Vers un bonus-malus énergétique
Le texte est présenté comme une révolution
" sociale " et " environnementale " pour le consommateur.
C'est une promesse de campagne de François Hollande : lutter contre le
fléau de la précarité énergétique qui touche 8 millions de personnes en France (les prix ont flambé ces dernières années), tout en
encourageant les économies d'énergies. En pratique, il s'agit de facturer à bas
prix les premiers volumes de gaz ou d'électricité consommés, puis de les
augmenter ensuite par paliers, en fonction de critères définis à
l'avance : nombre de personnes par famille, qualité de l'isolation
thermique du domicile, etc... C'est en quelque sorte un système de bonus-malus
qui vise à responsabiliser le consommateur. Pour l'instant, le bois de chauffe
et le fuel domestique en sont exclus. Idem pour l'eau qui fait déjà l'objet
d'une tarification spécifique, et souvent complexe, au niveau communal.
Tous les consommateurs seront-ils logés à la même
enseigne ?
Dans les faits, paradoxalement, le système pourrait s'avérer
discriminatoire en fonction, par exemple, de la qualité de l'habitat. Il est
avéré que les maisons des ménages les plus modestes sont de véritables
passoires thermiques comparées au logis de ménages plus aisés, mieux équipés,
donc moins consommateurs. Autre écueil : comment vérifier le respect des
critères d'éligibilité à ce bonus-malus ? Tous les foyers ne sont pas équipés
de compteurs électriques individuels. Des inspecteurs vont-ils venir contrôler
chez chacun d'entre nous la qualité de notre isolation ou va-t-on se contenter
du mode déclaratif ? Un tel système mis en place par l'Italie a donné lieu à
une fraude monumentale dans la péninsule. Enfin, ultime détail, comment établir
une moyenne entre les habitations du Nord de la France et celle du Sud qui
bénéficient généralement d'un climat plus favorable ? Au final, la feuille
d'impôt risque bien de servir d'informateur utile.
La proposition de loi fixe-t-elle un calendrier pour
l'application de toutes ces mesures ?
Oui : l'année prochaine, au plus tard 2014. Mais les
experts vous le diront : si on veut construire un système réellement
efficace, plusieurs années sont nécessaires. Il faut d'abord établir une grille
d'indexation des tarifs, mettre en place et appliquer les procédures de
contrôle... enfin, cette proposition de loi exclue toute référence aux prix
finaux des matières premières. Sauf à recourir aux méthodes des économies
administrées, les prix applicables aux consommateurs reflèteront toujours les
prix de production. Et on sait que ces derniers, notamment du pétrole, vont
augmenter inéluctablement au cours des prochaines années. Le principe de cette
loi est plus que louable mais comme beaucoup de promesses de campagne, elle est
plus politique que pragmatique. Accusée ces dernières semaines de ne pas
réformer assez vite, la nouvelle équipe au pouvoir risque de fabriquer – sans
mauvais jeu de mot – une véritable usine à gaz qu'elle aura bien du mal à faire
tourner correctement.
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