#FreeMortaza : mobilisation pour la libération de Mortaza Behboudi, depuis 50 jours en prison en Afghanistan
50 jours de détention. L’incompréhension grandit au fil des semaines. Le journaliste franco-afghan Mortaza Behboudi a été arrêté à Kaboul par les talibans, au motif d’espionnage. Dans les rédactions françaises, la mobilisation grandit autour du comité de soutien pour réclamer la libération d’un reporter hautement considéré par ses pairs dans la profession.
Le hashtag #FreeMortaza est repris sur tous les réseaux sociaux. Que gagnent les talibans à détenir un journaliste, eux qui cherchent à normaliser leurs relations avec la presse et la communauté internationale ? Et l’accusation d’espionnage ne tient évidemment pas. Né en Afghanistan en 1994, il grandit en Iran où s’est installée sa famille.
Sa vocation va naître dans les manifestations de juin 2009, dans les grandes villes iraniennes. Le jeune adolescent se prend de passion pour le photojournalisme, mais il est arrêté pour avoir documenté l’insurrection. Il tient alors à rejoindre son pays de naissance, par amour pour l’Afghanistan, afin de suivre un parcours universitaire. Mais c’est une période où les attentats redoublent en intensité, où le pouvoir afghan corrompu est contesté, où la criminalité prospère, et où il est difficile pour un étudiant de se construire.
Exil en France
Mortaza Behboudi fréquente plus les salles de rédaction que les bancs de l’université. Il enquête sur des sujets sensibles, comme le trafic d'opium, la guerre en Irak, et les attentats perpétrés à Kaboul, notamment durant la campagne présidentielle de 2014. Au printemps 2015, le journaliste est finalement enlevé par des hommes en armes, dans la région du Wardak. Sa libération se négocie âprement. Il opte pour l’exil.
La condition de réfugié à Paris, c’est deux mois et demi dans la rue. La soupe populaire, dormir avec les Afghans à même le sol, dans la gare du Nord. Déambuler, rencontrer des bénévoles, avant d’entrevoir la lumière de la Maison des journalistes. C’est ici qu’il va apprendre son français, et retrouver l’énergie autour de son projet de vie : profession reporter.
Doté d’une carte de presse afghane, il est accrédité à la Cop 21, décroche une interview avec Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, pige pour plusieurs médias, et voit sa candidature acceptée à la Sorbonne, dans un master de relations internationales.
Il continue de piger, écrit ses premiers articles pour Mediapart et Libération. Il ne se départ pas pour autant de sa condition de réfugié, même si tout va mieux pour lui.
Mortaza veut porter la voix des migrants
Guti (le monde et l’univers en perse) est lancé. La rédaction de ce média en ligne est composée de jeunes journalistes français, mais aussi et surtout de reporters confirmés, ayant fui leur pays (Syrie, Cameroun, Tchad).
Pour Mortaza, "Cette diversité encourage un double regard franco-réfugié sur l’actualité en France, le partage d’opinions, de points de vue différents, mais aussi le partage de compétences. Par nos expériences diverses, nous pouvons proposer des regards croisés sur des sujets de société, et proposer par exemple une réponse à la question : quel regard porte un réfugié sur la France ?"
Mais il continue de collaborer avec les médias français. Journaliste et fixeur pour France Télévisions, Arte. Il écrit toujours pour Mediapart. Des amitiés naissent avec les figures des rédactions avec lesquelles il travaille : Dorothée Ollieric, ils obtiennent ensemble le dernier prix Bayeux-Calvados des correspondants de guerre, Rachida El Azzouzi à Mediapart. Ensemble, ils partagent la réalisation d’un court-métrage.
De celles et ceux qui le croisent, toutes et tous retiennent le sourire qui illumine son visage. Et ce n’est pas une image d’Épinal. Débordant de vie et de projets, il nous soumettait avant de s’envoler pour l’Afghanistan un projet de plateforme qui verra forcément le jour… Un jour, quand il reviendra.
Car ce journaliste, qui n’a pas 30 ans, n’a rien à faire dans une prison à Kaboul. Free Mortaza !
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