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Pour la première fois, des médecins français parviennent à greffer des trachées artificielles

L'équipe parisienne à l'origine de cette prouesse a attendu longtemps pour présenter les résultats de ses opérations, effectuées entre 2009 et 2017.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le professeur Emmanuel Martinod à l'hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis), le 17 mai 2081. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

Ils vivaient avec une trachéotomie, ils peuvent désormais respirer normalement. Grâce à des médecins français, plusieurs patients ont bénéficié d'une reconstruction de leur trachée à partir d'aortes, apprend-on dimanche 20 mai dans la revue médicale américaine Journal of the American Medical Association.

"Les organes artificiels (...) c'est vraiment ce qui va révolutionner la médecine", a expliqué le professeur Emmanuel Martinod, de l'hôpital Avicenne de Bobigny (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), à l'occasion de la présentation des résultats de cette prouesse au congrès de la Société américaine de pathologie thoracique, à San Diego (États-Unis).

"Personne ne croyait vraiment à tout ça"

Le choix de l'équipe a été de transformer par "l'ingénierie tissulaire" des aortes, plus grand canal sanguin du corps humain, en trachées, un conduit du système respiratoire. Les aortes avaient été prélevées sur des donneurs décédés, et cryogénisées (conservées à -80°C). Leur tissu a été greffé, accompagné d'un "stent" (tuteur vasculaire), à la place d'une trachée préalablement retirée.

"Et ensuite, ça, ç'a été la plus grosse surprise : (...) l'aorte s'est transformée en trachée", se mettant d'elle-même à assurer les fonctions respiratoires. "Ce n'est pas de la magie" mais "personne ne croyait vraiment à tout ça", ajoute Emmanuel Martinod.

L'équipe parisienne à l'origine de cette innovation a attendu longtemps pour présenter les résultats de ses opérations, effectuées entre 2009 et 2017. Sur 20 patients sélectionnés, atteints de cancer ou d'autres maladies, sept ont finalement bénéficié d'un traitement plus classique, sans greffe d'aorte.

Sur les 13 autres, cinq se sont vu reconstruire une trachée, sept des bronches souches (les plus proches de la trachée), et le dernier une carène trachéale (bifurcation entre bronches gauche et droite). A chaque fois à partir d'une aorte.

Un patient peut désormais courir 50 minutes

L'un des patients, Éric Volery, a pu témoigner de la réussite de l'opération. Âgé de 40 ans, il a été greffé en 2011. Atteint d'une sténose trachéale qui l'étouffait, il avait subi des opérations en vain, le laissant sans autre perspective que de respirer pour le restant de ses jours avec un trou sous la gorge.

"J'étais en arrêt-maladie. Je pouvais parler seulement en mettant le doigt sur la trachée", donc en apnée, se souvient-il. "Un médecin, renommé, de l'hôpital Nord [à Marseille] m'a dit, et ça m'a marqué : 'les amours et le travail, c'est fini Monsieur'".

Il avait tort. Éric Volery, pendant quatre ans de ce qu'il appelle "maintenance", a vu cette nouvelle trachée se régénérer. Et, comme les autres patients, il a pu se faire enlever le stent. Il est en parfaite santé, appréciant par exemple de pouvoir désormais "courir 45 ou 50 minutes".

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