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"Shrinkflation", ou comment l'agroalimentaire augmente ses prix sans en avoir l'air : "La bouteille passait de un litre à 900 millilitres"

Ce procédé marketing, qui consiste à réduire la quantité d'un produit sans en changer le prix, ne date pas d'hier. Mais il pourrait être amené à s'amplifier car les coûts de production des industriels augmentent. 

Article rédigé par Sophie Auvigne
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Une femme dans un rayon de supermarché à Montluçon (Allier), le 13 ocotbre 2021. (SALESSE FLORIAN / MAXPPP)

Alissa et ses amis arpentent les rayons de leur supermarché et reconnaissent immédiatement la boîte de petits cubes de fromages. Mais ce Kiri n'est pas exactement celui que ces collégiens consomment depuis l'enfance. Les carrés crémeux pesaient auparavant 20 grammes, contre 18 aujourd'hui. Moins de fromage dans la boite, mais le prix, lui, n'a pas bougé. "C'est de l'arnaque. C'est pas normal, le prix aurait dû baisser", réagissent les adolescents.

Le procédé de "shrinkflation" (contraction du mot anglais shrink, rétrécir en français, et d'inflation) n'est pas nouveau, mais il pourrait être amené à s'amplifier, alors que les industriels voient leurs coûts de production s'envoler. En clair, il s'agit de réduire la quantité de produit dans un paquet ou une bouteille, sans en baisser le prix. L'association Foodwatch mène l'enquête depuis deux ans. Cela n'a pas été une tâche facile car il faut acheter les deux produits en même temps et au même endroit pour pouvoir les comparer. 

"C'était Tropicana en 2019, la bouteille passait de un litre à 900 millilitres. Le prix au litre prenait plus 38%." 

Camille Dorioz, responsable de campagnes chez Foodwatch

à franceinfo

"Il y a des produits aujourd'hui pour lesquels nous avons encore des doutes. Certaines plaquettes de chocolat à cuisiner, en particulier celle de Nestlé à 205 grammes. Les consommateurs nous ont signalé qu'elle était à 250 g il y a quelques années", rapporte Camille Dorioz, responsable de campagnes au sein de l'ONG. "On aimerait aussi jeter un coup d'œil sur Prince de Lu et la quantité de gâteaux dans le produit. On ne peut qu'avoir des doutes et aucune certitude", ajoute-t-il.

"Ce n'est pas un procédé illégal"

De leur côté, les industriels ne sont pas bavards sur le sujet. Nestlé n'a pas souhaité s'exprimer. Pas plus que les instances professionnelles. "Les industriels qui pensent que les consommateurs ne vont pas le voir se trompent assez souvent, estime Pierre Chandon, professeur de marketing à l'Institut européen d'administration des affaires (INSEAD). Je ne suis pas convaincu que ça soit toujours dans l'intérêt des industriels. Un des soucis, c'est qu'en tant que consommateur, on a tendance à penser que les quantités sont fixes, alors qu'elles ne le sont pas."

Mais "ce n'est pas un procédé illégal, ni immoral. Je pense d'ailleurs qu'il peut y avoir quelques avantages", ajoute Pierre Chandon. "Il faut bien se rendre compte que les portions ont énormément augmenté ces trente dernières années, souligne-t-il. On revient aux portions normales d'il n'y a pas si longtemps." Reste maintenant aux consommateurs à bien lire les étiquettes et à savoir calculer les prix au kilo. 

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