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Brésil : mystérieuse disparition en Amazonie d'un journaliste britannique et d'un spécialiste des peuples indigènes

Cette double disparition, au fin fond de l'Amazonie brésilienne en dit long sur le climat dans le Brésil du président d’extrême droite Jair Bolsonaro, le tout à quatre mois des élections générales dans le pays.

Article rédigé par franceinfo
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La rivière Javari, en Amazonie (Brésil), en juin 2020. (EVARISTO SA / AFP)

À première vue, l'histoire ressemble un peu à un roman policier mâtiné de film d’aventures et de roman policier, style À la poursuite du diamant vert ou Les aventuriers de l’arche perdue. Dom Philipps est un journaliste britannique de 57 ans. Bruno Araujo Pereira est l’un des meilleurs spécialistes brésiliens des peuples d’Amazonie. Depuis le dimanche 5 juin au matin, ils ont littéralement disparu, alors qu’ils faisaient des recherches dans une région très isolée, au cœur de la forêt Amazonienne, la vallée de Javari. C’est à l’Ouest de l’Amazonie, près de la zone dite des trois frontières entre le Brésil, le Pérou et la Colombie. C’est un drôle d’endroit, fascinant, mais une sorte de bout du monde, avec aussi énormément de trafics en tout genre.

Au matin, les deux hommes, étaient attendus dans la ville d’Atalaia do Norte. Ils ne sont jamais arrivés alors qu’ils connaissent très bien la zone et qu’ils étaient parfaitement équipés : un téléphone satellitaire, un bateau neuf avec des réserves d’essence (le bateau, c’est le moyen de transport par excellence sur ces petits affluents de l’Amazone en pleine forêt). Depuis l'annonce de leur disparition, les traqueurs indigènes ont cherché les deux hommes non-stop, sans succès.  

Les incursions des mineurs et exploitants forestiers

Les proches des deux hommes sont très inquiets. L’épouse de Dom Philipps, le quotidien britannique The Guardian qui l’emploie, le Comité International pour la Protection des journalistes, tous se disent très préoccupés et appellent les autorités brésiliennes à tout faire pour retrouver les deux disparus. Les deux hommes avaient reçu des menaces, l’épouse de Dom Philipps l’a confirmé. Et ils enquêtaient, comme souvent, sur les incursions des mineurs, des orpailleurs, des chasseurs, des exploitants forestiers sur les terres réservées aux indigènes.

Dans la région, il existe une vingtaine de tribus qui demeurent totalement isolées. Ces derniers mois, les incidents violents se sont multipliés dans la région : les mineurs et les exploitants forestiers en particulier convoitent cette terre, pour en exploiter le sous-sol ou le bois. La Funai, qui est l’organisme brésilien chargé de la protection des autochtones, a été attaquée à plusieurs reprises dans cette vallée de Javari. Il y a trois ans, l’un des membres de la Funai avait d’ailleurs été tué.  

Le bras de fer Lula/Bolsonaro sur les indigènes

Et il y a donc un arrière-plan politique à cette affaire parce que depuis son arrivée au pouvoir il y a trois ans, le président d’extrême droite Jair Bolsonaro n’a eu de cesse de s’attaquer aux droits des indigènes. Il avait d’ailleurs eu cette formule lors de sa précédente campagne : "il ne faut plus leur céder un centimètre de terre". Il a donc réduit de moitié les budgets de la Funai, porté à sa tête un militaire acquis à la cause de l’agrobusiness, gelé tous les projets de nouvelles réserves. Et Bolsonaro, qui cherche à décrocher un deuxième mandat en octobre prochain, entend faire avaliser de nouvelles activités minières et agricoles dans les réserves déjà existantes, à peu près 13% de la superficie du Brésil.

En face, l’ex-président de gauche et revenant Lula, lui aussi candidat et favori du scrutin d’octobre prochain, adopte la position inverse. Il promet, s’il revient au pouvoir, la création d’un ministère des Indigènes et l’annulation de toutes les décisions de Bolsonaro sur le sujet. La nuit dernière, Lula, à son tour, a donc logiquement dénoncé la disparition de Dom Philipps et de Bruno Araujo Pereira. Cette disparition est décidément bien plus qu’une simple énigme policière.    

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