Le moment thatchérien de Nicolas Sarkozy
"Je ne suis ni Thatcher, ni Reagan", avait lancé Nicolas Sarkozy pendant la campagne électorale. Dans les deux cas pourtant, l’attitude face aux grèves est restée dans l’histoire comme la marque d’une stratégie de… rupture dans la relation entre pouvoir politique et mouvement syndical. Peu après son arrivée au pouvoir en 1981, Ronald Reagan n’hésite pas, après un ultimatum de 48 heures, à licencier 11 000 contrôleurs aériens qui refusent de reprendre le travail. Il engage ensuite la déréglementation du ciel américain. Au Royaume-Uni, forte d’un succès électoral historique, Margaret Thatcher se lance en 83-84 dans un affrontement sans précédent avec le syndicat le plus puissant en face d’elle, celui des mineurs. Contrairement son prédécesseur, qui y avait laissé son crédit politique et sa place, elle ne cède rien. Après un an de grève, d’innombrables coupures d’électricité subies par les britanniques, 200 000 mineurs sans salaire, la Dame de fer finit par emporter la confrontation. Dans les deux cas, les dirigeants se sont appuyés sur leur légitimité électorale pour passer en force et avoir ensuite les coudées franches pour appliquer leur programme. Ca n’est affectivement possible que dans cette dynamique mais le coût social a été très lourd.
L’opinion est-elle prête à accepter une telle épreuve de force ?
Le soutien de l’opinion a été, dans le cas de Thatcher, un élément essentiel de l’affaiblissement du syndicat des mineurs. Mais la comparaison a ses limites car en France - et le gouvernement en convient - la modernisation des relations sociales passe au contraire par le renforcement de syndicats qui sont aujourd’hui trop faibles. En outre, une trop grande brutalité dans le traitement du conflit pourrait renforcer le mouvement, non pas tant dans le soutien au maintien des régimes spéciaux, mais à travers la manifestation d’un malaise social plus large, lié à la vie chère. Ces précédents historiques montrent quand même que ce sont les reculs sur des réformes emblématiques qui conduisent à l’immobilisme et à l’impuissance politique, l’exemple le plus marquant en France étant celui d’Alain Juppé après le mouvement de 95. Ni Thatcher, ni Reagan, Nicolas Sarkozy est contraint d’aller jusqu’au bout sur le principe s’il veut donner un contenu à son quinquennat.
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