Financement des syndicats : l'ère du soupçon
Comme toujours, il faut faire preuve de prudence mais on note que l’affaire est partie de Tracfin, cellule française de lutte contre le blanchiment d’argent, qui dépend du ministère des Finances. Elle éclate à un moment très délicat, car patronat et syndicats sont engagés dans une discussion sans précédent sur l’assouplissement du marché du travail. On se souvent qu’en Allemagne, l’homme qui a inspiré au chancelier Schröder la réforme de la gestion du chômage, l’ancien chef du personnel de Volkswagen, Peter Hartz a été emporté l’an dernier par un énorme scandale de corruption et de faveurs très variées au profit de quelques cadres syndicaux véreux. Pour l’heure, ce qui pointe en France, c’est l’ère du soupçon, alimenté par un constat dressé par de nombreuses études et rapports officiels : la grande opacité du financement des organisations syndicales.
Sur quoi repose en principe ce financement ?
Sur les cotisations de leurs adhérents mais dans un pays où le taux d’appartenance à un syndicat est très bas – 8% contre 80% en Suède ou 30% au Royaume-Uni – cette ressource ne suffit pas. Dès lors, le financement syndical devient dépendant d’aides publiques – l’équivalent de 5 000 fonctionnaires d’Etat seraient ainsi détachés auprès des syndicats – mais aussi d’aides des entreprises : crédit d’heures, mise à disposition de salariés et, dans de rares secteurs, financement direct. Le problème est que cela se fait sans règles écrites noires sur blanc. Les syndicats ne sont pas obligés de publier leurs comptes. Une seule des cinq grandes centrales livre des données financières sur son site Internet.
Est-ce qu’il faut aller vers une réforme du financement des syndicats comme on l’a fait pour les partis politiques ?
Ce qui se passe en ce moment a le mérite de briser un tabou. Jusqu’à présent, on ne parlait que de la réforme des règles de représentativité des syndicats. Il faut maintenant la coupler avec celle du financement. Il pourrait provenir entièrement de l’Etat, comme pour les partis politiques, mais ce ne serait pas un encouragement à l’adhésion, donc au renforcement des syndicats. D’autres scénarios sont envisageables comme une augmentation de l’avantage fiscal lié à la cotisation syndicale, une meilleure prise en compte de l’audience des syndicats dans la répartition des aides publiques, des mises à dispositions de personnels légalisées mais en échange cette fois d’une véritable transparence des comptes.
Pour en savoir plus : lire le Rapport au Premier ministre de Rapahël Hadas-Lebel, Président de section au Conseil d'Etat. Mai 2006 : "Pour un dialogue social efficace et légitime"
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