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Coronavirus : quelles sont les relations entre Karine Lacombe, accusée d'être "hostile" au professeur Raoult, et les laboratoires ?

La cheffe de service des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, Karine Lacombe, qui s’est opposée à une distribution non-encadrée de l'hydroxychloroquine en France, est accusée sur les réseaux sociaux de conflits d'intérêts avec des laboratoires concurrents.

Article rédigé par franceinfo - Alix Coutures
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Karine Lacombe, cheffe de service des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, parle lors d'une conférence de presse avec le Premier ministre Edouard Philippe, le 28 mars 2020. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / POOL)

"Très hostile au Professeur Raoult et à l'hydroxychloroquine, le Dr Karine Lacombe est financièrement liée au laboratoire Gilead", écrivent certains internautes sur les réseaux sociaux, depuis quelques jours. La cheffe de service des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine à Paris est mise en cause pour conflits d'intérêt avec des laboratoires qui développent des médicaments au banc d'essai pour traiter le coronavirus. Elle est notamment attaquée pour avoir pris position contre un recours non-encadré à l'hydroxychloroquine. La chercheuse a bien perçu des indemnisations des laboratoires pharmaceutiques américains Gilead et AbbVie, mais pour des travaux sur l'hépatite C et le VIH. La Celulle Vrai du faux de franceinfo vous explique.

Capture d'écran d'un tweet datant du 29 mars, évoquant une relation financière entre le laboratoire pharmaceutique américain Gilead et Karine Lacombe. (CAPTURE ECRAN)

Des rémunérations déclarées

Karine Lacombe a perçu 15 000 euros du laboratoire Gilead et 3 000 de AbbVie sur cinq ans. C’est ce qu’elle indique dans une déclaration d’intérêt public datant de 2016. Elle a toutefois fait remarquer à franceinfo "n’avoir touché que 10 000 euros et 2 000 euros, une fois les charges sociales retirées". Selon la cheffe de service des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine, cela n’a "rien d'inhabituel, beaucoup de chercheurs sont dans le même cas". Ces affirmations sont confirmées par le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) : "Les chercheurs peuvent travailler avec des laboratoires pour faire avancer les recherches thérapeutiques." Les indemnisations liées à la recherche doivent dès lors être "proportionnées au service rendu", souligne le CNOM.

Les versements perçus par Karine Lacombe sont déclarés précise le CNOM, puisqu’ils figurent dans la base Transparence Santé, pilotée par le ministère des Solidarités et de la Santé. "Les informations relatives aux conventions conclues et avantages consentis aux professionnels de santé doivent par ailleurs être déclarées par les entreprises sur le site Transparence Santé piloté par le ministère de la Santé et des Solidarités. Elles sont publiques", explique le Conseil de l’Ordre des Médecins, sur son site internet.

Légalement, le CNOM interdit aux professionnels de santé de recevoir des avantages illicites de la part d’industriels du secteur de la santé. Mais il autorise trois types de dérogations, dont "la rémunération, l’indemnisation et le défraiement d’activités de recherche". Un manquement au règlement entraîne des poursuites par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Le contrevenant encourt une peine d’emprisonnement d’un an et 75 000 euros d’amende, au maximum.

Des travaux menés sur l’hépatite C et le VIH

Karine Lacombe a perçu de l’argent de Gilead et AbbVie pour deux types de travaux. Il s'agit de conférences à l’étranger ainsi que des conseils de médecins appelés "boards". Contrairement à ce qu’a affirmé le médecin Gérard Delépine sur Sud Radio, un board ne constitue pas un "conseil d’administration", mais un conseil de chercheurs. Le but est d'informer régulièrement les laboratoires de l’efficacité sur le terrain de certaines molécules. D'ailleurs, Karine Lacombe précise "n’avoir aucun lien avec l’essai Discovery", destiné à évaluer quatre traitements expérimentaux contre le Covid-19. "Mes deux spécialités sont l’hépatite C et le VIH, mais cela n’a rien à voir avec l’antiviral Remdesivir, développé contre Ebola ou avec le Kaletra", poursuit la chercheuse. Elle ajoute avoir travaillé avec d’autres laboratoires comme la compagnie pharmaceutique belge Janssen ou MSD qui produisent, eux aussi, des médicaments pour lutter contre le VIH et l’hépatite C.

Présentée comme opposante à Didier Raoult et à la chloroquine, la cheffe du service des maladies infectieuses de l’hôpital Saint-Antoine a déclaré à franceinfo "n’avoir aucun lien d’animosité avec Didier Raoult". Elle a souligné qu’elle avait travaillé plusieurs fois avec l’IHU Méditerranée-Infection de Didier Raoult et animé plusieurs conférences pour l’Institut. En novembre 2018, elle a notamment animé une conférence à l’IHU de Didier Raoult, sur le dépistage de l’hépatite C en Afrique. Karine Lacombe estime avoir "juste dit plus fort que d’autres que l’étude manquait de rigueur scientifique". Elle ne critique pas la chloroquine, mais les méthodes du Docteur Raoult, qui selon elle "manquent de rigueur méthodologique et ne permettent pas de dire que la molécule est efficace", indique-t-elle à franceinfo. Elle "espère" toutefois que "l’efficacité de la chloroquine sera prouvée", rappelant qu’aucune des molécules sur les bancs d’essai pour soigner le Covid-19 "n’a pour l’instant prouvé son efficacité".

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