La sexualité en 9 lettres : A comme Amour
La chimie de l'amour
Le cœur qui bat la chamade, le corps chaviré de désirs, l'esprit tourné vers un seul être… Nul doute, l'amour est là ! Contrairement aux idées reçues, le cœur n'est pas au cœur de la bataille amoureuse, c'est le cerveau, et plus précisément l'hypophyse, qui dirigent la danse. Ce chef d'orchestre de toutes les glandes du corps commande la production des hormones, dont celles de l'amour.
Un véritable "shoot"
La première hormone à entrer en jeu est la dopamine ; qualifiée d'hormone de la motivation, c'est elle qui motive l'envie de revoir celui ou celle que l'on vient de rencontrer. Une voix grave qui fait battre le cœur plus vite, un sourire qui fait craquer, deux inconscients qui se rencontrent et se comblent… si l'amour est magique, la magie se trouve dans cette inconnue : personne ne sait expliquer pourquoi il est tombé amoureux de cette personne précise… Mais on sait désormais expliquer comment. Avec en premier lieu, la dopamine, qui intervient dans les sensations de plaisir. Elle est produite par le "système de la récompense" dans le cerveau, un système mis en cause dans les addictions. C'est elle qui est responsable de la dépendance ; le plaisir est tellement bon que l'on craque à nouveau pour ce qui le produit ! Ainsi l'amour s'apparente-t-il à une drogue douce : les endorphines, les "hormones du plaisir" font baigner le cerveau dans un bain de bonheur, à l'écoute de la voix aimée, après un moment ensemble, ou encore après l'orgasme où le corps subit un véritable "shoot" ! Elles confortent l'action de la dopamine, pour rendre encore plus amoureux et dépendant. La sérotonine, elle, est secrétée pour donner cette impression délicieuse de bien-être. Autre ingrédient du cocktail hormonal : l'ocytocine. Celle-ci est primordiale pour assurer l'attachement entre deux êtres : les amants la produisent lorsqu'ils passent du temps ensemble, se caressent ou s'embrassent. Dans le cerveau, les zones de la critique sont désactivées un certain temps et ceci explique la tolérance béate aux défauts de l'autre.
Un cocktail à durée limitée
Mais l'action de ces différentes hormones ne dure pas et la passion amoureuse n'a qu'un temps. Frédéric Beigbeder n'avait pas tort lorsqu'il intitulait son cynique roman "L'amour dure 3 ans", Lucy Vincent*, chercheur au CNRS, chiffrait cette période entre 18 et 36 mois en moyenne.
Plus le temps passe, plus l'on s'habitue à ce qui nous transportait auparavant… Les courbes sensuelles, le regard revolver ou la voix de velours font de moins en moins d'effet. Tout simplement parce que le système de récompense se lasse est produit moins de dopamine. Les récepteurs aux endorphines se désensibilisent, les zones de la critique se réveillent peu à peu et un regard plus lucide amène parfois des remarques acerbes ! Heureusement, l'ocytocine est là pour compenser… Si la passion diminue, l'attachement s'accentue. La relation amoureuse évolue, fondée sur la tendresse, la complicité, les points communs, l'humour, ou encore les projets ensemble. Si ce cap est fatal à certains couples, d'autres le transforment en une relation mature, qui n'est pas forcément moins riche en plaisirs…
*La chimie de l'amour. Lucy Vincent. Editions 22,90 € (7,90€ en poche)
Quand les sentiments enrichissent les ébats...
Un couple se définit habituellement par la sexualité et par les sentiments. Le terme "relation sexuelle" implique d'ailleurs ces deux aspects, même si aujourd'hui l'aspect sexuel est souvent plus fort que l'aspect relationnel (en dehors du mariage et des relations "installées"). Mais les deux amants ne partagent pas une partie de tennis ou un café… Ils s'imbriquent l'un dans l'autre, échangent des fluides intimes, produisent des hormones qui les lient l'un à l'autre. Que l'échange avec l'autre dure 2 heures, 1 an ou 20 ans, il peut être vécu dans une grande intensité, en conjuguant corps et esprit. Toutefois, il est certain que l'attachement et l'amour naissent davantage avec le temps qu'en une nuit, le coup de foudre étant rare !
Une libération apaisante
Nombreux sont ceux qui cherchent celui ou celle qui comblera ses manques, qui le complètera. Dans ce cas, lorsque le sexe est vécu dans les sentiments, il se révèle vraiment meilleur. Les sentiments les apaisent et les libèrent ; ils offrent une relation plus globale et plus complète. C'est la rencontre de deux corps, deux inconscients, deux parcours de vie. La mise en commun de toutes ces facettes, physiques, émotionnelles et intellectuelles fait toute la richesse d'une relation.
Accepter une certaine vulnérabilité et une certaine dépendance est alors nécessaire pour en jouir pleinement. Le partage des émotions, des envies, des pulsions et des plaisirs renforce la relation mais il expose aussi à l'autre, au risque d'être jugé, de ne pas être aimé, de souffrir. Un risque que certains ne veulent pas prendre et que les autres voient comme une richesse. Les couples apprennent alors à se connaître et à évoluer à deux. Sur le plan sexuel, ils apprennent à connaître leurs corps, découvrent les façons de faire jouir l'autre, de lui offrir ces extases si précieuses, qui consolident la relation grâce à la production d'ocytocine. La boucle est bouclée et le couple de plus en plus attaché...
Le sexe sans les sentiments : la jouissance sans l'amour
Les relations entre hommes et femmes ont énormément évolué depuis une vingtaine d'années : il est fini le temps, où une seule option était reconnue, le mariage. Désormais, du sexfriend sans engagement au pacs ou au mariage, la relation se décline suivant toute une palette de couleurs, plus ou moins intenses ou satisfaisantes.
Certains choisissent alors de dissocier le sexe des sentiments, à la recherche les bienfaits de l'étreinte sans les "contraintes" de la relation sentimentale. Le plaisir charnel sans la passion amoureuse… Il s'agit parfois de nuits sans lendemain, favorisées par les applications du type de Tinder. Le désir y est assouvi en toute liberté, sans faire intervenir l'amour. L'être humain a besoin de contacts et de faire l'amour… L'anglicisme "sexfriend" peut s'y apparenter ; il a envahi le vocabulaire relationnel : le sexe, est doublé d'une certaine amitié. On s'appelle quand on a envie, le soir, pour une soirée ou une nuit et le mot "amitié" désigne la régularité de ces nuits. Mais en général, les sexfriends ne partagent que leur désir et leur plaisir, et non les dîners au restaurant, concerts ou séances de cinéma.
On dit souvent que les hommes se retrouvent davantage dans ce type de relations, car ils auraient davantage peur de l'attachement et de l'engagement ; or ce n'est pas forcément limité au sexe masculin. Certaines femmes se sentent plus libres dans leur sexualité, sans le regard d'un homme qui les aime et sans courir le risque de leur jugement. Elles donnent libre cours à leurs envies et vont au bout de leur plaisir. Il est parfois plus facile d'offrir son corps que son cœur, la situation présentant moins de danger émotionnel : avoir des orgasmes avec des sentiments, augmente le risque de dépendance, physique comme affective… De plus, le lit est aussi le lieu du pouvoir, au sens de domination et de soumissions pour certains. Certains offrent à l'autre la jouissance, avant de se préoccuper de leur propre plaisir, pour rester maître du jeu et ils ne s'abandonnent pas ou peu… Ou à l'inverse, ils ne se préoccupent que de leur plaisir, sans tenir compte de celui de l'autre (un moyen de faire de celui ou un celle qui partage son lit, un simple objet)
Pourquoi dissocier le plaisir de l'amour
L'évolution de la société a favorisé l'émergence du mariage d'amour mais aussi de l'épanouissement personnel. Désillusion d'un mariage soldé par un divorce éprouvant, déceptions amoureuses répétées aboutissant à la perte de l'idéalisme, contraintes professionnelles trop importantes pour s'investir dans une "vraie" relation, mauvaises rencontres ou mauvais timing… Les raisons qui motivent ce genre de comportement sont nombreuses et elles sont parfois inconscientes. Certains idéalisent tellement l'amour qu'ils le réservent à certaines relations non sexualisées, comme leurs enfants ou leurs parents (la relation au parent de sexe opposé influence souvent les rapports dans le couple : une relation sécurisée rend plus confiant tandis qu'une mère castratrice, étouffante ou au contraire absente perturbe le relationnel amoureux). Ils attendent une personne qu'ils sacralisent et réservent leurs pulsions sexuelles à des rencontres éphémères, sans engagement et sans souffrance. Mais même une étreinte uniquement charnelle se révèle parfois tellement plus intense que prévue et perturbante. Certaines aventures provoquent ainsi un vrai déclic et ouvrent la porte à une relation plus globale et d'autant plus intense.
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