Un ingénieur américain spécialiste des chaudières nucléaires et sa femme arrêtés pour espionnage
Jonathan et Diana Toebbe sont accusés d'avoir vendu des informations confidentielles sur la conception de navires de guerre à propulsion nucléaire à une personne qu'ils croyaient être le représentant d'une puissance étrangère.
C'est une histoire d'espion, ou d'apprenti espions, digne d'un film hollywoodien ou d’une parodie et qui fait les gros titres de la presse américaine depuis une semaine. L’histoire est celle d'un couple de la classe moyenne, a priori sans histoire : Diana et Jonathan Toebbe. Elle est professeur de littérature, lui ingénieur spécialisé dans les chaudières nucléaires. Ils ont deux enfants, vivent confortablement, leurs revenus annuels tourne autour des 200 000 euros et ils se retrouvent aujourd'hui poursuivis pour avoir tenté de vendre à une puissance étrangère les secrets de fabrication du dernier modèle des sous-marins américains notamment ses chaudières nucléaires.
Ils ont été pris, pour ainsi dire "la main dans le sac", ou plutôt "dans la boite aux lettre morte". Selon les termes de leur mise en accusation, Jonathan Toebbe a contacté anonymement en avril 2020 une puissance étrangère - on ne sait pas laquelle - à qui il fait une offre de service : les plans des sous-marins américains et de leurs chaudières nucléaires contre rémunération. Travaillant pour la Navy, sur les réacteurs de dernière génération des sous-marins, Jonathan est effectivement habilité "Q", la plus haute habilitation au secret dans la hiérarchie du ministère de l'Énergie américain, celle qui touche à l’atome.
Tel est pris qui croyait prendre
Mais la puissance étrangère - manifestement un allié des États-Unis - prévient le FBI, dont un des agents va alors se faire passer pour un représentant de ladite puissance et convaincre Jonathan de lui fournir effectivement quantité de documents, moyennant espèces.
Jonathan va s’exécuter, copiant des centaines de documents subtilisés sur des cartes mémoires qu’il déposera dans ce que les espions appellent des "boites aux lettre mortes" : généralement un lieu public où l’on peut laisser des objets pour qu'ils puissent être récupérés après coup sans jamais avoir à se rencontrer physiquement.
Jonathan, qui opérait jusque-là par messagerie cryptée et sous pseudonyme, sort ainsi du bois et cache ses cartes mémoires dans un pansement, dans un papier de chewing-gum et même dans un sandwich au beurre de cacahuète avant de les déposer dans ces boites aux lettres. Pour prix de ses services (les documents sont effectivement hautement classifiés). Il recevra l'équivalent de 100 000 dollars en Monero, une crypto-monnaie réputée intraçable.
Mais ses dépôts, physiques, dans les boites-aux-lettres mortes permettront surtout au FBI de le photographier et rapidement de l'identifier, lui et sa femme Diana, également présente à chaque dépôt de document. Ils sont tous les deux arrêtés le 9 octobre dernier.
Le couple risque la prison à vie
Jonathan Toebbe n’a pas transmis de secret à une puissance étrangère stricto sensu – il a simplement été dupé mais croyait bien trahir effectivement les secrets de son pays. Pour la justice américaine cela ne fait d’ailleurs pas grande différence : lui-même et son épouse risquent la prison à vie.
Reste l’énigme de la puissance étrangère approchée par Jonathan. C’est une puissance intéressée par les chaudières nucléaires de sous-marins : Jonathan a plusieurs échanges avec de soi-disant "experts" de la propulsion nucléaire ; qui plus est une puissance alliée des États-Unis puisqu'elle leur a vendu la mèche. Il ne s’agit donc probablement pas de la Russie ni de la Chine. Indice supplémentaire, dans sa toute première offre de service, Jonathan s'excuse d'avoir rédigé sa lettre dans une langue qu'il ne maitrise pas. Une langue autre que l'anglais. Donc on oublie l'Angleterre ou l'Australie qui s’intéressent aussi de près à la propulsion atomique des sous-marins. Cela laisse en fait deux pays possibles : le Brésil qui développe en ce moment son premier sous-marin à propulsion nucléaire et la France qui a développé ses propres réacteurs embarqués depuis longtemps mais qui aurait bien pu être très intéressée de connaître l'état d'avancement de la technologie américaine en la matière.
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