Trop riche, l'Allemagne n'aide pas assez l'Europe
Situation kafkaïenne. Rien d'étonnant dans la patrie linguistique du célèbre écrivain. Quant à la Commission européenne, elle n'est pas à un paradoxe près. Quelle étrange école que celle où l'on tape sur les doigts des meilleurs élèves ! Le message est le suivant : Allemagne tu exportes trop, tu n'importes et n'investis pas assez. Cela créé des déséquilibres au sein même de l'Union.
Sur le fond, quel est le problème ?
Si tous les pays faisaient comme l'Allemagne, c'est à dire ne faisaient qu'exporter, qui achèterait en retour par le biais d'importations ? Nos voisins d'outre Rhin ne consomment pas assez et, du coup, le pays ne joue plus son rôle de locomotive pour le reste de l'Europe malgré ses 80 millions d'habitants. L'Allemagne est la championne mondiale de l'exportation. Sur le seul mois de septembre, l'excédent de sa balance commerciale a atteint 20 milliards d'euros alors que ses partenaires du Vieux continent se battent comme des diables avec leurs déficits. 20 milliards d'euros, c'est 8% du Produit Intérieur Brut... personne ne fait mieux sur la planète (même la Chine n'exporte que 3 et demi% de sa richesse nationale). Ce différentiel allemand a poussé Washington et le FMI à lancer la même alerte que Bruxelles la semaine dernière mais on en a moins parlé.
Quand la Commission européenne dit qu'elle "lance une enquête", qu'est-ce que cela veut dire, et quelle est sa légitimité pour fouiller ainsi dans les affaires allemandes ?
Premier point : elle va déterminer si l'Allemagne peut faire plus pour aider à rééquilibrer l'économie de la zone euro. Les fonctionnaires de Bruxelles vont passer au tamis une série de 30 indicateurs. Cette enquête va se poursuivre jusqu'à l'année prochaine et le verdict devrait tomber en février ou mars.
Ensuite, sur la légitimité, ce "bilan approfondi" entre dans le cadre d'une nouvelle réglementation mise en place en 2011 dans la foulée de la crise. Elle permet aux instances européennes de prévenir tout nouveau dérapage. Si au terme de l'enquête, il s'avère que l'Allemagne contribue réellement au déséquilibre européen, elle pourrait subir une amende de 0.1% de son PIB (près de 3 milliards d'euros).
Ira-t-on jusqu'au bout de la logique ?*
Non. Sanctionner un bon élève serait illogique. C'est comme si on punissait une entreprise parce qu'elle fait des profits. Et puis allez demander à Angela Merkel de réduire la compétitivité de son pays...
En réalité Bruxelles se montre en gardienne du temple. Elle est pleinement dans son rôle de "lanceur d'alerte". Ce qu'elle ne devrait pas manquer de faire aussi avec la France vendredi matin mais pas avec les mêmes arguments que ceux développés pour l'Allemagne.
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