Les Suisses vont acheter de nouveaux avions de combat après un vote très serré
La Suisse se rendait aux urnes dimanche pour une série de "votations" avec notamment à l’ordre du jour un sujet qui coupe le pays en deux sur les questions de défense et l’achat de nouveaux avions militaires, qui a été validé de peu.
C’est passé ric-rac avec 8 600 voix d’écart sur 3 millions de vote exprimés, 50,1% en faveur d'un investissement militaire sur l’acquisition d'avions de combat. Le gouvernement fédéral, qui portait cette demande, pensait l’emporter largement. Les sondages prévoyaient une victoire du "oui" avec près de 60%. Finalement, cela s’est joué d’un cheveu.
Un pays coupé en deux
La carte électorale dévoile un pays divisé. D’un côté le centre, l’est et le nord de la Suisse ont voté "oui". Il s'agit donc essentiellement des régions alémaniques, où l’on parle le suisse allemand. De l’autre côté, l’ouest, près de la France, a largement voté "non" avec 68% de rejet dans le Jura, plus de 60% à Genève, Neuchâtel ou dans le centre de Bâle. C’est révélateur d’un pays où les questions de défense suscitent une vive controverse.
En résumé, les partisans du renouvellement de l’équipement militaire soulignent que les 50 avions de combat de l’armée de l’air suisse sont vieillissants. Les plus anciens, des F5 Tiger, ne peuvent plus voler que de jour. Et les autres, des FA18, seront périmés d’ici dix ans. À l’inverse, les opposants estiment qu’à l’heure de la cybersécurité et du numérique, la défense militaire classique n’a plus aucun sens pour un pays comme la Suisse, vu sa taille et vu l’omniprésence de l’Otan autour de ses frontières. Le résultat très serré de cette votation ne va pas clore le débat.
Une bataille commerciale entre Américains et Européens
Il y a un énorme enjeu économique et financier comme toujours pour les contrats de défense. Le marché s’élève à plus de 15 milliards d’euros comprenant l’achat de 30 à 40 nouveaux avions, puis leur entretien pour 30 ans. La bataille commerciale s’annonce âpre avec trois, voire quatre concurrents en lice. Il s'agit des deux Américains Boeing (avec le Super Hornet) et Lockheed (avec le F35), de l'Européen Airbus (avec l’Eurofighter) et peut-être du Français Dassault (avec le Rafale) auréolé de ses derniers succès commerciaux en Grèce, en Inde ou en Egypte.
Avec un effet en chaîne pour l’économie suisse, puisque 60% du montant du contrat doit être investi en Suisse, en particulier en Suisse alémanique, ce qui explique peut-être la division du pays lors du vote de dimanche. C'est une bataille économique et aussi une bataille politique parce que les Européens comprennent mal pourquoi la Suisse, depuis de longues années, privilégie le choix d’avionneurs américains.
Deux votations encore à venir
L’histoire n’est pas terminée parce qu’en Suisse, une votation chasse l’autre. Et il y en aura au moins deux autres sur le sujet. La prochaine est prévue le 29 novembre. Cette fois nos voisins devront se prononcer sur un texte qui entend interdire le financement d’entreprises de matériel de guerre. Donc si c’est interdit, l’impact sera immédiat sur le contrat. Et si le financement est maintenu, il y aura ensuite, une fois le choix de l’avionneur effectué, un autre vote sur les avions retenus. Et il y a six ans, lors d’une situation similaire, les Suisses avaient refusé, à 53%, l’achat de chasseurs militaires suédois Gripen. Comme quoi sur ces sujets de défense, en Suisse, c’est toujours ric-rac.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.