"La voile, c'est un sport populaire parce que ça nous émeut tous, des centaines de milliers de personnes assistent aux départs et aux arrivées", souligne Jean Viard
La course Arkéa Ultim Challenge à Brest est la première édition du tour du monde à la voile en solitaire pour des maxi-trimarans de la classe Ultim, de 32 mètres de long et 23 de large. Plus de 40.000 km au départ de Brest, pour revenir à Brest, 40 à 50 jours plus tard. Sur la ligne de départ demain, six skippers bretons chevronnés, sur le même parcours que le Vendée Globe. Jean Viard est en compagnie de Jean-Rémi Baudot. Une course dont franceinfo est radio partenaire.
franceinfo : Vous avez le pied marin Jean Viard ?
Jean Viard : Non, pas trop. J'ai fait de la voile quand j'étais petit, je suis marseillais, donc tout le monde faisait de la voile. Mais honnêtement, je n'ai pas le pied très marin...
Comment on explique cet engouement, cette passion française pour la voile ?
L'Italie et la Grande-Bretagne aussi, avec des bateaux un peu différents, mais ce sont d'abord les pays comme la France qui est un grand pays maritime – que ce soit en Méditerranée, dans l'Atlantique ou à la Guadeloupe – donc, je crois que la première réponse est là. Après, la voile, ça a quelque chose d'un peu magique, ça fait rêver puisque l'essentiel de la terre, c'est de la mer en réalité. Et là, il n'y a pas grand monde.
Il y a une chose qui est amusante, c'est que quand on dit je suis en "plaine" mer, ça s'écrit comme dans la "plaine agricole", c'est perçu par les marins comme un immense espace plan, alors que nous les terriens, on a tendance à dire en "pleine" mer à cause de la quantité d'eau...
Avec une certaine idée de la liberté aussi quand même ?
Mais oui, l'idée de la liberté, une idée de l'aventure, après, c'est souvent des courses ouvertes aux filles, aux garçons, et c'est très rare dans les sports que les filles et les garçons puissent faire la même course, que ce soit Ellen MacArthur ou Tabarly, ils étaient dans les mêmes compétitions. Ça c'est important. Après, c'est sûr que c'est un monde de liberté, on a l'impression qu'il n’y a rien d'interdit. Alors après, il y a la dimension sportive,ce sont des courses, le but c'est de gagner, mais de les gagner en fonction de la taille du bateau.
Évidemment, il y a des catégories parce qu'il y en a qui vont plus vite que les autres, dont le but ce n'est même pas forcément d'arriver premier. Donc je crois qu'il y a tout ça qui joue, toutes ces valeurs-là. Et puis quelque part, c'est cet immense monde vide. Alors, ils sont souvent assez écolos, les marins, parce que ce monde "vide", ils le voient aussi avec pas mal de plastique, de containers. Donc, ça aussi, il faut y penser quand même.
C'est vraiment écolo la course à la voile, ce sport nature qui utilise le vent mais qui n'est peut-être pas quand même vu comme un sport écologique. Pourquoi ?
La voile a longtemps été le principal moyen de transport. En fait, c'est beaucoup plus commode de se déplacer sur l'eau que par exemple, en diligence. Un Parisien qui voulait aller en Grèce, il descendait par les rivières, et après, il prenait le bateau à Marseille, donc ça a d'abord été un moyen de déplacement.
Après nous, évidemment, ce n'est plus un moyen de déplacement, c'est en train de le redevenir. Les super containers sont en train de s'équiper de voiles. Il n'y a pas une séparation, les gens de la course sont souvent au cœur de l'innovation en termes de technique, de matériaux, mais en fait, ça va revenir dans le monde du commerce, ce n’est pas uniquement pour le fun.
Est-ce que c'est un sport populaire ? Qui pratique la voile ? Vous disiez : "moi j'habitais à Marseille, tout le monde faisait de la voile". C'est un cliché ou pas ?
Il n'y a pas tellement de voiliers en France, il y en a un peu plus de 300.000. Il y a 4 millions de résidences secondaires, on est quand même d'abord des paysans. Après, il y a eu un gros développement avec le surf aussi. C'est surtout une pratique géographique, regardez les Bretons par exemple, très souvent, les coureurs sont bretons, parce que là, c'est une culture, ça se transmet. En plus, on n’a pas de problème pour avoir des bateaux parce que le problème d'un bateau, c'est qu'il faut un amarrage. En Méditerranée, c'est souvent très compliqué d'avoir un amarrage, en Bretagne, je pense que c'est plus facile.
Donc je dirais que c'est un sport populaire parce que ça nous émeut tous. Regardez le nombre de gens qui viennent assister au départ ou aux arrivées, ce sont des centaines de milliers de personnes qui viennent assister. Donc comme aventure, au fond ce sont nos héros. Et puis il y a beaucoup de sports où les héros ne parlent que de pognon, de drogue, tout ça ; dans la voile, non.
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