Vaccin grippe : « Diminuer par deux ou trois le risque, ça vaut le coup ! »
Consultations chez le généraliste, passages aux urgences, hospitalisations… tous les voyants de la grippe sont au rouge. Selon Santé Publique France, 1.100 décès sont déjà attribuables au virus et ces chiffres sont provisoires. Les doutes sur l’efficacité du vaccin sèment la confusion chez certains patients.
Pr Odile Launay, infectiologue à l’hôpital Cochin (AP-HP) a répondu aux questions du Magazine de la santé.
- La ministre de la Santé, Agnès Buzyn a annoncé jeudi dernier que l’épidémie de grippe était « probablement » à son pic. Est-ce vraiment le cas ?
Pr Odile Launay : "Pour l’instant, le nombre de cas continue à augmenter. Santé Publique France dit qu’on ne peut pas savoir aujourd’hui quand le pic épidémique va être réellement atteint."
- Quelles sont les populations les plus touchées ?
Pr Odile Launay : "Comme chaque hiver, les populations les plus touchées sont les plus fragiles : les personnes de plus de 65 ans, les enfants de moins de deux ans (surtout moins de 6 mois) et toutes les personnes fragiles, en particulier les personnes immunodéprimées mais aussi celles qui ont des maladies cardiaques, pulmonaires, neurologiques, qui sont diabétiques… c’est-à-dire toutes les personnes concernées par la recommandation vaccinale."
- Cet hiver, les enfants représentent 31% des passages aux urgences pour grippe. Est-ce que cela signifie qu’il faut vacciner les enfants ?
Pr Odile Launay : "En France, on a une vaccination qui ne concerne que les personnes à risque, en l’occurence uniquement les enfants qui ont des pathologies qui les exposent à des formes sévères. Mais il faut savoir que d’autres pays, comme par exemple le Royaume-Uni, ont une politique différente. Dans ce pays, tous les enfants sont vaccinés pas seulement pour les protéger eux mais aussi pour limiter le risque de transmission à des populations plus fragiles. Les enfants sont les principaux « réservoirs » et transmetteurs de virus. Et d’ailleurs l’épidémie s’interrompt souvent au moment des vacances scolaires et reprend ensuite."
- Santé Publique France estime le taux d’efficacité du vaccin de cet hiver à 59% contre le virus AH1N1 et 19% contre le virus AH3N2. Ça semble peu…
Pr Odile Launay : "C’est un tout petit peu tôt pour évaluer l’efficacité du vaccin car nous sommes en début d’épidémie pour la France. Ce que l’on sait aujourd’hui, c’est que les vaccins contre la grippe ne sont pas d’une grande efficacité, il existe des vaccins beaucoup plus efficaces. Et de façon générale, ces vaccins marchent mieux contre les virus H1N1 que sur les H3N2 et le problème c’est que le virus H3N2 est un virus qui atteint plus souvent les patients âgés et que ces patients répondent moins bien au vaccin… Résultat : on a une efficacité d’autant moins bonne, ce qui justifie que l’on vaccine l’entourage, non seulement les professionnels de santé mais aussi la famille et que l’on fasse appel aux mesures barrière pour éviter la transmission de ce virus."
- Selon une idée communément admise, il vaut mieux dans tous les cas se faire vacciner car même si on a la grippe, elle sera moins forte… Est-ce une réalité ?
Pr Odile Launay : C’est quelque chose qui est difficile à démontrer scientifiquement mais on dispose d’éléments qui laissent penser cela. Une des indications du vaccin est de limiter le risque de complications et de décès.
- On voit que cette année, le vaccin est moins efficace, pourtant il s’agit d’un vaccin quadrivalent donc avec quatre valences… est ce que ça vaut vraiment le coup de se faire vacciner ?
Pr Odile Launay : "Moi je considère que diminuer par deux ou par trois le risque de grippe, et de décès ça vaut le coup. Le problème cette année c’est que nous avons un vaccin quadrivalent qui comporte deux virus de type A et deux de type B. La nouveauté, c’est que nous avons ajouté une souche de virus B mais les virus qui circulent cet hiver ne sont pas des virus de type B donc cela ne change rien sur l’efficacité du vaccin…"
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