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Podcast
Le péril jeune de Joe Biden
À New York, en Californie, dans les Rocheuses, au Texas : les campus américains s'embrasent depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas. Des camps "Free Palestine" ont fleuri dans les universités pour protester contre la politique du président des États-Unis Joe Biden vis-à-vis d'Israël, et pour réclamer la fin de la guerre à Gaza. "Il faut savoir qu'il y a une position toujours particulière, exceptionnelle, des États-Unis par rapport à Israël, explique Frédéric Arnould, correspondant de Radio-Canada. C'est un soutien indéfectible et donc, d'une certaine façon, Joe Biden ne déroge pas à cette règle."
Depuis l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre dernier, puis la riposte israélienne, le bilan fait état de plus de 35 000 morts, en majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas. À travers ces manifestations sur les campus américains, les étudiants réclament "un cessez-le-feu immédiat", mais "ils demandent aussi aux universités qui sont quand même des grosses entreprises privées qui investissent pour les fonds de pension, qui investissent pour faire de l'argent dans des entreprises qui, dans ce cas-ci, font parfois affaire avec Israël, on parle ici de manufacturiers, d'armement et donc ils demandent que ces universités de se désinvestir", poursuit Frédéric Arnould.
Une politisation du mouvement
Harvard, Stanford, Yale, les débats sont parfois houleux dans plusieurs universités prestigieuses des États-Unis, entre partisans des deux camps. À l'université George Washington, située dans la capitale fédérale, un campement a été organisé avant d'être évacué par les forces de l'ordre. "C'est vraiment tragique de voir que dans certains cas, les autorités, les gens qui ont juré de nous protéger, brutalisent nos étudiants ou ne font rien pour les protéger, témoigne Kayla, l'une des porte-parole du campement de GWU, au micro de Guillaume Naudin de RFI. Ça montre tout simplement la complicité de l'Amérique dans la répression et dans cette occupation. Ça montre que nos universités sont tellement liées à ce génocide qu'elles financent activement, qu'elles sont prêtes à réprimer et à attaquer leurs propres étudiants pour ne pas satisfaire nos revendications."
"Au Congrès, des élus demandent à élargir la définition de l'antisémitisme pour inclure notamment la critique de l'État hébreu. C'est vraiment un sujet qui est devenu très politique."
Sonia Dridi, correspondante de la RTBF aux États-Unis
"J'étais très curieuse de voir qui manifestait et c'est vraiment des étudiants de toutes origines, note Sonia Dridi, correspondante de la RTBF. L'une des premières manifestantes à qui j'ai parlé, c'était une étudiante juive qui m'a dit qu'elle était une descendante de survivants de l'Holocauste et qu'elle a grandi en sachant qu'il fallait dénoncer les génocides et que pour elle, c'était assez paresseux de caractériser ces manifestations d'antisémites, c'est finalement croire que tous ceux qui soutiennent le mouvement pro-palestinien, ce sont des antisémites. C'est aussi une façon surtout d'attirer l'attention ailleurs."
Le discours adouci de Joe Biden
Joe Biden est resté silencieux pendant plusieurs jours, avant de finalement prendre la parole. "Il y a le droit de protester, mais pas celui de provoquer le chaos, a-t-il déclaré. Les gens ont le droit de recevoir une éducation, le droit d'obtenir un diplôme, de traverser le campus en toute sécurité sans craindre d'être attaqués. L'antisémitisme et les menaces de violence à l'encontre des étudiants juifs n'ont pas leur place sur un campus, ni en Amérique. Il n'y a pas de place pour les discours de haine ou la violence sous quelque forme que ce soit. Qu'il s'agisse d'antisémitisme, d'islamophobie ou de discrimination à l'encontre des Arabes américains ou des Palestiniens américains."
Un appel au calme de la part du Président envers l'électorat étudiant. "C'est sûr qu'il y a certains voyants rouges qui commencent à clignoter sur le tableau de bord des démocrates, estime Frédéric Arnould. Donc là, il essaye tant bien que mal, parce que c'est compliqué pour lui, parce qu'il y a ce soutien toujours indéfectible d'Israël. Mais en même temps, il faut montrer qu'il entend cette contestation. Alors petit à petit, on sent que le discours de Biden et des démocrates est un peu adouci."
"Joe Biden essaie de ne pas se mettre à dos ces électeurs, parce que si ces jeunes-là ne sortent pas au mois de novembre pour voter pour lui, c'est sûr qu'il doit montrer qu'il les écoute et ça, c'est important."
Frédéric Arnould, correspondant de Radio-Canada aux États-Unis
"Le vote des jeunes n'est pas crucial, mais il est important", estime Sonia Dridi, précisant qu'en 2020, le groupe des 18-29 ans est celui qui a le plus fortement voté pour Joe Biden. Pourquoi les jeunes sont-ils importants ? "C'est parce que ce sont eux qui, sur le terrain, mobilisent. Ce sont eux qui sont dynamiques pour faire la campagne, faire du porte à porte. Donc ce n'est pas tant que leur vote va être déterminant pour l'élection de Joe Biden, c'est qu'ils peuvent mobiliser."
Quel est le rôle des Républicains ? "Les Républicains espèrent tirer profit de cette situation en tentant d'instruire un procès en antisémitisme à toutes ces manifestations, estime Jordan Davis de la RTS. Il y avait un consensus bipartisan autour d'Israël pendant des décennies. Là, c'est vraiment en train de partir et surtout avec Joe Biden, qui s'est décrit comme sioniste lui-même, et qui est en train de se dire ‘Attendez, je vais dire stop à Benyamin Netanyahou', il faut poser des limites."
"Washington d'ici" est un podcast des médias francophones publics. Une fois par mois, les correspondant·e·s de franceinfo, la RTBF, Radio-Canada, la RTS et RFI décryptent, à leur manière, les toutes dernières infos de la campagne pour l'élection présidentielle américaine de 2024. Avec Sébastien Paour (franceinfo), Jordan Davis (RTS), Frederic Arnould (Radio-Canada), Sonia Dridi (RTBF) et Guillaume Naudin (RFI). Réalisation : Philippe Benoit (RTBF) et Régis De Rath (RTBF).
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