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Kadhafi à Paris : les liaisons dangereuses

La visite très controversée du colonel Kadhafi à Paris devrait être l’occasion pour la France de décrocher plusieurs milliards de contrats avec la Libye. Avec notamment des ventes pour Airbus et peut-être même un premier succès à l’export pour l’avion de combat Rafale. La France a-t-elle vraiment beaucoup à gagner sur le plan économique à dérouler le tapis rouge au dirigeant libyen ?
Article rédigé par franceinfo
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En guise de tapis rouge, c’est une tente bédouine qui est installé à la résidence Marigny, là où Kadhafi va résider. Pour quel profit ? On parle de 3 milliards de contrats. La Libye est un marché porteur. 1. Le pays a de l’argent, beaucoup d’argent à dépenser, 240 milliards de dollars accumulés grâce à la rente pétrolière. 2. De retour dans les échanges internationaux, il développe à tout va ses infrastructures. Tripoli est une ville chantier. Un nouvel aéroport est en construction, censé devenir une plateforme pour toute l’Afrique. 3. Kadhafi est pressé. La date clé, c’est le premier septembre 2009. Jour du 40ème anniversaire de la « Révolution » qui l’a porté au pouvoir et qui sera évidemment célébrée en grande pompe. Donc il y a des opportunités rapides pour de grands groupes dans l’énergie, le BTP, l’eau, les télécommunications. Tout est à faire. Les entreprises françaises sont d’ailleurs déjà présentes : Total, Vinci, Alcatel. EADS, la maison mère d’Airbus, a ouvert son bureau à Tripoli en 2005. Pour autant, la Libye n’est pas un Eldorado. Ca reste un petit marché. 6 millions d’habitants. Rien à voir avec la Chine ou la Russie. Ce que nous vendons à Tripoli, c’est moins d’une journée de toutes nos exportations annuelles.

Est-ce que ça veut dire que ça ne serait pas très grave de se passer de quelques contrats pour ne pas donner le sentiment de cautionner un régime peu recommandable ?

C’est plus complexe. La Libye est revenue dans le jeu et l’exploitation de ses ressources suscite d’âpres compétitions commerciales. Si la France n’y participe pas, d’autres occuperont le terrain. Pas plus tard qu’hier, Tripoli a annoncé quatre grands contrats gaziers avec des poids lourds du secteur : l’anglo néerlandais Shell, le russe Gazprom, la Sonatrach algérienne. GDF et Total étaient aussi en compétition. Les Italiens, les Allemands prennent aussi des marchés en Libye. Plus discrètement. La différence avec d’autres pays, c’est que nous ajoutons à nos coopérations une dimension politique plus marquée. Et que l’on y met un volet spécifique concernant le nucléaire civil, les ventes d’armements. Or si le régime libyen donne quelques signes de modernisation, il n’offre aucune garantie de stabilité à terme. Avec l’Irak aussi, la France a signé de fabuleux contrats dans les années 70. C’est forcément inquiétant.

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