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Colombie : après quatre semaines de contestation, le pays est en partie paralysé par de nouvelles manifestations

Ce pays d'Amérique du Sud est en proie depuis fin avril à une forte contestation sociale. Le pays est en grande partie bloqué avec à nouveau 48 heures de manifestations. 

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des manifestants participent à la "Marche du silence" en signe de rejet des blocages de rues et des violences qui éclatent lors des protestations contre le gouvernement, à Cali, en Colombie, le 25 mai 2021. (LUIS ROBAYO / AFP)

Les manifestants se sont levés de bonne heure, mercredi 26 mai, à Bogota, la capitale de la Colombie. Les défilés ont commencé dès 9 heures du matin (16 heures à Paris) avec plusieurs cortèges appelés à converger vers le centre. Des manifestations sont également annoncées dans plusieurs autres villes. Et le pays compte désormais près de 60 barrages routiers, qui interdisent les accès aux principales agglomérations.

L'activité économique est en partie paralysée. Par exemple, la grande mine de charbon de Cerrejon, la plus importante d'Amérique du Sud, a dû cesser toute activité le 24 mai. Impossible d'acheminer le charbon autour de la mine : les routes sont bloquées, le transport ferroviaire également. Dans ce pays de 50 millions d'habitants, la contestation dure depuis le 28 avril, il y a donc pile quatre semaines.

Elle avait démarré en opposition à un projet de réforme fiscale qui visait à augmenter la TVA pour accroître les ressources de l'Etat. Elle s'est élargie et porte dorénavant globalement sur les inégalités sociales, la pauvreté qui touche plus de 40% de la population, le chômage qui approche les 20%. Il y a quand même des négociations avec le gouvernement. Le comité de grève national a signé un pré-accord avec les pouvoirs publics ce même 24 mai, afin de négocier notamment un salaire minimum. Mais les syndicats veulent maintenir la pression, d'où ces nouveaux cortèges.

Le cercle vicieux de la violence

Dans le même temps, le pays a sombré dans la violence, avec un bilan déjà lourd : au moins 43 morts, des centaines de blessés, et près de 290 personnes portées disparues. Les forces de l'ordre, en particulier les brigades anti-émeute, les Esmad, sont montrées du doigt après des interventions particulièrement musclées, comme en témoignent de nombreuses vidéos sur les réseaux sociaux. Elles sont parfois accompagnées par des groupes paramilitaires d'extrême droite, comme "Aguilas negras", les Aigles Noirs. Leur "logiciel", marqué par la lutte contre la guérilla des Farc pendant 50 ans, est exclusivement répressif.

Mais la violence est aussi le fait de certains manifestants. Par exemple, mardi 25 mai au soir, ils semblent être les auteurs d'un incendie qui a en partie ravagé un palais de justice, à Tulua, dans le sud-ouest du pays, près de la grande ville de Cali, qui est l'épicentre de la contestation. Cet incendie fait la une en Colombie : il rappelle un drame similaire qui a marqué l'histoire du pays. En 1985, l'un des mouvements de guérilla avait pris d'assaut le palais de Justice de Bogota, et les affrontements qui avaient suivi avec les forces de l'ordre avaient fait une centaine de morts.  

Le président Duque face à une défiance sans précédent

Conséquence de tout ça, le président colombien est mal en point. Ivan Duque paraît incapable de gérer la crise. Âgé de 44 ans, très marqué à droite, héritier désigné de l'ancien président Alvaro Uribe, il persiste à ne voir dans les manifestants que des "vandales" ou des "terroristes". Sa cote de popularité est en chute libre : 73% des Colombiens ne lui font plus confiance selon un sondage publié juste avant ces nouvelles manifestations. Et ils sont 89% à affirmer soutenir les revendications socio-économiques des manifestants.

Les prochaines élections sont prévues dans un an. Ivan Duque va peut-être avoir du mal à tenir jusque-là.

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