Sommes-nous tous des menteurs et des tricheurs ?
Les affaires comme celles de Cahuzac, Tapie ou Jean-Claude
Romand, qui a prétendu des années être médecin à l'OMS et a fini par tuer toute
sa famille pour ne pas être découvert seraient les symptômes d'un mal dont nous
serions tous atteints : la maladie de l'imposture.
C'est une attitude humaine, on ment dès que l'on sait parler,
mais de là à parler d'imposture... C'est un mal nécessaire, car nous ne pouvons
vivre psychiquement nus devant les autres. En revanche, selon Roland Gori,
notre époque sécréterait des impostures à la fois plus nombreuses et plus
graves. Notre époque de la performance et de sa copine l'évaluation nous
entraine peu ou prou à prétendre ce que nous ne sommes pas.
Des attentes sociales très fortes
Selon Roland Gori, la vie est devenue un champ de courses
avec des résultats à atteindre, des
scores à réaliser, y compris dans notre vie privée. Il n'y a pas de place pour
ceux qui n'y parviennent pas. Pour répondre à cette exigence, nous mettons en
place des petites ou des grandes stratégies. Nous racontons ce que nous savons
être attendu. C'est un piège très angoissant. Notre cerveau humain n'a pas les
moyens de se conformer à ces demandes permanentes, être le meilleur au travail,
être le meilleur parent, le meilleur amant, le meilleur conjoint. Nous n'avons
plus le temps de penser, d'élaborer, de rêvasser, de créer, activités
indispensables au psychisme.
De plus en plus d'imposteurs
Ils seraient de plus en plus nombreux, construits dès
l'enfance en ayant été sommés de se conformer à des modèles trop lourds, trop
grands pour eux, et impossible à atteindre. Ils se sentent alors, selon
l'expression du psychanalyste, "contraints de mettre des talons ou des
échasses pour faire semblant d'être à la hauteur". Ces imposteurs,
lorsqu'ils étaient enfants, ont dû s'identifier à des idéaux qui n'étaient pas
les leurs pour être reconnus et aimés. Pour eux, être confrontés à la vérité
est insupportable, car cela les renvoie à leur angoisse de néant. Ils n'ont
plus que deux solutions : disparaître ou recommencer.
Ne pas tomber dans le piège
Individuellement, nous pouvons veiller à nous interroger sur
nos véritables valeurs, nous demander s'il est bien nécessaire de nous
conformer à tout prix. Nous pouvons aussi prendre la décision de nous accorder
des moments pour reprendre contact avec nos véritables désirs. Et puis, si nous
sommes parents, ne pas soumettre nos enfants à une pression permanente, ne pas
les élever dans le mythe du succès à tout prix. L'épanouissement d'un individu
passe par bien d'autres choses, y compris par l'ennui, Socialement, c'est un
autre problème, mais Roland Gori suggère que nous passions à un autre mode
d'évaluation, qui serait celui de la qualité des actions et non pas sur sa
conformité à une norme.
Roland Gori sera à la FNAC Montparnasse ce jeudi, à 18
heures.
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