marxisme peut donner des clés aux problèmes de la misère" : c'est ainsi que le cardinal Georges Cottier démontre l'impossible entente. C'est le rappel que Jean-Paul II a résisté au nazisme et au stalinisme, tout en condamnant le capitalisme effréné.
Les attaques émanant cette fois des intégristes "lefebvristes" portent sur le "pape d'Assise ", celui qui a organisé en 1986 des rencontres avec les autres religions.
Les critiques viennent aussi de la gestion des scandales
pédophiles qui ont secoué l'Eglise, elle aurait été trop protégée par Jean-Paul II. Il avait certes condamné la pédophilie aux Etats-Unis dès 2002, mais sans aller aussi loin que le "pard on " demandé par le pape François.
C'est aussi sur la question du sida que Jean-Paul II a été critiqué. Face au désastre en Afrique, le pape est resté intransigeant sur le refus du recours
au préservatif. Les reproches sur cette position ont continué avec Benoît XVI, son successeur, sur la même ligne. Et dernièrement le pape François a maintenu implicitement cette posture de l'Eglise en recommandant "la responsabilité sexuelle et la chasteté."
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