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Cigarettes : "Pour que la consommation baisse encore, il faut une forte hausse des prix"

Les ventes de cigarettes sont en recul en France. Mais la consommation a-t-elle diminué pour autant ? Les réponses du pneumologue Bertrand Dautzenberg.

Article rédigé par Clément Martel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Les ventes de cigarettes ont baissé de 8,6% en volume au premier trimestre 2013 par rapport à la même période de 2012. (ERIC FEFERBERG / AFP)

C’est une première en dix ans : le marché des cigarettes baisse en France. Selon les chiffres du mois de mars relevés par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, le marché recule tant en volume (-8,6%) qu'en valeur (-2,5%) au premier trimestre 2013 par rapport à la même période de 2012. Mieux, pour la première fois, la dernière hausse des prix, le 1er octobre dernier, ne compense pas la baisse des achats.

Mais la consommation a-t-elle vraiment diminué, ou les fumeurs ont-ils trouvé un autre moyen de s'approvisionner ? Bertrand Dautzenberg, professeur de pneumologie et président de l’Office français de prévention du tabagisme, nous livre son analyse.

Francetv info : La consommation de cigarettes baisse-t-elle vraiment ?

Bertrand Dautzenberg : Oui, il y a eu une diminution de 8,6% de la consommation, qui s’est reportée partiellement sur le tabac à rouler. Mais la baisse est incontestable. C’est une conséquence de l’augmentation du prix du tabac en octobre, de 40 centimes par paquet. Lorsque les hausses de prix sont plus faibles, elles n’ont d’impact que sur les bénéfices des fabriquants, pas sur la consommation. C'est ce qu'on a constaté depuis dix ans.

Le gouvernement a prévu une nouvelle hausse des prix en juillet. Il faut qu’elle soit forte, d'au moins 40 centimes, sinon cette baisse de la consommation ne se poursuivra pas. Or, il faut qu'elle se poursuive.

Selon les buralistes et l’industrie du tabac, la consommation n’a pas baissé, mais les gens s’approvisionnent d’une manière différente, sans rien rapporter à l'Etat. Qu'en pensez-vous ?

C’est le sempiternel couplet de l’industrie du tabac depuis des années, mais on n’observe pas vraiment de hausse de la contrebande. Les buralistes se plaignent de tout, et pourtant c’est une profession extrêmement aidée dont les revenus augmentent. Le tabac, lui, est une catastrophe absolue : 75 000 personnes en meurent chaque année.

Quant à la question du manque à gagner pour l'Etat, c'est un faux problème. La Cour des comptes a noté elle-même que si le tabac rapporte 45 milliards d’euros par an à la France, il lui coûte 75 milliards en dépenses. Le tabac tue, et ruine la France, mais la puissance des lobbies du secteur est telle qu'on se focalise sur les “pauvres buralistes”.

On constate une hausse des ventes de cigarettes électroniques. Ce phénomène contribue-t-il à la baisse de la consommation de tabac ?

L’augmentation de ces ventes est indiscutable. Environ 6% des Français ont essayé la cigarette électronique, et 1% l’utilisent. Cela représente tout de même 500 000 personnes. Par rapport à la cigarette, c’est une moins mauvaise chose pour les fumeurs et c'est une façon d’arrêter. La cigarette, c’est une chance sur deux d’en mourir, contre un pourcentage bien moindre pour la cigarette électronique. Mais cela reste un produit nocif : il ne faut pas que cela remette la fumée à la mode.

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