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L'acquisition du vocabulaire est aussi importante que la lecture

Avec le Salon du livre qui ferme ses portes aujourd'hui, on a beaucoup parlé de lecture, des études ont été publiées, plutôt encourageantes d'ailleurs, sur la pratique de la lecture. Christilla Pelle-Douel, journaliste à Psychologie Magazine, attire notre attention sur un domaine au moins aussi important que la lecture, c'est celui de l'acquisition du vocabulaire.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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"Plus notre vocabulaire est étendu et plus notre pensée
s'affine, plus nous avons à notre disposition les moyens de nous exprimer de
manière nuancée et précise
". Alain Bentolila, linguiste spécialiste de la
lecture, avait publié un petit rapport très intéressant sur ce sujet il y a
quelques années. Il parlait des élèves du primaire, mais sa réflexion s'adresse
à chacun de nous : lorsque les mots précis nous manquent, c'est le sens
que nous donnons au monde ainsi que celui que nous tentons de transmettre qui
s'obscurcit et s'appauvrit.

Plus un mot est précis, plus il permet à
l'auditeur de comprendre ce que la personne veut dire.

Par exemple, le verbe "gronder" a plusieurs sens
possibles selon le contexte : un père gronde son enfant, l'orage gronde
etc. Si vous employez le verbe "morigéner" qui, lui, n'a qu'un seul
sens possible, celui de la remontrance ferme entre deux êtres humains. Il n'y
aura pas de doute possible sur ce que vous voulez exprimer. Aussi, l'usage
fréquent du mot "disputer" pour exprimer justement le fait d'être
morigéné, alors que ce verbe a plusieurs sens possibles : réclamer quelque
chose à quelqu'un ou, se quereller avec quelqu'un, mais jamais, jamais, celui
de morigéner. Mais il n'y a pas le seul manque de vocabulaire, il y a aussi son
corollaire, c'est à dire le faux sens ou le contresens. Ainsi, on peut arriver
à dire ou à écrire exactement le contraire de ce que l'on veut exprimer à cause
d'un mot employé à tort.

Exemple : le mot "phobie" ou son
adjectif "phobique", qui signifie peur panique incontrôlable, employé
dans le sens inverse, c'est-à-dire  en
voulant parler d'un grand attrait pour quelque chose ou quelqu'un. On a ainsi
entendu "je suis phobique des voyages", en voulant dire "j'adore
les voyages". Peut-être cette personne voulait-elle dire "fanatique".
Il a fallu faire un travail de décodage pour interpréter correctement sa
phrase. Alain Bentolila explique que "lorsque les mots précis manquent,
c'est toute la relation avec le monde qui en est appauvrie."
Il
précise que certains enfants, mais bien sûr cela s'applique aussi aux adultes,
ont un vocabulaire si peu étendu, si flou, qu'ils utilisent la langue dans un "brouillard
sémantique". A la fin du CE1, les enfants les moins pourvus en vocabulaire
n'ont ainsi à leur disposition que 3.000 mots contre 8.000 pour les enfants les
plus à l'aise. 

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