Égouts : la santé des travailleurs fortement menacée
Dans un rapport publié ce 22 juin, l'Anses préconise diverses mesures pour assurer la sécurité à long terme de la santé de ces travailleurs dont elle n'a pu estimer le nombre en France, compte tenu des données disponibles et de l'hétérogénéité des situations. À Paris, le service compte par exemple 1.500 personnes, dont 265 interviennent "régulièrement dans le réseau", à Rennes 104, dont 18 interviennent "régulièrement dans le réseau". Ces derniers sont 120 dans le Val-de-Marne et 259 dans le Grand Lyon.
Selon le rapport, les égoutiers souffrent fréquemment de symptômes digestifs, respiratoires, d'irritation du nez, de la gorge et de la peau. On observe aussi chez eux une augmentation de la fréquence de certaines pathologies infectieuses.
Quant aux études de mortalité, elles "objectivent une surmortalité significative principalement pour les cancers du foie et du poumon, sans qu’il soit possible d’identifier précisément un ou plusieurs facteur(s) de risque responsable(s)", écrit l'Anses.
Exposition à des agents cancérogènes
L'agence s'était auto-saisie en juillet 2011 après la parution en 2004 d'une étude de l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) sur les égoutiers de Paris, mise à jour en 2009, qui montrait déjà une surmortalité de ces travailleurs, notamment par maladies digestives, cancers et suicides.
Pour conforter les "trop rares données de la littérature scientifique", l'Anses a mené une campagne de mesures chez les égoutiers parisiens entre octobre 2014 et mars 2015.
Cette campagne a montré qu'ils étaient exposés à un "cocktail d'agents chimiques et biologiques", et notamment des composés "cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques".
Des tâches "plus exposantes" ont été identifiées, comme le curage de bassins de dessablement ou le nettoyage à haute pression des dégrilleurs (les systèmes destinés à piéger les déchets plus ou moins volumineux).
L’exposition aux agents radiologiques a en revanche été exclue en raison d'une étude menée par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.
De 3 à 5 heures quotidiennes dans les égouts
Pour assurer la protection à long terme des égoutiers, l'Anses préconise de développer une "formation professionnelle obligatoire" pour toute personne amenée à travailler dans un réseau d’assainissement souterrain, de porter une "attention particulière aux tâches les plus exposantes" (meilleure ventilation, mécanisation), de mettre en oeuvre mesures d’hygiène et consignes de sécurité "en lien" avec le service de santé au travail et de cartographier les risques liés aux réseaux. Elle recommande aussi un suivi médical renforcé des égoutiers, ainsi que la poursuite et la mise en place d'études épidémiologiques pour le suivi des effets sanitaires à long terme.
En France, la gestion de l’assainissement (collecte, transport et traitement des eaux usées et pluviales) est du ressort des collectivités territoriales, qui s'en occupent majoritairement en régie. Mais certaines tâches peuvent être sous-traitées à des entreprises privées. Selon le rapport, les égoutiers, agents de la fonction publique territoriale ou salariés du privé, passent "officiellement au moins la moitié" de leur temps de travail dans les réseaux d'assainissement, une durée qui varie de 3 à 5 heures par jour, selon les chantiers.
En 2004, le réseau d’assainissement français s’étendait sur environ 385.000 km (réseau pluvial compris), avec des rythmes annuels de construction de l’ordre de 6.500 km, selon l’Institut français de l'environnement.
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