Cet article date de plus de huit ans.

Bruxelles déclare la guerre à l'optimisation fiscale des multinationales

La Commission européenne présente jeudi 28 janvier son programme de lutte contre l’optimisation fiscale des multinationales. Les propositions devront être d’abord adoptées par les 28 pays membres, mais on en connaît déjà les contours
Article rédigé par Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
  (Commission européenne à Bruxelles © Maxppp)

Evasion, optimisation fiscale, fraude à la TVA… difficile d’en chiffrer précisément l’impact mais une étude du Parlement européen évalue à 160 milliards d’euros le manque à gagner global pour les finances publiques européennes.

Sur la forme, ce "paquet fiscalité", comme on l’appelle à Bruxelles, devrait comprendre deux directives, deux recommandations et deux études détaillant les comportements des multinationales.

Passé ce côté technique, l’esprit de cette initiative est de "siffler la fin de la récréation" pour les multinationales soucieuses d’échapper au fisc dans leur pays d’origine et de les contraindre à payer leurs impôts où elles font leurs bénéfices.

 

Les mesures

 

Ce paquet fiscal comprend principalement trois mesures :

1/ Taxer de manière concrète les profits des entreprises.

2/ Renforcer la transparence sur l’information financière de ces sociétés et échanger automatiquement les informations entre les différentes administrations.

3/ Créer une égalité de traitement entre les Etats, et entre les entreprises elles-mêmes pour que les grandes sociétés soient soumises au même régime que celles de taille plus modeste. Il est avéré que les grands groupes paient, environ 30% d’impôts en moins.

 

L’OCDE travaille déjà sur ce sujet… que peut apporter de plus la Commission européenne ?

 

En réalité, l’Europe va s’appuyer sur ce que l’OCDE a mis en place (dispositif BEPS : Base Erosion and Profit Shifting).

L’OCDE ratisse plus large que l’Europe, au niveau mondial cette fois, avec par exemple le Japon, la Malaisie, l’Australie, le Mexique, etc…). 

Seule ombre au tableau : les Etats-Unis continuent de faire cavalier seul, estimant disposer des accords fiscaux nécessaires.

Certains pays qui avaient construit leur modèle économique sur une fiscalité avantageuse vont être obligés de revoir leur copie… inutile de dire que ça va secouer quelques habitudes.

Les GAFA, un cas à part ?

Comment traiter le cas des GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple) qui créent régulièrement la polémique ?

Le Commissaire européen aux affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, qui porte ce paquet fiscal, confiait il y a quelques jours à Paris devant l'AJEF (Association des Journalistes de la presse Economique et Financière) qu'il était plutôt favorable à une approche globale en matière de fiscalité pour ces groupes et non une fiscalité spécifique pour ne pas pénaliser l'industrie numérique.

 

Véritable avancée ?

 

L’élément déclencheur de cette offensive a été l’affaire LuxLeaks en 2014. Ce scandale avait mis en lumière un système organisé d’évasion fiscale notamment avec le Luxembourg, ce qui avait profondément terni l’entrée en fonction du nouveau président de la Commission Jean-Claude Juncker, lui-même Luxembourgeois. Piqué au vif, ce dernier s’était engagé à tout faire pour casser ce système.

Nous entrons donc aujourd’hui dans la phase pratique… reste à mettre en œuvre tout cela de manière homogène sur le plan international. Ce qui ne sera pas une mince affaire.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.