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L'économie sud-africaine doit se réinventer

Gros plan sur l'économie sud-africaine. Avec la disparition de Nelson Mandela, c'est une page de rêve qui se tourne. Madiba a donné espoir à plusieurs générations de Sud-Africains mais n'a pas permis de miracle économique.
Article rédigé par Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Plus de 20 ans après l'abolition des lois de ségrégation, le pays est parvenu à se hisser parmi les cinq premiers grandes nations émergentes mondiales mais un fossé sépare toujours riches et pauvres. Paradoxe : avec ses 50 millions d'habitants, l'Afrique du Sud souffre aujourd'hui du boom démographique des deux dernières décennies : un sud-africain sur trois a moins de 26 ans. Une jeunesse qui devrait être une richesse mais elle est frappée par le chômage : 60% n'a pas d'emploi. Le taux de chômage du pays frôle aujourd'hui les 26%. quatre sud-africains sur 10 ne terminent pas l'école... plus de la moitié des sud-africains continuent de vivre sous le seuil de pauvreté. Aujourd'hui, les allocations vieillesse et familiale versées à quelque 10 millions de personnes servent d'amortisseur social. On est très loin de la société dont Madiba rêvait.

Ce paradoxe est d'autant plus flagrant que l'Afrique du Sud est le pays le plus riche du continent noir

C'est le seul marché émergent situé au Sud du Sahara mais l'essentiel des recettes fiscales tirées des mines disparaissent dans le budget national. Une déperdition énorme quand on sait que le nombre de contribuables a été multiplié par 8 depuis les élections libres qui ont amené l'ANC au pouvoir en 1994. Depuis, le PIB (la richesse produite) a presque doublé. La croissance économique devrait atteindre 3% l'an prochain.
Aujourd'hui, l'Afrique du Sud produit près de la moitié de l'ensemble de l'électricité du continent mais le pays, qui vit essentiellement de sa rente minière, souffre d'une insuffisance d'infrastructures et d'une pénurie de main d'œuvre qualifiée. Et la situation ne s'arrange pas depuis 2012 avec les mouvements sociaux dans les mines de platine. Les hausses de salaires accordées après les mouvements de grève ont, certes, alimenté la consommation intérieure, mais fortement pesé sur la compétitivité des entreprises.


L'Afrique du Sud a pourtant intégré le club très fermé des "BRICS", les pays émergents dynamiques*

Les BRICS pour Brésil Russie Inde Chine et, donc Afrique du Sud. Mais cette nation reste bien loin derrière. La question est de savoir si le pays méritait d'y être réellement intégré. Si l'on prend en considération les seuls critères économiques, d'autres pays - comme l'Indonésie - auraient eu plus de mérite à y figurer.
Faire entrer l'Afrique du Sud dans ce cercle très fermé n'était-il pas plutôt une opportunité pour les pays riches de gagner de nouveaux marchés ? La question est clairement posée. La Russie l'a bien compris dans le secteur de l'armement par exemple. L'Europe beaucoup moins. La France, elle, n'y assure que 1% de ses exportations.
Il est urgent pour l'Afrique du Sud de relancer l'investissement notamment dans l'industrie manufacturière. L'an dernier, le gouvernement a annoncé un plan de développement sur 15 ans mais rien ne se fera sans la participation des pays développés et de cadres sud-africains formés à l'étranger. Problème : cette élite continue d'affluer vers le Canada ou l'Australie. Finie la période d'euphorie des années Mandela. Le pays doit se réinventer.

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