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Nord Stream 2 : le gaz russe peut désormais entrer en Europe

Il n'y a plus d'obstacle au projet Nord Stream 2 : mercredi 30 octobre, le Danemark a autorisé la construction, dans ses eaux territoriales, d'un tronçon de ce gazoduc controversé qui doit approvisionner l'Europe en gaz russe via la Baltique. L'Ukraine et les européens s'inquiètent.

Article rédigé par franceinfo, Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Un ouvrier sur le chantier du gazoduc Nord Stream 2. Le Danemark a autorisé, mercredi 30 octobre, la construction, dans ses eaux territoriales, d'un tronçon de ce gazoduc controversé qui doit approvisionner l'Europe en gaz russe via la Baltique. (STEFAN SAUER / ZB)

Le Nord Stream 2, ce sont de très gros - et très longs - tuyaux qui passent sous la mer Baltique : 1 250 kilomètres au total, pour acheminer le gaz depuis son point d'entrée, dans la région de Saint-Pétersbourg, tout près de la frontière estonienne, et son point d'arrivée : le port allemand de Greifswald. Il existe déjà un pipeline qui suit à peu près le même parcours, le Nord Stream 1, mais son jumeau permettra de doubler les flux : le Nord Stream 2 pourra transporter - chaque année - 55 milliards de mètres cubes de gaz supplémentaires. Il restait un dernier obstacle à surmonter. Mais, après avoir pas mal traîné des pieds, le Danemark a accepté, ce mercredi 30 octobre 2019, de laisser passer les tuyaux dans ses eaux territoriales.

Il ne reste donc qu'un tout petit tronçon à construire, environ 147 kilomètres, pour parachever le projet. Selon Alexei Miller, patron de Gazprom cité par l'agence publique Ria-Novosti, "ce travail peut être achevé en cinq semaines". Dès l'annonce des autorités danoises, Vladimir Poutine a publiquement exprimé sa satisfaction et le titre Gazprom a gagné 3% à la bourse de Moscou. Le géant de l'énergie russe finance ce projet d'une dizaine de milliards d'euros à 50 / 50 avec 5 industriels européens, dont le Français Engie.

De l'eau dans le gaz entre Moscou et Bruxelles  

À Bruxelles, la Commission européenne juge que ce gazoduc place l'Europe en situation de dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, qu'il va renforcer l'influence de Moscou - ce qui ne plaît pas non plus aux Américains. Souvenez-vous des guerres du gaz en 2006, 2009 et 2014 entre Moscou et l’Ukraine : toute l'Europe avait eu des difficultés d'approvisionnement. Demain, rien n'empêchera Vladimir Poutine de menacer ou de fermer les vannes pour faire pression sur les capitales européennes. Le problème, c'est que la Russie est toujours le premier fournisseur de gaz naturel des 28, qui n'ont pas réussi à diversifier leurs sources d’approvisionnement. L'Allemagne notamment, qui est le plus gros pays importateur, est dans une impasse: elle a programmé une sortie du nucléaire, en 2022, du charbon, en 2038 et a un besoin vital du gaz russe.  

Affaiblir l'Ukraine  

Le projet des Russes n'est pas que de vendre du gaz aux européens. C'est aussi d'affaiblir l'Ukraine de manière plus subtile qu'en annexant la Crimée ou en soutenant les séparatistes de l'est du pays. L'Ukraine, qui a toujours été un pays de transit d'une grande partie du gaz russe, verra demain une importante manne financière lui échapper, puisque la Russie ne sera plus contrainte d'y faire passer son gaz et n'aura plus de redevance à verser aux autorités. Le président Volodymyr Zelensky s'en est ému aujourd'hui, pointant le risque d'une nouvelle "agression militaire" de la part des Russes.

L'existence de ce gazoduc reste malgré tout menacée par de possibles sanctions américaines et de nouvelles règles européennes sur le transport du gaz (qui demandent notamment le découplage des activités de production et distribution). Le "pipeline de Poutine" est au cœur d’une bataille économique et géopolitique qui ne fait que commencer.

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