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Cuba légalise le mariage homosexuel et la gestation pour autrui après un référendum sans précédent

Ces mesures sont prévues dans un nouveau Code de la famille soumis dimanche 25 septembre au vote des Cubains. C'est une évolution majeure de société, mais le référendum a suscité la controverse.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Un Cubain vote dans un bureau de vote lors du référendum sur le nouveau code de la famille, à La Havane le 25 septembre 2022. (ADALBERTO ROQUE / AFP)

"El Codigo de las familias", le code des familles (c’est son nom officiel) a été approuvé à Cuba avec un peu plus de 66% des voix lors d'un référendum organisé dimanche 25 septembre. Il s'agit d'une révolution dans une partie du monde plutôt conservatrice sur les sujets de société. Le texte constitue une refonte complète des droits : légalisation du mariage homosexuel, de la transsexualité, de la gestation pour autrui (baptisée "gestation solidaire"), de l’adoption par les couples de même sexe. Le code renforce également les droits des enfants et des personnes handicapées.

Son adoption implique son entrée en vigueur immédiate. Dans ce pays de 11 millions d’habitants toujours tenu d’une main de fer par le régime communiste, ce référendum a tourné au plébiscite pour le pouvoir en place parce que le gouvernement avait mené une campagne intense en faveur du oui. Ce 25 septembre encore, jour du vote, le président Miguel Diaz Canel, héritier de la dynastie de Fidel et Raul Castro, avait dramatisé l’enjeu en le liant à la légitimité du régime : "Ce code de la famille est un hommage à l’ambition de Fidel et Raul, à l’héritage humaniste de la révolution cubaine, ce code est loyal au concept même de révolution." Il est d'ailleurs intéressant de relever le rôle central joué pendant la campagne par la fille de Raul Castro, Mariela, militante très engagée pour les droits LGBTQI+.  

Opposition des Églises et critiques de la communauté homosexuelle

Voter pour cette refonte des droits, c’était donc aussi voter pour le pouvoir et c’était l’un des dilemmes pour les électeurs. D’ailleurs, le taux de participation (74%) est faible pour Cuba. Le taux d’approbation (66%) est lui aussi relativement bas dans un pays où il est risqué de dire "Non". Et où bien entendu, seul le pouvoir a eu la parole dans les médias audiovisuels pendant la campagne. Les opposants au texte étaient en fait nombreux.

D’abord, les opposants sur le fond : Cuba est un pays qui reste assez pratiquant (on se souvient de la liesse à La Havane pendant les visites papales, Jean-Paul II en 1998, François en 2015) et les Églises catholique, évangéliques, afro-cubaines, se sont toutes opposées à ce texte. Deuxième catégorie : une partie de la communauté homosexuelle qui dénonçait l’opportunisme du pouvoir communiste, alors que ce même pouvoir n’a jamais présenté de véritables excuses pour avoir, dans les années 1960, pratiqué ouvertement l’homophobie en internant des centaines de personnes dans des camps de rééducation.

Le premier référendum en 60 ans sur un sujet de société

Enfin la troisième catégorie concerne les opposants politiques. Ils sont  potentiellement favorables à la réforme, mais désireux de profiter de l’occasion pour exprimer leur désaccord avec le régime.  Parce qu’un référendum à Cuba, c’est rarissime : c’est seulement le troisième en 60 ans. Les deux précédents portaient sur des réformes de la Constitution. Cette fois, il s’agissait d’une loi et de la vie quotidienne, une première. L’occasion était donc réelle de critiquer le pouvoir, dans un pays où les libertés sont sous contrôle, où la presse est censurée, et où manquent les produits de première nécessité, en partie en raison de l’embargo américain : peu de nourriture, peu de médicaments. Il y a donc de multiples interprétations possibles de ce résultat.    

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