Gare à la prolifération d'algues sur tout le littoral français
"Il faudrait un train de camions pour tout retirer", s'est exclamé Christian Picot auprès de l'AFP, chargé de coordonner l’enlèvement des algues qui colonisent ce coin de la Manche. A Gatteville-le-Phare, la maire, Christine Léonard, a même dû interdire l'accès d'une plage en raison de cette prolifération, une décision rare en Normandie.
"Il est nécessaire d'interdire l'accès à la plage de la grande masse" au regard des "risques de toxicité liés à la production des gaz résultant de la putréfaction des algues", précisé l'arrêté municipal. Cette décision fait suite à une demande de l'Agence régionale de santé (ARS) de la Manche.
Plusieurs plages interdites
Le cas de Gatteville est loin d’être isolé. Depuis fin juin, des amas "énormes" de mélanges d'algues souillent nombre de plages normandes, de Gatteville à Caen-la-mer, selon le Centre d'études des algues (CEVA). L'odeur est parfois insupportable. En Bretagne, plusieurs plages ont été interdites ces dernières semaines à cause des algues vertes, fléau depuis des années pour cette région.
L’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer) signale quant à lui sur un autre fléau dans un bulletin d’information et d’alerte : la prolifération de micro-algues aussi bien sur le littoral atlantique que méditerranéen. Les zones d'alertes sont visibles sur cette carte.
"Avec le soleil et la chaleur, ce début d’été est propice à la prolifération de micro-algues sur le littoral" note l’Ifremer, établissement public chargé notamment de la surveillance du littoral et du milieu marin français.
Toxines diarrhéiques
Parmi ces algues invisibles à l’œil nu, celles du genre dinophysis produisent des toxines diarrhéiques, induisant des risques sanitaires pour les consommateurs de coquillages. D'ailleurs, les pêcheurs à pieds de l'été doivent être particulièrement vigilants.
Certaines micro-algues produisent des toxines amnésiantes ou paralysantes, a précise à l'AFP Philippe Souchu, chercheur à l'Ifremer. La présence de ces micro-algues, détectée grâce à un réseau de surveillance, entrainent même parfois la fermeture de zones d’élevage de coquillages.
Et le fléau ne s’arrête pas là. D'autres micro-algues ne sont pas toxiques, mais leur prolifération "peut être problématique pour l'environnement, notamment l'été", assure l’institut. Ce type de prolifération peut se traduire par une coloration vert fluo inhabituelle de l'eau. C'est par exemple le cas actuellement en baie de Vilaine, avec des nappes d'eau verte dues à la micro-algue Lepidodinium chlorophorum.
Dès lors, comment expliquer une telle prolifération ? "Les activités humaines émettent des engrais dans les milieux aquatiques dont profitent les algues", qu'elles soient invisibles à l’œil nu ou pas, répond Philippe Souchu, assurant que ces engrais sont issus de l'agriculture mais aussi des stations d'épuration ou encore des activités industrielles. Les algues profitent également des températures plus élevées.
Risques pour certaines espèces
Le mois de juin a d’ailleurs été le plus chaud jamais enregistré dans le monde il y a fort à craindre que de telles proliférations d’algues ne se multiplient à l’avenir, étant donné que les épisodes de canicule sont appelés à se reproduire sous l'effet du réchauffement de la planète. Une mauvaise nouvelle pour de nombreuses espèces aquatiques. "Les températures plus chaudes réduisent la teneur en oxygène dans l’eau, avec du coup un risque pour la survie des espèces", note l’Ifremer.
Un constat de plus en faveur de la vigilance à l’égard des rejets d’activité humaine et de la consommation de fruits de mer et coquillages ramassés directement au bord de l’eau.
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