La couverture maladie universelle a 20 ans, "une très grande avancée qui demanderait à être améliorée"
Philippe de Botton, président de Médecins du monde, a regretté, dimanche sur franceinfo, l'absence de recours à ce droit pour les migrants ou encore les sans-domicile fixe.
Le 27 juillet 1999 naissait la couverture maladie universelle (CMU), instaurée par le gouvernement socialiste de Lionel Jospin pour tous ceux qui renonçaient aux soins faute d’argent. Aujourd'hui, le plafond de revenus s’établit à 745 euros par mois pour une personne seule et 5,7 millions de personnes l'utilisent en France. Philippe de Botton, président de Médecins du monde, est revenu dimanche pour franceinfo sur ce système d'aide de santé pour les plus démunis.
franceinfo : Est-ce que la CMU est une avancée sociale majeure ?
Philippe de Botton: Oui, c’est une avancée sociale majeure qui n’a pas depuis 20 ans d’équivalent pour l’accès aux soins des plus précaires et de ceux qui ont une moindre ressource financière. L’état de santé des patients s'est nettement amélioré, c’est une avancée considérable. Les patients qui ont accès à la CMU ont le même panier de soins que quelqu’un qui a un régime normal de sécurité sociale, c’est-à-dire prévention, consultation médicale, hospitalisation, etc. C’est une très grande avancée qui demanderait à être améliorée dans la mesure où il y a quand même un non-recours à ce droit dans 25% des cas. Il y a surtout des angles morts : il y a beaucoup de gens sans papiers, des migrants et des gens en situation irrégulière qui n’ont pas le droit à cette couverture maladie universelle complémentaire ou à l’aide à la complémentaire santé. [Cela touche aussi] la grande précarité, les 100 000 personnes qui sont dans la rue et qui ont beaucoup de mal à accéder à cette CMUC parce qu’il y a des barrières administratives : ce n’est pas évident de remplir le dossier. Les démarches sont relativement complexes, donc nous ce qu’on demande c’est que ce droit à la CMUC soit automatique en fonction des revenus, qu’il n’y ait pas de démarches à faire.
Certains ont-ils encore peur d’être stigmatisés ?
J’ai l’impression que cette stigmatisation tombe un peu dans la mesure maintenant où près de six millions ont la CMU. Les choses se sont améliorées. Sur le plan du refus de soins, il y a des problèmes : très peu chez les généralistes, par contre beaucoup plus chez les spécialistes. Cette CMU est devenue quelque chose d’assez commun, courant et beaucoup moins stigmatisée qu’avant. Les gens n’ont pas peur de dire qu’ils sont à la CMU, parce qu’ils sont dans l’ensemble assez bien reçus sauf chez certains médecins libéraux spécialistes. Il y a beaucoup de pédagogie à faire.
Ce système doit être réformé en novembre. Le gouvernement souhaite fusionner la CMU avec une autre aide pour créer une complémentaire santé solidaire afin d’étendre le nombre de bénéficiaires. Est-ce une bonne idée ?
En théorie, je pense que c’est une bonne idée, parce que l’aide à la complémentaire santé était pour les gens un peu au-dessus du seuil de la CMU. Il y avait un non-recours à ce droit-là dans des proportions importantes donc je pense que ça va permettre à ces personnes de mieux accéder aux soins. Ceci étant, le plus simple et le plus pertinent aurait été d’avoir un seul dispositif pour toutes les personnes qui sont en-dessous du seuil de pauvreté, donc environ 1 000 euros par personne et par mois. Ça aurait été beaucoup plus simple que d’avoir différents dispositifs. C’est une avancée, mais qui demanderait à être améliorée.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.