Entre croissance atone et nouvelle majorité sénatoriale, le projet de budget 2012 est-il tenable ?
Cela commence à faire beaucoup ! D'abord, petit cadrage : que veut dire croissance économique de « 0,0% » comme l’a annoncé hier matin l’INSEE pour le deuxième trimestre ? Tout simplement que la production française n’a pas dégagé de richesse supplémentaire par rapport au trimestre précédent. L’activité a stagné et pas baissé. On ne parlerait pas alors de ‘décroissance’ (le mot est un argument politique mais n'appartient pas au vocabulaire économique)… en cas de baisse réelle, on aurait parlé de récession. Ce qui n’est évidemment pas le cas. Donc attention aux mots, ils ont leur importance.
Oui mais le budget 2012 est bâti sur une hypothèse de croissance d’1,75% ! On en est loin aujourd’hui !
C’est vrai que les derniers chiffres de l’INSEE nous en éloignent… sans compter avec les différentes projections des conjoncturistes : des 0.7% de croissance envisagés par Natixis, aux 1,4% attendus par le FMI, le consensus des économistes aboutit à 1,2%. Bref, personne n’arrive aux perspectives du gouvernement… problème ! Difficile de concilier rigueur et croissance. Rarement gouvernement aura été confronté à une telle équation pour construire un budget : serrer la ceinture de l’administration et ponctionner ménages et entreprises de manière intelligente en période électorale pour envoyer des signaux forts aux marchés financiers. A sept mois de l'élection présidentielle, le Président de la République se serait bien passé de cette situation inextricable.
Et le Sénat à gauche dans tout cela ?
C’est la nouveauté qui s’ajoute au cas d’école que je viens de décrire. Désormais majoritaire à la Chambre haute du Parlement, l’opposition a fait comprendre qu’elle rendrait œil pour oeil, dent pour dent, autrement dit : qu'elle proposerait projet contre projet. Est-ce à dire qu’elle ira jusqu’à présenter un contre budget 2012 ? A voir ! A quel niveau placera-t-elle l’imposition supplémentaire des hauts revenus ? Jusqu’à présent, aucun des six candidats à la primaire socialiste ne s’est prononcé. Et puis, comment brocarder à outrance l’action d’un Chef d’Etat qui, au nom de l’ouverture, a placé plusieurs socialistes à la tête d’institutions importantes : Didier MIGAUD à la Cour des comptes et Jérôme CAHUZAC à la Commission des Finances de l’Assemblée nationale ? Paradoxalement, en cédant aux sirènes d'une obstruction systématique sur les grands dossiers qui engagent l'avenir économique de la France – fût-ce au titre d’argument de campagne électorale pour 2012 -, la nouvelle majorité sénatoriale de gauche pourrait bien se retrouver prise au piège... le piège d'une Assemblée nationale de droite, à qui, jusqu'à preuve du contraire, revient aujourd'hui le dernier mot.
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