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"L'enfant a passé une heure dehors parce qu'on avait laissé une porte ouverte" : deux journalistes révèlent les dérives des crèches privées

Une recherche de la rentabilité à tout prix et un manque criant de moyens auraient conduit à des cas de maltraitance, rapportés par des familles. Berangère Lepetit et Elsa Marnette ont recueilli leurs témoignages dans "Babyzness. Crèches privées : l'enquête inédite".
Article rédigé par franceinfo
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"80% des places de crèches qui ouvrent appartiennent au secteur privé lucratif" selon les autrices du livre-enquête Babyzness (éd. Robert Laffont). (RICCARDO MILANI / HANS LUCAS)

"Des parents ont porté plainte, mais ces plaintes sont classées sans suite parce qu'il n'y a pas de témoin", regrette jeudi 7 septembre sur France Inter Elsa Marnette, journaliste au Parisien / Aujourd'hui en France.

>> "La situation ne s’améliore pas, elle se détériore même" : dans les crèches, le manque de personnels reste criant

Avec Bérangère Lepetit, elle publie ce jeudi le livre-enquête Babyzness aux éditions Robert Laffont. Elles y décrivent la situation dans certaines micro-crèches privées en France. Les deux journalistes ont d'abord été contactées l'an dernier par plusieurs parents "dans les Yvelines et en Seine-Saint-Denis qui [leur] ont fait part de dysfonctionnements graves dans les micro-crèches de leurs enfants". Elles ont ensuite rencontré des "directrices, des salariées et d'anciennes salariées".

Elles décrivent dans leur livre une recherche de rentabilité à tout prix et un manque criant de moyens. Et elles alertent sur le fait que "les enfants ne peuvent pas parler" du fait notamment de leur jeune âge. "Les auxiliaires, les personnels ne vont pas forcément raconter ce qui s'est passé", ajoute Elsa Marnette.

Un enfant disparaît de la crèche durant une heure

Bérangère Lepetit explique avoir reçu des témoignages de salariées qui "racontent que de manière informelle, il y a des quotas de couches, pas plus de trois par jour et par enfant, même si l'enfant est malade". "Une salariée m'a dit que dans sa crèche il n'y avait que deux livres et qu'elle devait donc raconter tous les jours la même histoire", se désole Bérangère Lepetit.

Elle évoque également le cas de "chauffe-biberon défectueux qui faisait des tâches sur les bras des enfants" ou de salariées obligées "de faire les courses ou de piocher dans les biscuits de leurs propres enfants" faute de goûter pour les bébés pris en charge par leur structure. Elsa Marnette se souvient d'une "maman dans les Yvelines dont l'enfant a passé près d'une heure hors de la crèche parce qu'une auxiliaire de puériculture avait laissé la porte ouverte" et que "personne ne s'était rendu compte" de l'absence de l'enfant.

"80% des places de crèches qui ouvrent appartiennent au secteur privé lucratif"

Les deux autrices ont choisi de centrer leur enquête "sur les crèches privées parce que c'est un secteur en pleine expansion en France". "80% des places de crèches qui ouvrent appartiennent au secteur privé lucratif", assure Bérangère Lepetit. Elle soutient que la maltraitance "n'est pas l'apanage des crèches privées", mais elle juge "étonnant" que "quiconque puisse ouvrir une micro-crèche". "La condition, c'est d'employer un référent technique, diplômé de la petite enfance qui devra gérer la structure", explique la journaliste.

Sa coautrice, Elsa Marnette, déplore le fait que "ces structures sont moins surveillées". "Il y a moins de normes et le matin ou le soir une professionnelle peut être seule pour s'occuper des enfants", dénonce-t-elle.

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