Vie sur Mars : "L'enquête pourra être menée correctement" grâce à la découverte de molécules organiques
François Forget, planétologue, directeur de recherches au Laboratoire de météorologie dynamique de l’université Paris 6 était invité, vendredi 8 juin sur franceinfo.
"A l’avenir, on devrait pouvoir mener l’enquête de la vie sur Mars correctement", a expliqué François Forget, planétologue, directeur de recherches au Laboratoire de météorologie dynamique de l’université Paris 6, vendredi 8 juin 2018 sur franceinfo. La "bonne nouvelle" est survenue lorsque la Nasa a annoncé jeudi, la découverte de matière organique complexe, par le véhicule Curiosity sur la planète Mars.
franceinfo : En quoi ces découvertes représentent-elles une avancée significative ?
François Forget : Jusqu’à il y a quelques années, nous n’avions rien trouvé du tout durant les anciennes missions, nulle part sur Mars. On était inquiets. Pas tant de l’absence de vie ou non car c’était l’objet de l’enquête, mais surtout de l’impossibilité de la mener. On craignait que les molécules organiques créées par la vie il y a 3,5 milliards d’années, aient été systématiquement détruites par l’environnement martien, qui est un peu hostile à cause de son atmosphère très oxydante. La bonne nouvelle c’est qu’avec le robot Curiosity nous avons découvert des molécules organiques pas trop mal préservées, même en n'ayant pris son échantillon qu’à quelques centimètres de profondeur dans la roche. A l’avenir, on devrait vraiment pouvoir mener cette enquête correctement et cela débutera dès 2020, car l’Agence spatiale européenne enverra un rover [un véhicule] récupérer des échantillons cette fois-ci, à presque deux mètres de profondeur. On devrait peut-être pouvoir trouver des molécules fossiles qui nous donneront des indices. Côté américain, on prépare le retour d’échantillons, de ces sédiments, pour savoir s’ils portent des traces de vie passée.
Et d’où vient alors cet échantillon trouvé par la Nasa ?
Curiosity n’a pas choisi son lieu d’exploration au hasard. On a acquis la conviction que le rover se promenait, au moment de la découverte de l’échantillon, au fond d’un ancien lac dans lequel il y a 3,5 milliards d’années se trouvait de l’eau liquide, qui n’était pas trop acide ni basique et qui contenait beaucoup d’éléments favorables à la vie. Depuis que cette eau a disparu, on retrouve de très beaux sédiments en fine couche, comme au bord d’une rivière, dont on analyse la composition. C’était il y a très longtemps mais à la même époque sur Terre, la vie existait. Nous cherchons dans les sédiments de ce lac, si nous pouvons trouver des fossiles, ou en pratique des restes de molécules organiques qui nous serviraient de fossiles.
Comment faites-vous pour analyser ces échantillons ?
C’est une belle histoire dans laquelle de nombreux chercheurs français sont impliqués. En pratique, on prend une petite foreuse, on ramène les échantillons, on les met en poudre et on les fait rentrer à l’intérieur du rover qui contient un micro laboratoire, qui s’appelle ‘Sam’. Toute une partie de ce micro laboratoire a été fournie par mes collègues français à Créteil, à Paris, qui permet de chauffer ensuite ces échantillons, de récupérer les gaz et d’analyser les molécules. Ça semble compliqué, mais en pratique c’est très impressionnant quand on y réfléchit, d’avoir un micro laboratoire aussi performant sur une autre planète.
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