Obésité : de nouveaux gènes clés identifiés
Découvert il y a quelques années par des chercheurs britanniques, le gène FTO ( Fat mass and Obesity-associated protein), nom de code ALKBH9, est surnommé "gène de l’obésité". En effet, certaines variantes (ou allèles) de ce gène situé sur le chromosome 16 seraient associées à plus forte propension à l’obésité chez l’humain. Si l’on sait que 44% des Européens sont porteurs de cette variation génétique, couramment appelée "variation FTO", on ignorait jusqu’à présent son mécanisme d’action.
Fausse piste cérébrale
De premiers travaux avaient suivi la piste d’une action cérébrale, sans grand succès, explique le professeur Melina Claussnitzer, co-auteur de l’étude : "des études précédentes ont tenté de découvrir le lien entre la mutation génétique FTO et la régulation de l’appétit ou la propension à faire de l’exercice et le contrôle du cerveau. Mais des analyses de plus d’une centaine de tissus adipeux humains et de différents types de cellules de graisse indiquent l’absence de lien avec le cerveau".
D’après les travaux de l’équipe américaine, publiés jeudi 20 août dans la version en ligne du New England Journal of Medicine, l’action de cette mutation se situerait plus bas, au niveau des tissus adipeux.
Une plus forte tendance à stocker les graisses
Les chercheurs ont ainsi prélevé de nombreux échantillons de tissus adipeux chez des personnes porteuses ou non de la variante génétique FTO.
Ils ont alors constaté que chez les porteurs de la mutation, deux gènes distants nommés IRX3 et IRX5 avaient une activité accrue. Cette expression plus forte se traduisait par une modification de métabolisme des graisses, principales réserves d’énergie du corps qui au lieu de les brûler en fonction de ses besoins va avoir tendance à stocker. Une accumulation qui peut entraîner une prise de poids et à terme une obésité.
Un mécanisme réversible chez la souris
Les scientifiques ont également démontré la réversibilité de ce mécanisme génétique chez des souris de laboratoire.
En neutralisant l’activité du gène IRX3, les chercheurs ont constaté que le métabolisme des rongeurs avait rapidement augmenté, entraînant une nette inversion de leur courbe de poids malgré l’absence de changement de leur activité physique.
"L'impact sur l'organisme a été spectaculaire", estime Melina Claussnitzer. "Ces souris sont devenues 50% plus minces que celles du groupe de contrôle et elles n'ont pris aucun poids même avec un régime alimentaire plus riche en graisses, brûlant plus d'énergie même dans leur sommeil, ce qui indique une modification drastique de leur métabolisme", précise-t-elle.
Selon les conclusions de l’étude, ce mécanisme génétique agit comme une commande centrale du stockage ou de la consommation d’énergie dans l’organisme.
L'obésité reste un problème multifactoriel
Les chercheurs américains espèrent qu’une meilleure compréhension de ce mécanisme génétique puisse ouvrir la piste à de nouvelles approches thérapeutiques.
Il est toutefois important de rappeler que l'obésité reste dans la très grande majorité des cas une maladie multifactorielle qui résulte d’une interaction entre un patrimoine polygénique (plusieurs variations génétiques) et l'environnement. Les cas d'obésités monogéniques, héréditaires et parfois extrêmes, liés à la présence d'une mutation unique sur un gène (le gène MC4R) restent rares. Le mode de vie (sédentarité, mauvaise alimentation) joue donc un rôle moteur dans l'épidémie actuelle d'obésité, quelque soit notre lot à la loterie génétique.
Etude de référence : FTO Obesity Variant Circuitry and Adipocyte Browning in Humans, August 19, 2015, DOI : 10.1056/NEJMoa1502214
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.