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Micro européen. La Croatie aux urnes

Ce dimanche 5 juillet les Croates sont appelés au renouvellement des 151 sièges de leur parlement, le Sabor.

Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Zagreb avec une vue de la place Bana Jelacica et de la cathédrale.  (BLOOMBERG / GETTY IMAGES)

Les élections législatives en Croatie se déroulent ce dimanche 5 juillet pour le renouvellement de 151 députés du Sabor, le parlement croate. L’issue du scrutin est toutefois très incertaine, et ce, pour différentes raisons. Comme le précise notre invité, l’ancien journaliste Mirko Galic, les Croates, comme beaucoup d’Européens sortent affaiblis de la crise du coronavirus, mais pas seulement, puisque la capitale croate, Zagreb, a été touchée par un séisme le 22 mars dernier, en pleine crise du coronavirus. À l’heure d’aujourd’hui, les traces du tremblement de terre sont toujours visibles dans la ville. D’ailleurs, d’après de nombreux témoignages, la terre continue de trembler en Croatie.

Une crise bien gérée

Si la crise du coronavirus a été bien gérée par le gouvernement d’Andrej Plenković, 2 831 cas de Covid-19 confirmés pour une population d’à peu près 4 millions d’habitants, avec 108 décès, la crainte d’un retour de l’épidémie se fait jour.

Autant de facteurs qui sont de grandes interrogations quant au vote de ce dimanche 5 juillet. Les Croates iront-ils voter ? N'iront-ils pas, par crainte du retour du coronavirus, et encore sous le choc de l’épidémie et du tremblement de terre ; ou se rendront-ils aux urnes pour protester contre l’équipe actuelle au pouvoir. Toutes les options sont ouvertes.

Un gouvernement qui a déçu

Le gouvernement conservateur actuel portait toutes les espérances en 2016, avec l’arrivée d’Andrej Plenković. Cet ancien diplomate, député européen, arrivait à Zagreb comme l’homme qui allait changer le vieux parti conservateur historique le HDZ, celui du créateur de la Croatie moderne, Franjo Tuđman. Mais rien n’y fit, Andrej Plenković apposait sur le parti un vernis qui n’attendit pas longtemps pour craquer.

Tout d’abord, la formation de son cabinet étonna les milieux "autorisés", ensuite l’affaire du géant agroalimentaire Agrokor venait entacher l’image du gouvernement en laissant une trace encore palpable aujourd’hui dans ce scandale historique. Quant à la crise du coronavirus, c’est aujourd’hui un retour de flamme pour le premier ministre, tant sa gestion de l’épidémie fut appréciée, et tant un possible retour de celle-ci laisse dubitatif de nombreux Croates sur l’efficacité de la gestion sanitaire du pays.

Retour du coronavirus, mort annoncée du tourisme croate cet été ? 

Si les bars et les restaurants ont ouvert leurs portes le 11 mai dernier, ils risquent bien de se refermer à l’approche supposée de clusters épidémiques. Malgré les gestes barrière et le port du masque, la Croatie risque bien de connaître un été difficile. Et c’est une grande partie de l’économie du pays qui risque de souffrir, soit le tourisme qui représente 20% de l’économie nationale. Car l’économie croate souffre encore et toujours, il suffit de voir l’état des transports, où l’absence de développement du réseau ferré laisse la place à un lobby du transport routier qui impose le déplacement par autocar dans tout le pays, soit des voyages chronophages rebutants.

Face au risque possible d’épidémie, le secteur balnéaire risque d’en pâtir, malgré la mobilisation des responsables du tourisme croate. Si l’été croate est choyé par les touristes allemands et autrichiens, aussi par les proches voisins balkaniques, l’apparition de clusters pourrait provoquer la désertion des touristes sur la côte croate, tant le secteur médical croate laisse encore et toujours à désirer.

Quant à l’économie elle-même, la crise à venir voit déjà le spectre du chômage devenir réalité, quand on sait que l’épidémie de coronavirus et le tremblement de terre ont été des facteurs déterminants pour des milliers de Croates. C’est donc un avenir difficile qui se profile pour ce très beau pays, mais une suite logique au départ de près de 300.000 Croates qui ont quittéle pays l’année dernière, faute de perspectives d’avenir. Tout ceci ne présageant rien de bon pour les élections législatives.

Des élections imprévisibles

Si la Croatie a terminé sa présidence de l’Union européenne en juin dernier, cette dernière n’a pas brillé dans le ciel européen. Lors des élections présidentielles, marquée déjà par une faible participation, en décembre 2019, le candidat social-démocrate et ancien premier ministre, Zoran Milanović avait "détrôné" Kolinda Grabar-Kitarović, qui s’était fait connaître durant la dernière Coupe du monde de football. Milanovic avait remporté la victoire avec 52,66 % des suffrages exprimés.

Mais cette élection avait vu l’arrivée d’un "outsider", le populiste Miroslav Škoro. Miroslav Škoro est très populaire chez les Croates. Il fut un chanteur reconnu qui avait soutenu le moral du peuple durant la guerre contre la Serbie, dans les années 90, avec une chanson qui est restée le symbole de la résistance et de la liberté retrouvée, "Ne dirajte mi ravnicu", "Ne touche pas ma plaine". Miroslav Škoro est aujourd’hui un homme d’affaire et un universitaire.

C’est donc dans cette élection très indécise de ce dimanche 5 juillet, qu’Andrej Plenković, le conservateur, devra affronter le social-démocrate Davor Bernardić, et tous deux seront face à Miroslav Škoro qui, bien que souverainiste, sera peut-être l’homme avec qui il faudra négocier pour la création d’un gouvernement stable en Croatie. Car Miroslav Škoro possède de très importants soutiens, tant dans les rangs de l’armée, des conservateurs ne croyant plus au parti HDZ historique, ainsi que dans la jeunesse croate qui désire fortement que le pays devienne adulte et soit un vrai partenaire des états membres de l’Union européenne.

Ce 5 juillet, les regards européens se porteront sur Zagreb

Ce sera ainsi une élection décisive pour l’avenir de la Croatie, qui dernièrement s’est fait connaître sur la scène européenne par l’élection de l’ancienne ministre des Affaires étrangères, Marija Pejčinović Burić, au poste de secrétaire générale du Conseil de l’Europe, une des femmes les plus promettantes du monde politique croate.  

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