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Comment le gaz hilarant, interdit aux mineurs mais utilisé comme drogue récréative, génère un trafic lucratif

Publié Mis à jour
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Gaz hilarant : enquête sur un trafic lucratif
Article rédigé par L'Oeil du 20 heures
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Après de nombreux accidents liés à l'inhalation de protoxyde d'azote chez les jeunes, la vente de ce produit destiné aux siphons à chantilly a été interdite aux mineurs en juin dernier. Un flou juridique demeure et empêche de lutter contre les réseaux de vendeurs.

C'est une pratique dangereuse mais répandue en soirée chez les jeunes : inhaler des ballons remplis de protoxyde d'azote, aussi appelé "gaz hilarant". Ce produit, utilisé notamment pour faire de la chantilly, est interdit à la vente pour les mineurs depuis le 1er juin 2021. Cinq mois plus tard, magré cette loi, la consommation ne faiblit pas. Au contraire, elle fait l'objet d'un trafic florissant : des bonbonnes se vendent clandestinement par kg – sous forme de "tank"  grâce à un vide juridique.

Nadine Grosdidier a perdu son fils Yohan il y a trois ans. Le jeune homme de 19 ans est mort d'un arrêt cardiaque, après avoir consommé du protoxyde d'azote entre copains. Depuis, la famille ne cesse d'alerter sur la toxicité de ce produit. Les cas d'intoxication ont été multipliés par 3 en un an : 134 cas rapportés aux centres antipoison dans toute la France en 2020 contre 46 en 2019 d'après un récent rapport de l'Anses.

Entre 20 et 30 heures la bonbonne

La famille de Yohan a créé une association pour porter son combat contre ce produit utilisé comme une drogue récréative. La loi qui interdit la vente aux mineurs est une avancée, selon Nadine Grosdidier, mais elle ne va "pas assez loin".

"Je n'ai pas de colère, ni de haine, mais on connait les dangers maintenant. Il faut faire quelque chose, il faut réagir."

Nadine Grosdidier, mère d'une victime

à "L'Œil du 20 heures"

Ces derniers qui se présentent sur les réseaux sociaux comme des "grossistes" se les procurent cette marchandise librement, notamment sur internet auprès de fabriquants en Europe ou en Asie. Ils les revendent ensuite illégalement sous le manteau à des prix attractifs : entre 20 et 30 euros la bonbonne.

Pas officiellement un stupéfiant

Nous avons pris contact avec l'un de ces revendeurs, qui nous a donné rendez vous dans un quartier sensible de la région parisienne. En caméra cachée, nous nous sommes fait passer pour une mineure qui cherche à se procurer du gaz hilarant pour une fête.

L'homme nous explique qu'il est entré dans ce trafic depuis six mois et qu'il propose des bonbonnes à la livraison, pour 10 euros du déplacement partout en Ile-de-France.

On ferme la livraison à 2 heures du matin la semaine et 5h le week-end.

Un trafiquant anonyme

à "L'Œil du 20 heures"

Sur les points de trafic de drogues, les policiers disent trouver de plus en plus de gaz hilarant, mais ils peinent à arrêter les revendeurs, car il ne s'agit pas officiellement d'un produit stupéfiant. Grégory Goupil, du syndicat Alliance-Police nationale, parle d'un "vide juridique".

"Ils ont toujours une parade ! "J'ai une boulangerie", "C'est pour ma mère", "C'est pour une fête de famille"... Pour nous, c'est dur d'aller plus loin dans une enquête sur la voie publique."

Grégory Goupil, du syndicat Alliance-Police nationale

à "L'Œil du 20 heures"

Valérie Six, députée (UDI) du Nord, fait le même constat. Elle est à l'origine de la loi sur l'interdiction de la vente aux mineurs. Le texte prévoit aussi de limiter la quantité vendue aux adultes, pour lutter contre le trafic. L'article L. 3611-2. est bien paru au Journal officiel, mais le décret qui devait fixer les quantités, en accord avec les ministères de la Santé et de l'Economie, n'a toujours pas vu le jour. Contacté, Bercy renvoie vers le ministère de la Santé. 

Près de 48h après notre enquête, la Direction générale de la santé nous a finalement répondu que les projets de décrets et d'arrêtés seront notifiés début décembre à la commission européenne, pour une publication des textes prévue "en mars 2022".

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