Un tennisman dans sa bulle. "Ça fait plaisir d'être dehors et de jouer au tennis" : une première séance d'entraînement sous surveillance à Melbourne
Pendant toute la durée de l'Open d'Australie, Pierre-Hugues Herbert tient son journal de bord pour franceinfo. Dans ce troisième épisode, il nous raconte sa première séance d'entraînement et l'état d'esprit des joueurs.
Quatre jours après son arrivée à Melbourne pour participer à l’Open d’Australie de tennis, à partir du 8 février prochain, le Français Pierre-Hugues Herbert commence à s'habituer aux conditions inédites de cet avant-tournoi. Les joueurs doivent tous arriver avant le dimanche 17 janvier, pour un confinement strict de 15 jours, dans un hôtel de Melbourne qui leur est entièrement réservé.
Mardi 19 janvier, Herbert a pu quitter sa chambre pour la première fois et aller s'entraîner pendant quelques heures. De retour à l'hôtel, il s'est confié à Fabrice Abgrall.
franceinfo : Cela fait maintenant quatre jours que vous êtes confinés dans dans votre hôtel. Dans quel état d'esprit êtes-vous ? Avez-vous avez pris votre "rythme de croisière" ?
Pierre-Hugues Herbert : La première chose, c'est qu'au niveau du décalage horaire, je me suis assez rapidement remis. J'ai fait deux nuits qui étaient vraiment correctes. Je me suis couché vers les 22, 23 heures et réveillé entre 6 et 8 heures du matin. Donc ça, c'est déjà ça. Ça aide. Ensuite j'ai toujours réussi, ces quatre derniers jours, à avoir un rythme sur une journée, à faire pas mal de trucs. Je lis, je m'occupe de mon physique, je regarde des films ou des séries et j'en profite.
Pour la première fois, vous vous êtes entraîné aujourd'hui. Comment ça s'est passé ?
Ça a été génial. Pour être honnête, c'était incroyable de pouvoir sortir et de pouvoir être sur un terrain de tennis dehors, respirer l'air frais, taper dans la balle et avoir de l'espace. Mais je ne me sentais pas si bien. J'avais du mal à respirer, les jambes ne bougeaient pas trop, j'avais très peu d'énergie... Mais ça fait plaisir d'être dehors et de jouer au tennis.
Vous vous êtes entraîné avec le Sud-Africain Lloyd Harris. Ce sera votre partenaire d'entraînement pendant toute la semaine. Comment va-t-il ?
On ne va pas dire qu'on a fait une séance ultra-physique, mais ça s'est très bien passé. On a fait une bonne séance. On a joué une heure quarante ensemble. On a passé en revue un peu tous les coups du tennis, sans trop bouger, et on va essayer de monter en puissance au fur et à mesure des jours et de se préparer au mieux.
Vous avez repris la raquette, vous avez repris contact avec le monde extérieur et donc vous avez revu forcément des joueurs sur le site du tournoi. Quelle est l'ambiance ?
Tout le monde était content de ressortir ! Donc c'était une bonne ambiance. Tout le monde avait plutôt le sourire. J'ai croisé de loin Nicolas (Mahut) et Gilles (Simon), Gaël (Monfils) aussi. On a dû voir entre entre 5 et 10 joueurs, de très loin, parce qu'il ne doit pas y avoir de contact entre nous.
Racontez-nous le moment où on a frappé à votre porte pour partir à l'entraînement, puis l'arrivée sur le site et le retour à l'hôtel. Comment ça s'est passé dans les détails ?
Ils sont venus nous chercher à 4 heures 25. On est descendus tous les quatre. J'étais content de pouvoir revoir Benjamin (Balleret), mon entraîneur, que je n'avais pas vu depuis 72 heures, à part en FaceTime. On est partis en voiture et on a été escortés de la chambre d'hôtel jusqu'au court où on s'est entraînés. On a commencé à s'entraîner à 4 h 40, jusqu'à 6 h 40.
Ensuite on a été escortés jusqu'à notre espace d'entraînement physique. On a passé une heure et demie dans cette tente à l'extérieur, qui est équipée pour faire du physique. J'ai un peu couru sur le tapis. Et puis, une heure et demie plus tard, à 8 h 10, on a été escortés au restaurant où on a mangé. Et une heure plus tard, on est repartis, escortés jusqu'à la voiture qui nous a ramenés à l'hôtel.
"C'est vrai que ce n'est pas facile. On est enfermé dans une chambre, on est escorté... Mais d'un autre côté, j'ai le sentiment d'être chanceux d'avoir cette possibilité de sortir cinq heures par jour."
Pierre-Hugues Herbertà franceinfo
L'information aujourd'hui, c'est que deux joueurs ont été contrôlés positifs au coronavirus. Est ce que vous connaissez le nom de ces deux joueurs ?
Non. Par contre, je sais pourquoi ils ont été contrôlés positifs : en fait de ce sont deux joueurs qui ont contracté le virus il y a plus de 15 ou 20 jours. Et ils n'ont pas vraiment été contrôlés positifs. Ils ont été contrôlés à 1 dans la jauge du positif. C'est très peu. D'après ce que j'ai compris, d'après ce qu'on m'a dit, ce sont des joueurs qui peuvent être encore testés positifs, mais qui ne peuvent plus transmettre le virus.
Comment cela se passe-t-il chez les joueurs ? Dans quel état d'esprit sont-ils ? Y a-t-il des mouvements de protestation ?
Oui, il y a des joueurs qui se plaignent, et d'autres un peu moins. J'ai lu la lettre qu'a publié (la joueuse biélorusse) Victoria Azarenka sur son compte Instagram. Elle est carrément en quarantaine complète. Et elle a un petit peu incité les joueurs à arrêter de se plaindre et à se dire qu'aujourd'hui on était chanceux, qu'il y avait des choses plus plus graves que ça. Se dire qu'on a de la chance d'être ici et d'être accueilli par le peuple australien. Il y a d'autres joueurs qui sont un peu plus "rentre-dedans" et qui, aujourd'hui, ont le sentiment qu'on les a trahis, que le tennis australien leur a pas donné toutes les règles, que finalement ils les ont fait venir pour les placer en quarantaine. Ces joueurs-là ressentent une grande injustice.
Moi, j'avoue que même si je comprends les joueurs qui se plaignent, je suis un peu plus du côté de Victoria Azarenka et sa lettre m'a plutôt parlé, parce que j'estime être chanceux d'être ici. Et surtout, je pense que les organisateurs ne doivent pas vraiment se coucher la tête tranquille le soir, vu tout ce qu'ils ont dû organiser, vu l'investissement qu'ils y ont mis et qu'ils y mettent.
Est-ce que vous connaissez votre programme de mercredi ? Allez-vous vous entraîner encore ?
Oui, demain je m'entraîne un peu aux mêmes horaire qu'aujourd'hui, vers 4 heures. J'ai déjà hâte de ressortir. Génial !
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